«L’intégration n’est pas facile au Canada»

Partie pour le Canada, l’actrice Khouloud Betioui confie y être allée pour rejoindre son mari franco-canadien et non pas, pour une carrière artistique. Pour elle, le Canada n’est pas un pays d’accès facile pour les artistes étrangers, puisque le domaine culturel y est très structuré et généralement, les artistes sont obligés de recommencer à zéro. Sans oublier qu’en tant qu’étranger, bien souvent, il y a des rôles à ne pas dépasser.

Al Bayane: Plusieurs artistes marocains dont vous faites partie ont choisi d’immigrer au Canada. Pourquoi ce pays ?

Khouloud Betioui: Au début, l’idée d’immigrer ne m’avait jamais traversé l’esprit. Certes, je voyageais ailleurs, mais ma culture est bien enracinée dans mon pays : le Maroc. Pourquoi le Canada alors ? Parce que tout simplement, je suis mariée à un Franco-canadien, et la période où je suis partie, j’étais enceinte. On a voulu que notre bébé naisse dans la famille et grandisse dans l’amour. Je suis partie pour le bien de mon enfant. Et pourtant, je n’ai jamais coupé les liens avec le Maroc. Car, souvent, je faisais des allers-retours.

Le Canada est-il  un eldorado pour les artistes venus du Maroc?

Non… je ne pense pas. Peut-être pour des jeunes qui ont 18 ou 20 ans, mais quelqu’un  qui  a  dépassé 30 ans, je ne crois pas qu’il puisse trouver facilement des opportunités pour y travailler. En effet, l’intégration n’est pas facile au Canada ; les Marocains habitués à l’accent français ont du mal avec l’accent québécois. Dans le domaine culturel, ils sont très structurés. D’ailleurs, pour contribuer à un projet, il y  a des étapes à suivre même si vous avez une grande expérience au Maroc. Au Canada, il faut recommencer à zéro. Souvent, il y a une étiquette qui vous sera collée, des rôles précis à ne pas dépasser. Sauf si la personne  est restée dans les choix qui ciblent la diaspora marocaine ou arabe qui est installée là-bas. La plupart fait le choix de partir pour leurs enfants parce que le Canada est un pays d’épanouissement pour les enfants… C’est ce qui  nous manque dans notre pays : l’éducation.

Vous êtes retournée au Maroc pour y vivre… Est-ce un retour aux sources?

C’est vrai. C’est un retour aux sources. Je voudrais que mon fils découvre le Maroc, son deuxième pays. Je veux que mon fils parle l’arabe, admire  nos traditions, nos mœurs.  Aujourd’hui, il partage le même attachement au Maroc comme celui qu’il a pour le Canada.

Dernièrement, une migration massive de plus de 40 artistes marocains aux Émirats arabes unis a suscité un débat sur la toile. Qu’en pensez de ce nouveau phénomène ?

C’est un gâchis ! Il n’y a aucun Etat dans le monde qui investit dans la formation des cadres et au final, les offre aussi facilement à un autre pays, sachant que cet Etat peut profiter davantage de ces compétences. En même temps, ces gens ont le droit de vivre dans de bonnes conditions. C’est tout à fait  légitime!

Propos recueillis par Mohamed Nait Youssef

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