Les inégalités sociales se creusent et menacent

Face à l’inertie du gouvernement

Mohamed Khalil

Quel bilan pour les 100 jours de l’actuel gouvernement sur le plan social ? La réponse est hélas négative sur tous les plans. Car si les disparités sociales existaient bien avant la pandémie, cela n’a pas empêché que, depuis, elles se sont aggravées fortement. L’inertie du gouvernement rend la pauvreté plus pesante sur le plan social puisque la situation d’aujourd’hui ne permet pas à l’écrasante majorité de la population  de satisfaire aux besoins fondamentaux. Selon des sources crédibles, la flambé de la pauvreté a presque quintuplée.

Le monde des personnes en situation de vulnérabilité a lui aussi connu une inflation. Il compterait, aujourd’hui, plus que le double, qu’avant le confinement. Des chiffres poches de ceux du HCP…

Le pays n’est certes pas aux arrêts. Mais le secteur informel, source de revenus et une niche vitale pour des centaines de milliers de personnes et autant de familles, tarde à reprendre son rythme habituel.

Et, plus que la population rurale, parent pauvre des politiques publiques, ce sont également les travailleurs dans les grands centres urbains qui ont subi le coup de massue et ont été touchés gravement par les mesures sanitaires gouvernementales et les dégâts économiques causés.

L’on savait que les inégalités sociales criantes plaçaient le Maroc dans le 21e rang mondial pour son indice de développement humain. Le HCP avait tiré la sonnette d’alarme sans que le gouvernement daigne prendre les mesures exceptionnelles et urgentes que la situation requiert.

La situation est d’autant plus grave que l’on voit défiler devant nos yeux des groupes de jeunes et d’enfants qui ont fui le milieu familial « affamé », victimes directes de la politique austère et antisociale du gouvernement. Nous n’évoquons pas ces familles, dans l’extrême besoin, n’osent pas tendre la main et vivent « cachées » leurs misères.

Et si les premières aides de 2020 ont permis d’atténuer les effets néfastes de la pandémie et de soulager les victimes de la conjoncture, il faudra relever que la suite n’a pas eu lieu. Car, face à la situation dramatique, en plus de la prise de mesures sérieuses, le gouvernement devrait lancer, au moins, une nouvelle campagne de solidarité dont les principaux acteurs devront être les personnes aisées matériellement. C’est la moindre des choses pour parer aux inégalités sans précédent dans le Maroc moderne.

De l’avis général des observateurs et experts, le point noir de la prestation du gouvernement Akhennouch est, en plus du sinistre sort réservé aux entreprises et aux travailleurs, la cherté de la vie qui s’est installée surtout après sa prise de service, la crise du coronavirus aidant.

Tout le monde s’accorde à dire que la pandémie a mis à nu la situation sociale désastreuse et alarmante de l’immense majorité des familles marocaines. Les plus hauts des responsables l’ont avoué, publiquement. Depuis, elle s’est aggravée de manière indicible. La pauvreté a atteint des couches hier à l’abri de la privation. En attestent les scènes quotidiennes, dans nos rues, auxquelles nous assistons souvent impuissants.
La cherté de la vie vient compliquer davantage la situation des ménages disposant de revenus modestes et même ceux des classes moyennes… sans que les pouvoirs publics ne mettent des filets sociaux ni, au moins, une fin à l’anarchie des prix souvent décidés de manière abusive et arbitraire et sans coup férir…

Ah l’oubli quand tu nous tiens …

Cette démission des pouvoirs publics a installé un spectre de la peur, semant la panique et le doute au sein de toute la population.

On ne parle pas des promesses incongrues formulées lors de la campagne électorale et faite de purs mensonges car elles resteront du domaine du promis qui n’arrivera jamais par lui.

Ainsi, après les promesses mielleuses, l’on a vite oublié, l’instant d’élections voulues démocratiques, oublier les élans de satisfaction et d’enthousiasme qui faisaient dire les pires mensonges, exprimés sans vergogne…

Aujourd’hui, les officiels voudraient tout mettre sur le compte de la pandémie, qui a pourtant dénudé les manquements et les dysfonctionnements.

Mais l’on ne peut plus se cacher derrière le covid-19 pour occulter la réalité que vivent des pans entiers de la population aussi bien dans le monde rural qu’urbain.

Sans conteste, la pauvreté a été aggravée par l’urgence sanitaire et les mesures prises par les gouvernements actuel et celui sortant. Les situations de tous les jours sont là pour débusquer la propagande démagogique du gouvernement qui se fait les éloges de la plénitude et de l’autosatisfaction.

Il a l’audace d’oublier tout et revenir à l’habitude d’oublier comme si de rien n’était… pour avoir les mêmes réflexes et la vie continue avec son lot de malheurs.

Nous n’en voulons comme preuve que ces scènes de rues affligeantes qui mettent en triste spectacle toutes ces catégories de mendiants, qui tendent la main, souvent à visage couvert… symbole d’une dignité encore bafouée par la politique antisociale du gouvernement.

Et toutes les anciennes promesses partent en fumée pour laisser les personnes nécessiteuses ou touchées par la crise face aux aléas et à la générosité populaire.

Cette réalité est plus qu’afflictive dans certaines régions et contrées. Hélas, cette triste situation se propage vite à travers le pays et menace la cohésion sociale et l’équilibre démocratique, obtenu par de louables efforts pendant plusieurs années.

Mais à regarder l’attitude actuelle et passée des mêmes responsables ministériels appelés au gouvernail, ce que l’on craignait fort a fini par arriver, avec les mêmes personnages ministériels aux mêmes habitudes et politiques d’austérité, dépourvus de vision et d’engagement, de verve et de fibre sociale. Ce qui aggraverait encore plus la situation au point de compromettre l’accalmie, la cohésion et la paix sociale.
Nous continuerons à alerter les pouvoirs publics sur la situation sociale tendue que vit, tacitement, le pays. Et donc, l’impératif est de se départir de cette pseudo-assurance ou conviction que rien de grave, de déstabilisant ne pourra arriver… il n’y a pas de pire illusion que cette certitude béante.

Ce qui est également alarmant, c’est aussi ce mouvement haussier des prix, c’est que les pouvoirs publics n’y prêtent aucune attention ni intérêt. Aucun geste ni message ni appel à l’ordre n’est adressé aux forces spéculatives qui dominent le marché et les circuits de distribution.

D’aucuns essaient d’adosser la responsabilité de la hausse des prix vertigineuse que nous subissons à la pandémie et à la hausse des prix du transport maritime et routier, voire à la crise alimentaire que connait le monde. L’on tente aussi de justifier ces hausses par l’augmentation des prix de l’essence

Et leur incidence sur les facteurs de production…

Rappelons, in fine, que notre Constitution est pleine de droits… mais beaucoup manquent à l’appel pour en faire un Etat de droit sur toute la ligne. Surtout en l’absence de celui – le fondamental – du droit à la nourriture, minimale et suffisante.
C’est la base de la justice sociale et de la dignité intrinsèque et bien comprise de la personne humaine. Et il faudra émettre l’espoir que nos gouvernants en soient conscients et mus par la volonté de mettre fin aux profits abusifs et outrageants.

L’alarme…

Qu’en est-il du registre social unique annoncé par le Souverain qu’il faudra actualiser par l’enregistrement des nouvelles victimes pour les faire bénéficier des programmes d’appui social ?

Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. L’on na pas cessé, depuis des lustres à appeler à la mise en œuvre d’un chantier gigantesque des grands travaux qui doivent garantir aux nécessiteux et démunis un travail et un revenu régulier, sans plus être dans l’obligation de tendre la main, faire la manche ou attendre la charité occasionnelle.

Car si la pauvreté ne s’arrête pas au seul revenu, il en constitue un moyen de s’en sortir, face aux multiples manques en infrastructures, équipements et services publics (Eau potable, éducation, santé, logement, transports et d’autres services sociaux d’équipements communaux…).
L’Etat a l’obligation de trouver, sans tarder, les moyens idoines pour rendre justice à ces populations, longtemps délaissées et laissées pour compte.
L’heure est au travail sérieux pour donner la preuve que le Maroc ne laissera pas mourir ses pauvres et que la solidarité est nationale et génétique. Chacun à son poste et selon ses moyens…
Ce ne sera que justice rendue et une œuvre qui ressoudera la famille marocaine autour de valeurs de justice et de dignité.
C’est là la seule alternative qui permettra au Maroc, à moyen terme, de vaincre la pauvreté et de pouvoir prétendre à l’émergence économique sans de grandes différences de vitesse entre la locomotive économique  et les wagons sociaux.

Top