Ramadan et santé
Ouardirhi Abdelaziz
Plus que six jours nous séparent du début du mois de Ramadan, dont la date est annoncée le dimanche 2 mars 2025. Si pour un jeune, adulte sain, le jeûne ne présente aucune difficulté, il en va autrement pour les patients qui souffrent de maladies chroniques, diabète, maladies cardio-vasculaires, insuffisance rénale, qui doivent suivre des traitements prescrits par leurs médecins en respectant des protocoles thérapeutiques stricts, dosages, horaires de prises des médicaments entre autres.
On comprend pourquoi de nombreuses personnes qui souffrent de maladies chroniques se posent plusieurs questions pour savoir si leur état de santé est compatible avec la pratique du jeûne de ce mois sacré.
Pour votre sécurité, votre bien, et afin d’éviter tout risque potentiel pour votre santé, en soumettant votre corps fragilisé par la maladie à un jeûne répété, l’idéal, la sagesse et le bon sens est de consulter votre médecin traitant avant le début du ramadan.
Le prophète Sidna Mohamed a dit ; « Jeûnez, vous acquerrez la santé ! » (Rapporté par Ibn Sounny, Abou Naïm et Hassan Elsiout). Le jeûne du mois de Ramadan est l’un des cinq piliers de l’islam.
C’est le mois de la révélation du saint Coran caractérisé par des prières, de dévotion, de la charité, de la solidarité, où chaque personne pratiquante, entretient une grande dimension spirituelle avec notre créateur. De ce constat, nous en sommes tous conscients et nous rendons grâce à Dieu pour tous ses bienfaits, et nous devons prendre soin de notre santé, de celle de nos enfants, de nos parents, grands-parents et des personnes souffrantes.
Ne pas s’exposer aux dangers
Cette année et selon toute vraisemblance, le premier jour du Ramadan correspondra au 2 mars 2025. Qui dit Ramadan, fait automatiquement référence au jeûne, qui naturellement signifie une abstinence, une interdiction de tout apport alimentaire et hydrique du lever au coucher du soleil. Ce qu’on oublie souvent de préciser, c’est que ces interdictions s’étendent également à toutes les prises médicamenteuses orales, particulièrement quand il s’agit de malades cardiaques, hypertendus, diabétiques, cancéreux, ou en cas d’insuffisance rénale chronique …Si les personnes bien portantes ne semblent pas à risque de présenter des complications durant ce jeûne, il en va autrement de celui qui est porteur d’une maladie chronique, qui ne veut rien entendre et qui tient à jeûner quel qu’en soit le prix .
Il s’agit dans la majorité des cas de personnes âgées, femmes enceintes, malades connus et suivis, qui devraient en toute bonne logique, et dès à présent consulter leurs médecins avant le début de Ramadan.
Ces personnes doivent comprendre qu’elles peuvent mettre leur santé en danger, en s’abstenant de manger, de s’hydrater, de prendre leurs médicaments. Dans bien des cas, on les retrouve au niveau des urgences ou services de réanimation, hospitalisées avec des complications dès la première semaine du mois de Ramadan.
Pourquoi consulter votre médecin traitant ?
Quand on est soucieux de sa santé ou de celle des membres de sa famille, on doit toujours anticiper, particulièrement quand on a une personne âgée diabétique qui vit avec nous sous le même toit. Celle-ci doit faire l’objet de toutes les attentions. C’est encore plus vrai quand il est question pour ces personnes de pratiquer le jeûne du mois de Ramadan. Eu égard à leur état de santé, à leur âge avancé, aux conditions physiques limitées, ces personnes ne jeûnent pas comme les autres, une situation qui est très mal vécue par ces dernières, qui éprouvent une honte, un mal-être lié à l’isolement social, familial du fait de ne pas jeûner convenablement.
On doit comprendre le dilemme que vivent ces personnes, qui sont tiraillées par l’ardent désir de pratiquer le jeûne de Ramadan comme le stipule le Coran, particulièrement une personne âgée pieuse. On ne badine pas avec le jeûne qui fait partie des 5 piliers de l’Islam, ce qui donne toute son importance au mois sacré de Ramadan. Et combien même cette pratique représentera un danger pour la santé ou est susceptible d’entrainer des complications, rien n’arrêtera celle ou celui qui désire par dessus tout pratiquer le jeûne de Ramadan.
Voir son médecin avant le début du Ramadan
Mais avec une approche sereine, claire, objective, convaincante, le médecin arrive toujours à faire changer d’avis les plus récalcitrants, en les amenant à consulter, à parler en toute confiance avec lui avant le Ramadan. Il s’agit donc pour le médecin d’agir avec tact, doigté, dextérité, pour permettre au patient de s’exprimer en toute confiance, et surtout de convaincre le malade que ce qui importe le plus, c’est avant tout sa santé, son bien-être et sa sécurité.
Cette consultation avant le jeûne du mois de Ramadan est très importante, car elle permet d’anticiper tout incident ou accident. Le médecin fera un examen clinique à la recherche d’une éventuelle complication, à savoir une hypertension artérielle, une atteinte rénale, une atteinte ophtalmique (rétinopathie). Pour la sécurité du patient, il demandera un bilan sanguin; une glycémie, une hémoglobine glyquée( glucose de 3 mois ), une créatinine ( fonction rénale ), l’objectif étant de déceler d’éventuelles complications et bien d’autres.
Apres les résultats de tous ces examens, le médecin pourra décider si son patient pourra jeuner ou non, et discutera aussi du traitement, du suivi glycémique, de l’observance thérapeutique.
Par la même occasion, le médecin donnera des conseils hygiéno-diététiques pour minimiser les risques liés au jeûne. Mais dans la pratique ce n’est jamais aussi facile.
Etre à l’écoute des malades
Tout au long de ma longue expérience au sein des hôpitaux, et à l’occasion de chaque mois sacré de Ramadan, j’ai toujours été frappé par la réaction, le comportement de certains malades très diminués physiquement et psychologiquement, qui se faisaient un point d’honneur pour pratiquer le jeûne, et ce malgré tout ce que leurs médecins traitants pouvaient leur dire.
Ne pas jeûner pour certains malades diabétiques équivaut à une sorte de reniement de la foi, de la religion. Par conséquent, ils se sentent exclus par leurs proches, amis. Sans parler des ragots et autres commérages.
L’islam ne dit pas cela : c’est la religion de la tolérance, du pardon, de la facilitation. Le coran est clair au sujet des personnes malades et celles dont les capacités physiques ne peuvent pas leur permettre de jeûner. Tous les ulémas sont unanimes pour dire que dès lors qu’une personne est malade, ou présente une faiblesse manifeste pouvant mettre en jeu sa vie, celle-ci est exempte. C’est pour toutes ces raisons, mais aussi à cause des conséquences néfastes qui peuvent en découler et où le pronostic vital peut être engagé pour certains diabétiques, qu’aujourd’hui, nombreux sont les praticiens spécialistes de la maladie diabétique, qui au lieu d’interdire le jeûne à leurs patients diabétiques préfèrent les accompagner tout au long de ce mois. C’est en partie ce qui justifie la nécessité d’intégrer le côté positif du jeûne dans le bien-être du patient, ainsi qu’à l’inverse, le mal-être.
Dans quels cas le ramadan est-il contre-indiqué ?
Les règles concernant la dispense du ramadan sont très clairement indiquées dans le Coran :
La Sourate II verset 183 précise
« Si le jeûne peut altérer de manière significative la santé du jeûneur ou lorsque la personne est malade, l’Islam l’exempte du jeûne.»
Sourate II, verset 185
« Allah cherche à vous faciliter l’accomplissement de la règle, il ne cherche pas à vous la rendre difficile. »
Pour toute personne présentant une maladie chronique, qui est sous traitement médical, et dont l’état de santé est affaibli, le jeûne de ce mois sacré peut altérer l’état de votre organisme, vous exposer à des complications. Il faut savoir raison garder et ne pas mettre en péril votre santé.
Notre conseil pour les malades diabétiques, les patients atteints d’hypertension ou d’asthme, d’insuffisance rénale ou hépatique, ainsi que les personnes fragiles, les femmes enceintes, les personnes âgées, qui tiennent à observer le jeûne de ce mois sacré de Ramadan , malgré tous les risques pour leur santé, de consulter leur médecin .