V : Une transaction pêle-mêle et manœuvres suspectes à la bourse…

Samir : comment le Maroc en est arrivé là ?

Dans cette série d’articles, nous allons essayer, dans la mesure du possible, de tracer l’histoire d’un joyau industriel national qui a tant contribué au développement économique du pays, en l’occurrence la SAMIR.  Il faut dire que notre véritable souci n’est pas de distribuer des accusations gratuites, loin s’en faut, mais consiste à dévoiler les véritables causes qui ont été à l’origine d’une déconfiture historique. Notre analyse s’étendra également à lever le voile sur la fermeture de l’entreprise et son impact sur le marché des hydrocarbures, entre autres…

Parmi les grandes erreurs de la privatisation de la SAMIR, c’est que l’opération de la privatisation a été aux antipodes des conditions contenues dans le schéma des transferts. Autrement dit, l’opération s’est déroulée dans le flou le plus total. Pire encore, la cession de l’entreprise n’a pas concerné uniquement la raffinerie, mais s’est étendue également à l’ensemble du patrimoine financier (hôtel, lots de terrain…). Il s’agit pour plusieurs analystes d’une opération suspecte ou plus moins irréfléchie.  D’ailleurs, lors d’un entretien accordé à un média de la place, feu Abraham Serfaty a déclaré en substance que  «le contrat signé avec le repreneur, Corral, a été moins contraignant que les termes contenus initialement dans l’appel d’offres.  »

D’ailleurs, c’est le même constat fait par le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole (FNSRMP). Cela étant, les dispositions du contrat de vente ont été en déphasage par rapport au cahier des charges élaboré par les départements concernés à savoir la Commission des transferts et le ministère de la privatisation, précise le  FNSRMP. Un tel constat suscite des interrogations sur le véritable rôle du ministère de l’énergie et des mines dans l’élaboration du cahier des charges. Il faut dire, selon la même source, que  le contrat de cession a donné des privilèges au nouveau preneur de la SAMIR. Des privilèges qui vont à l’encontre de l’esprit de la loi. En termes plus clairs, le contrat de gré à gré  n’a point respecté les clauses contenues dans les cahiers des charges.  Abondant dans le même ordre d’idées,  FNSRMP évoque même le cas de manipulation boursière.  En fait, le dit rapport note que l’introduction de la SAMIR en bourse en mars 1996 fut une opération historique (1,25MMDH)  et coïncidait avec la mise en place d’un système de cotation électronique.

Les gestionnaires de la bourse ont arrêté une décision qui stipule que seulement les titres les plus liquides sont soumis à ce système alors que les titres moins liquides sont gérés conformément au principe de la vente à la criée. Selon les analystes financiers, le titre de la Samir était le titre le plus liquide. Un titre liquide signifie « il peut être acheté ou vendu rapidement sans que cela n’ait d’impacts majeurs sur son prix. » Mais, il s’est avéré par la suite que les managers de la place financière ont en décidé autrement.  Le rapport du FNSRMP explique que  «  l’algorithme du système de cotation électronique a fixé des cours du titre La Samir à la baisse compte tenu de l’état des carnets d’ordres, ce qui n’arrangeait point les affaires du ministre de la privatisation en exercice ».          

 Le document met, en outre,  l’accent sur le fait que « le titre La Samir a été sur décision politique et de façon administrative, avec la connivence de la Direction générale de la Bourse de Casablanca, retiré du système de cotation électronique et a été maintenu de nombreux mois en cotation « administrée » le temps que la transaction de gré à gré se fasse. »

Khalid Darfaf

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