Ouzbékistan : Décès du Président Islam Karimov…

Tard dans la soirée de ce vendredi 2 Septembre 2016, la télévision nationale de la République d’Ouzbékistan a annoncé, dans un communiqué, la mort du Président Islam Karimov à l’âge de 78 ans victime d’un Accident Vasculaire Cérébral alors que la veille plusieurs sites Internet montraient des images de pelleteuses et de femmes qui, à l’aide de balais, nettoyaient les abords du cimetière de la ville de Samarcande et que des communiqués annonçaient que l’état du vieux président ouzbèque était tantôt «stable» tantôt «critique» .

Dans un message adressé à la Nation le Premier Ministre Chavkat Mirzioïev déclare : «Notre peuple a subi une perte irréparable…La mort nous prive du fondateur de l’Etat ouzbek, du grand et cher fils de notre peuple (qui a) agit au nom du maintien de l’indépendance de l’Ouzbékistan».

Mais qui était Islam Karimov à la mort duquel les autorités de l’ex-République soviétique ont décrété trois jours de deuil national à compter de ce samedi ?

Islam Karimov, né à Samarcande le 30 Janvier 1938, est un ancien apparachik du régime soviétique qui a gravi un à un tous les échelons dans l’appareil de l’Etat et du Parti Communiste d’Union Soviétique. Ministre des Finances en 1983, sa carrière a fait l’objet d’un véritable coup de pouce sous Gorbatchev lorsqu’il l’a nommé vice-Premier ministre d’Ouzbékistan en 1986 puis  Premier Secrétaire du Parti Communiste Ouzbek en 1989 ; ce qui, à la chute de l’URSS, lui permettra de remporter haut la main (86%), en 1991, les premières élections présidentielles du pays.

Débuta alors un règne long de 27 années, exercé d’une main de fer, par un homme qui s’est posé en rempart contre l’islamisme radical et contre toute forme d’opposition. C’est ainsi  que le 13 mai 2005 à Andijan, quelques milliers de manifestants ont été chargés à la mitrailleuse par les forces de sécurité sans qu’à ce jour, et plus de dix années après les faits, le nombre de tués et de blessés ne soit connu et bien qu’Amnesty International ait déclaré dans son rapport du 5 Janvier 2016  : «Malgré nos nombreux appels en faveur d’une enquête indépendante, les autorités ouzbèkes continuent d’affirmer que la question est close».

Et malgré le fait que les organisations de défense des droits humains aient dénombré en 2015 plus de 12.000 prisonniers politiques incarcérés sous de vagues accusations «d’extrémisme» ou «d’activités anti-constitutionnelles», l’Union Européenne a levé en 2009 les sanctions qu’elle avait prise contre le pays à la suite des évènements d’Andijan et les Etats-Unis maintiennent de bonnes relations avec ce pays voisin de l’Afghanistan.

Pour faire bonne figure, le défunt Président avait offert son aide pour l’approvisionnement des troupes de l’OTAN et des Etats-Unis engagées dans la lutte contre les Talibans ; ce qui lui valut  d’être reçu en Janvier 2011 par José Manuel Barroso, Président de la Commission Européenne et Anders Rasmussen Secrétaire Général de l’OTAN.

Désormais sûr de lui, il est même parvenu à se défaire de la main-mise de Moscou  en refusant d’adhérer à l’Union Economique Eurasiatique si chère à Poutine qui fut quand même  le premier à  déplorer sa disparition.

La Fédération de Russie a alors  dépêché ce samedi son Premier Ministre Dimitri Medvedev pour assister aux funérailles du Président Ouzbek alors que le Kazakhstan voisin a été représenté par son Premier Ministre Karim Masimov et que le Tadjikistan était représenté par le Président Emomali Rakhmon issu du même sérail post-soviétique que le défunt.

Il est à signaler qu’en attendant la tenue d’élections dans un délai de trois mois l’intérim de la Présidence de la République d’Ouzbékistan sera, comme le veut la Constitution du pays, assuré par le Président du Sénat Nigmatilla Iouldachev.

Pour le moment, les trois hauts responsables ouzbèks qui pourraient chercher à prendre sa succession sont le Premier Ministre Chavkat Mirzioïev qui dirige la commission chargée d’organiser les funérailles, le Ministre des Finances Roustam Azimov et le puissant chef de la sécurité Roustam Inoyatov.

Nabil El Bousaadi

Top