En matière de mortalité maternelle et infantile, le Maroc fait quelques progrès. Grâce à la politique menée par le ministère de la santé depuis quelques années, la mortalité maternelle au Maroc, qui était de 112 décès maternels pour 100.000 naissances vivantes en 2010, vient d’enregistrer une baisse significative, passant à 72,6 décès maternels pour 100.000 naissances vivantes en 2018, soit une réduction de 35%.
Le taux de mortalité maternelle représente le nombre de femmes décédées pour 100.000 naissances vivantes, suite à une grossesse ou au cours des 42 jours qui suivent l’accouchement, à cause des complications survenues lors de la grossesse ou de l’accouchement.
La mortalité infantile détermine le nombre d’enfants qui meurent avant l’âge de douze mois, par rapport au nombre d’enfants qui survivent. Le taux de mortalité infantile permet de mettre en évidence les facteurs de risques en obstétrique et de pédiatrie, pour les diminuer au maximum.
Le drame de la mortalité maternelle demeure le même. Ce fléau frappe durement, surtout les pays en développement et particulièrement l’Afrique où les conditions socio-économiques, environnementales et sanitaires très précaires exposent la femme aux complications redoutables de la grossesse et de l’accouchement.
C’est ainsi que chaque jour, dans le monde, au moins 1600 femmes meurent de complications de la grossesse ou de l’accouchement, ce qui représente 585 000 décès de femmes chaque année. La majorité de ces décès (99%) survient dans les pays en développement et moins de 1% dans les pays développés.
Etat des lieux au Maroc
Selon les derniers chiffres présentés par le ministère de la santé, la mortalité maternelle au Maroc a enregistré une baisse de 35%, passant de 112 décès maternels pour 100.000 naissances vivantes en 2010 à 72,6 cas en 2018. Cette baisse concerne aussi bien le milieu urbain, que le milieu rural. Ce qui témoigne d’une nette amélioration de la prise en charge des femmes enceintes et de leur suivi par des professionnels de santé qualifiés.
S’agissant du taux de mortalité infantile, il a atteint 13,56 pour 1000 naissances vivantes en 2018, selon des chiffres du ministère de la Santé, soit une baisse de 38% en l’espace de sept ans. C’est un constat qui suscite une satisfaction méritée. Il démontre si besoin est que de grands efforts sont entrepris par tous les professionnels de santé, qui mettent tout en œuvre pour assurer et maintenir l’amélioration de l’état nutritionnel des enfants de moins de 5 ans et donc, de lutter efficacement contre la problématique de la perte de poids, dont la prévalence est passée de 9,3% en 2004 à 2,9% en 2018.
S’agissant de la mortalité infantile, il y a lieu de rappeler que les chiffres de la dernière enquête nationale sur la population et la santé familiale (ENPSF) sont très encourageants et suscitent de nombreux espoirs puisque le taux de mortalité infantile est passé de 84 décès en 1992 à 22,16 décès pour 1.000 naissances vivantes en 2018, soit une baisse de 74%.
Un personnel qualifié pour des soins efficaces
Les taux de mortalité maternelle et infantile sont deux indicateurs de performance d’un système ou d’une politique de santé.
Pour lutter efficacement contre la mortalité maternelle, réduire encore les taux à moins de 50 décès maternels pour 100.000 naissances vivantes et permettre à chaque femme enceinte de pouvoir bénéficier de la meilleure prise en charge possible , tout au long de sa grossesse , lors de son accouchement et pendant la durée du post – partum , il est à présent clair que des soins efficaces à l’accouchement, fournis par un personnel qualifié sont nécessaires pour éviter la majorité des décès maternels. Quand on parle de personnel de santé qualifié, on se réfère aux médecins ou au personnel obstétrical, c’est-à-dire les sages-femmes qui peuvent prendre en charge des accouchements normaux, ainsi que diagnostiquer, traiter ou référer des complications obstétricales.
En outre, pour permettre à toutes les femmes enceintes de pouvoir bénéficier des mêmes prestations indépendamment des moyens des unes et des autres , des conditions socio- économiques et du lieu de résidence, le ministère de la santé a mis en place toute une batterie de moyens de nature à permettre à toutes les femmes d’accoucher en toute sécurité et sérénité.
Parmi les différentes innovations et décisions, il y a lieu de citer :
- Instauration de la gratuité des soins obstétricaux et néonataux
2. Mise à niveau des maternités hospitalières
3. Amélioration de la disponibilité du sang et des médicaments obstétricaux
4. Elaboration des recommandations de bonnes pratiques relatives aux complications obstétricales
5. Médicalisation des consultations prénatales et post-partum
6. Instauration de la garde pour les sages-femmes
7. Acquisition d’ambulances équipées pour assurer le transfert médicalisé des femmes enceintes dans de bonnes conditions
8. Mise en place du SAMU obstétrical en milieu rural
9. Disponibilité d’un personnel qualifié (gynécologue – obstétricien, sage – femme, infirmière accoucheuse…)
10. Le renforcement des compétences (formation et formation continue…)
11. L’amélioration, la prévention et le dépistage des grossesses à risque, notamment par la mise en place d’unités mobiles
12. L’audit et la mise à niveau des structures d’accouchement
13. L’humanisation des structures d’accouchement
14 La mise en place d’un système de surveillance des décès maternels et néonatals et de suivi des actions
15. La mobilisation sociale, plaidoyer et partenariat autour de la maternité sans risque.
Un défi à relever
Pour le ministre de la santé Anas Doukkali, la mortalité maternelle et infantile est un défi à relever, et cette baisse importante du niveau des mortalités maternelles s’explique par les efforts du Maroc en matière de suivi de la grossesse, d’accouchement en milieu surveillé et d’amélioration de la qualité de prise en charge.
La lutte contre la mortalité maternelle ne saurait être du seul ressort du ministère de la santé , car les facteurs contribuant à la mortalité maternelle sont multiples et variés et très complexes, comme ils sont fortement ancrés dans notre société où l’on retrouve toutes les conditions qui contribuent à la mortalité maternelle (l’ignorance, l’analphabétisme, la pauvreté, le statut faible des femmes, l’automédication et le traitement traditionnel, les avortements clandestins, les croyances et les tabous, les travaux pénibles que font les femmes au niveau des champs, les accouchements à domicile sans hygiène ni asepsie, forte fécondité…); au niveau environnemental (enclavement de certaines habitations, l’impraticabilité des routes surtout en hiver , manque de moyen logistique, manque de moyen de communication)…
La mortalité maternelle dépend donc d’une variété de facteurs aussi bien économiques, politiques et sanitaires que sociaux, culturels qui mettent tous en danger la vie des femmes lors de l’accouchement, surtout en milieu rural quand l’accouchement se déroule loin d’une formation sanitaire. C’est à ce niveau que de grands efforts doivent être déployés.
Abdelaziz Ouardirhi