Un combat de toute la société

Les événements douloureux survenus à Marrakech et Agadir la semaine dernière nous interpellent et doivent nous alerter que la violence est en train de s’infiltrer sournoisement dans notre tissu sociétal, touchant des couches sociales qui sont censées en être prémunies, comme les étudiants.

Une violence qui pourra, si rien n’est fait, finir, petit à petit, par s’installer dans notre quotidien et mettre à mal notre sécurité et la cohésion de notre société, et, in fine, mettre en danger la paix civile dans notre pays.

Ce qui s’est produit récemment à Agadir et Marrakech est très grave et d’une importante charge symbolique, car des heurts violents entre étudiants de mouvances rivales ont fait deux morts, un dans chacune des deux villes.

Certes, ces deux cas extrêmes et dramatiques restent isolés, et le Maroc n’est nullement un champ de bataille où des hordes s’affrontent violement tous les jours ; les marocains étant, dans leur écrasante majorité, plutôt pacifiques.

Mais la gravité de ces événements doit constituer une sorte de sonnette d’alarme; car d’aucuns ont essayé d’en minimiser la gravité au prétexte qu’ils ont eu lieu en dehors de l’enceinte universitaire (à l’entrée d’une cité universitaire et sur la route qui mène à un établissement universitaire) et que les deux victimes n’étaient pas des étudiants.

Mais les faits avérés font apparaître que des mouvances estudiantines rivales en sont arrivées aux mains pour régler des divergences politiques et idéologiques, qui devaient, en bonne logique, l’être par le dialogue et le débat démocratique. Et fait encore plus grave, il a été fait appel à des personnes externes à l’Université pour prêter main forte à l’une ou l’autre mouvance. En arriver à ce niveau de violence est symptomatique d’une dérive qu’il faut juguler au plus vite, car tel un poison, la violence, si elle ne reçoit pas l’antidote adéquat et au bon moment,peut finir par ronger tout le corps social.

L’Etat et la société tout entière ne doivent plus se permettre aucune permissivité à l’égard des comportements violents, aussi isolés soient-ils ; et doivent surtout s’attaquer au terreau qui les favorise.

Le plus souvent, avant d’être physique, la violence est tout d’abord verbale et symbolique et sous-tendue par la culture de la haine, qui a atteint, dans notre pays, quasiment toutes les sphères y compris celles censés être des espaces de dialogue et de tolérance comme les médias, les instances élues, les associations, les partis politiques, …Et il n’échappe à personne l’ampleur que prend de plus en plus la violence physique dans la famille, la rue, les transports publics, les stades, les manifestations publiques, …

Face à cela, et en dehors des mesures coercitives et sécuritaires que l’on peut mettre en œuvre, la réponse la plus efficace à long terme réside dans la promotion de la culture démocratique, de l’égalité, de la tolérance, du rejet de tout fanatisme, de l’acceptation de la pluralité et la diversité, du respect de la prépondérance du point de vue majoritaire sans écraser les minorités,…

C’est une longue et progressive construction qui doit s’inscrire dans une dynamique mettant à contribution la société tout entière : la famille, l’école, les médias, les partis politiques, la société civile, les intellectuels, les oulémas, les artistes,…

M’hammed Grine

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