«Notre objectif est de faire connaître les villages marginaliés»

Après le succès qu’ont connu la 1ère  et la 2ème édition de « Hold Hands», le projet social de l’association Horizons de Mohammedia signe son retour pour une 3e édition prévue du  31 Mars au 7 Avril 2017 au douar Targa Zagzat, province Demnate, région Azilal. Dans l’optique de venir en aide aux populations défavorisées, cette association a mis en place un projet social destiné aux  habitants des zones rurales marginalisées. Dans ce cadre, Al Bayane a joint Taha Ait Lamine,  Président de l’association Horizons, qui nous parle du rôle que joue cette association dans les  zones rurales marginalisées du Royaume.

Al Bayane : Parlez-nous  de l’association « Horizons », notamment du projet social « Hold Hands » pour ceux qui ne le connaissent pas?

Taha Ait Lamine : L’association Horizons est née en 2014 à Mohammédia. Plusieurs jeunes habitants de la ville se sont réunis et se sont mobilisés pour favoriser le changement, améliorer les choses, encourager le développement et l’éveil des consciences. L’association opère dans trois domaines différents : l’écologie, le social et le culturel. Ceci se fait grâce à trois actions principales : instaurer des pratiques écologiques pour une ville plus verte et durable ; promouvoir la culture comme levier pour le changement ; venir en aide aux personnes défavorisées.

Concernant l’action sociale «Hold Hands», elle vise à intégrer le milieu rural dans le processus de changement positif initié par l’association. Nous aimerions dupliquer l’intervention des membres d’Horizons dans différents villages du Royaume.

L’association fait-elle appel aux volontaires qui veulent participer à ces campagnes ou se limite-t-elle au nombre de membres déjà existant?

Pour les campagnes «Hold Hands», les volontaires nous aident généralement en amont. Nous essayons, à travers chacune de nos actions, d’encourager le bénévolat dans la ville de Mohammedia, de favoriser la participation des habitants à la mise en œuvre de nos projets associatifs. Dans le cadre de cette action sociale, les bénévoles nous aident à récolter et à trier les dons destinés au douar Targa Zagzat.

Quel type d’aide apportez-vous aux habitants des zones rurales marginalisées?

Selon les éditions et les villages visés, l’aide peut varier en fonction des besoins.

Généralement, nous venons en aide aux habitants à travers, dans un premier temps, des actions en lien avec l’éducation. Nous essayons de favoriser l’éducation dans ces endroits reculés en instaurant notamment de bonnes conditions de scolarisation pour les enfants. Pour exemple, nous installons des bibliothèques, fournissons des fournitures scolaires, animons des ateliers participatifs et éducatifs et réaménageons les écoles des douars.

Nous répondons aussi aux besoins primaires des habitants à travers la distribution de denrées alimentaires et de vêtements.

Nous mettons également en œuvre une démarche participative. Notre objectif est d’impliquer les habitants dans la prise de décisions et la recherche de solutions adaptées à leur situation, soit-elle en lien avec le logement, l’éducation, l’infrastructure ou la notoriété de leurs villages. L’objectif est de trouver avec les habitants l’ensemble des actions pouvant les aider à améliorer leurs conditions de vie et leur procurer une certaine autonomie.

Aussi, nous agissons pour initier les habitants aux pratiques écologiques et durables et à l’autosuffisance alimentaire. Bien que certains soient déjà dans cette optique, nous partageons avec eux de nouvelles techniques de permaculture et d’optimisation des ressources.

Enfin, notre action sociale vise aussi à soutenir les associations locales qui agissent dans les villages que nous ciblons. Nous tentons d’augmenter leur notoriété, de partager un modèle de gouvernance associative et de favoriser le partage de compétences.

D’où vient le financement de cette association ? Collectez-vous les fonds?

Le financement de l’association vient principalement des dons des particuliers. C’est grâce à eux que nous réussissons à mener à bien autant d’actions. Les membres quant à eux s’impliquent non seulement sur le terrain  mais parfois financièrement aussi. Ils ont déjà pris l’initiative de mettre la main à la poche pour atteindre nos objectifs et réussir à finaliser certaines actions.

Des levées de fonds ont déjà été organisées au sein des collèges et lycées de Mohammédia. Aussi, notre partenaire officiel, La Voie Express, ainsi que notre nouveau sponsor, la BMCE, nous aident actuellement financièrement pour la réalisation de notre action sociale «Hold Hands».

Enfin, la commune de Mohammedia nous a attribué l’an passé une subvention étatique. Nous tenons à remercier chaleureusement chaque organisation ou particulier qui nous a aidés financièrement et nous a permis de mettre en œuvre nos actions et d’aider, à notre tour, autrui.

Faites-vous des suivis après avoir apporté de l’aide à ces régions rurales marginalisées?

Oui, nous instaurons une certaine continuité dans l’échange avec les associations locales. Ils nous font ainsi part des avancements et de l’état des lieux suite à notre passage dans les villages. Des habitants, des professeurs, nous ont aussi conseillé quant aux prochains choix des villages et des écoles dans le besoin. De notre côté, suite à notre action sociale, nous remettons des attestations aux différents participants locaux.

Pour la 3e édition du projet «Hold Hands», vous avez choisi de venir en aide au Douar Targa Zagzat, province Demnate, région Azilal. Comment choisissez-vous vos destinations ?  Vos choix sont-ils basés sur des études ou sur la demande des habitants?

La 1ère édition «Hold Hands» a été organisée dans le cadre d’une démarche participative initiée par un membre de l’association dans le cadre de son projet de fin d’étude. Son objectif était de transformer son douar d’origine en village éco-touristique. C’est ainsi que nous avons décidé de débuter l’aventure «Hold Hands». En parallèle du projet d’étude, nous nous sommes démenés pour récolter le maximum de fonds afin d’aider les 80 familles du village à améliorer les dures conditions dans lesquelles ils vivent.

Concernant la 2nde édition, un professeur du village Ait Tametna,  région Azilal, où nous avions agi dans le cadre de la 1ère édition,  nous a envoyé un message sur notre page Facebook pour nous demander de l’aide pour l’installation d’une bibliothèque pour ses élèves.  Afin de nous rendre compte des besoins réels des élèves et plus généralement des habitants du douar Ait Tametna, nous avons décidé d’envoyer des éclaireurs pour réaliser une étude des besoins réels des habitants. Deux membres de l’association se sont donc déplacés directement au douar. A leur retour, ils ont partagé avec les autres membres leurs expériences et nous ont expliqué que la situation était plus précaire : il n’était plus question de mettre en place qu’une bibliothèque mais bien d’agir plus globalement sur l’école et le douar. Tous les membres se sont mobilisés à Mohammédia pour aider ce village et ce professeur qui nous a sollicités. Résultat : deux classes entièrement rénovées, une bibliothèque installée, un espace récréation mis en place avec, notamment un terrain de foot et des balançoires, une initiation des habitants aux pratiques écologiques, une association locale soutenue et enfin, une aide apportée à  80 familles grâce à la distribution de denrées alimentaires et de vêtements.

Pour ce qui est de la 3e édition, un professeur du village Ait Tametna nous a proposé et conseillé de venir en aide à un autre douar dans le besoin. La même démarche a donc été entreprise : des éclaireurs ont été envoyés au douar afin que nous puissions nous rendre compte des besoins des habitants.

Que comptez-vous apporter aux habitants de cette région?

L’objectif est d’aider les 168 familles qui résident dans le village Targa Zagzat. Nous allons distribuer des dons alimentaires, des vêtements et des fournitures scolaires, rénover 6 classes, une mosquée et un msid, contribuer au développement de l’association locale, comme nous  l’avons fait précédemment. Cette année, nous aimerions mettre en œuvre une nouvelle action : encourager les femmes du village à pratiquer des activités afin de répondre à leur besoin financier. Par exemple, nous avons besoin de tapis pour la mosquée. Au lieu de les acheter chez des particuliers, nous allons proposer aux femmes du village de les fabriquer elles-mêmes, en contrepartie, nous nous engageons, grâce à nos sponsors, à les rémunérer pour le travail et l’effort fourni.

Quel bilan faites-vous des deux premières éditions?

Les deux premières éditions «Hold Hands» font partie des expériences les plus enrichissantes de ma vie. C’est le cas pour bon nombre de participants. Elles ont permis des apports non seulement pour les villages où nous nous sommes rendus mais également pour nous-mêmes. «Hold Hands» c’est une expérience humaine inédite et inoubliable.

Suite aux retours que nous avons des professeurs, des membres des associations locales et des habitants, nous nous sommes rendu compte que nos actes ne sont pas vains. Nos aménagements sont toujours en place et les aides que nous avons apportées ont réellement aidé les habitants durant une certaine période. Une chose en particulier nous a touchés : le professeur du village Ait Tamatna qui nous avait contactés nous a assuré que suite à l’aire de jeux installée, plus d’élèves sont venus à l’école. Leur but premier était peut-être de profiter des loisirs mais combien même ? Cela les a aussi encouragés à rentrer dans les classes et à suivre les cours après s’être amusés sur le terrain de foot et sur les balançoires !

Les citoyens marocains doivent se rendre compte que ces villages marginalisés restent toujours dans le besoin. Il faut que des actions continues soient initiées. Des interventions de l’Etat ou une intervention à grande échelle est nécessaire afin de sortir ces habitants de la précarité. Nous faisons notre possible, selon nos moyens et notre humble expérience pour les aider, mais nous espérons sincèrement qu’une aide plus globale leur sera apportée. Notre objectif c’est aussi de faire connaitre ces villages et favoriser les réactions et les actions des particuliers et des services étatiques.

Omayma Khtib

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