Macron de retour sur le terrain pour son « plan eau »

Accueilli par des manifestants

Emmanuel Macron présente jeudi dans les Hautes-Alpes un plan très attendu destiné à améliorer la gestion de l’eau, ressource menacée par le réchauffement climatique, assurant que la crise sur les retraites ne signifie pas que « tout doit s’arrêter ».
« Il y a 200 manifestants: est-ce que ça veut pour autant dire que la République doit s’arrêter ? La réponse est non », a déclaré le chef de l’État aux journalistes à son arrivée sur les rives du lac de Serre-Ponçon.
Parmi ces manifestants, scandant « Macron démission », « Macron fumier, on va te composter » et agitant des drapeaux de la CGT et de la Confédération paysanne, encadrés par un cordon de gendarmes, deux ont été interpellés avant même l’arrivée du président.
« Il détourne l’attention, il sait très bien le faire, des vrais sujets », estime Julie, une manifestante de 40 ans venue de la commune voisine de Guillestre. « Le problème de l’eau c’est étrange de venir le traiter ici, près des stations de montagne, avec le problème des canons à neige. »
La contestation « ne m’empêche pas d’aller à la rencontre des Français », a tranché Emmanuel Macron qui n’est quasiment pas déplacé de Paris depuis la présentation en janvier de la réforme phare de son second quinquennat, qui prévoit le recul à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite.
Lors d’une de ses dernières sorties, le 25 février, au Salon de l’Agriculture, il avait appelé à un « plan de sobriété » sur l’eau, comme celui pour l’énergie.
L’hiver a été particulièrement sec avec un record de 32 jours sans pluie, ce qui n’a pas permis de reconstituer les nappes phréatiques, pour 80% en-dessous des normales au 1er mars.
Dans le décor du plus grand réservoir d’eau douce d’Europe de l’Ouest, Emmanuel Macron doit dérouler une cinquantaine de mesures pour réduire les gaspillages et mieux utiliser l’eau.
Ce plan devait initialement être présenté par la Première ministre Élisabeth Borne. Mais le président, qui a fait de l’écologie, l’école et la santé ses prochaines priorités pour tenter de sortir de la crise des retraites, lui a finalement volé la vedette avec un déplacement annoncé au dernier moment.
Ces annonces interviennent cinq jours après la manifestation contre la « méga-bassine » de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), ponctuée d’images d’affrontement d’une extrême violence entre militants et forces de l’ordre.
Des milliers de gens étaient « simplement venus faire la guerre », a commenté M. Macron jeudi, condamnant une « violence inacceptable ».
Les experts climat anticipent une diminution de 10% à 40% de la ressource en eau, jusqu’ici abondante dans le climat tempéré de la France, dans les prochaines décennies.
« Il y a une tension très forte sur la ressource en eau aujourd’hui », a martelé jeudi sur BFM Business Aurélie Colas, déléguée générale de la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau.
Selon elle, le secteur aurait besoin « sur cinq ans de 15 milliards d’euros supplémentaires », afin de s’adapter au dérèglement climatique.
Le plan du gouvernement vise d’abord à « préparer l’été prochain », qui pourrait être « difficile si la situation météorologique ne s’améliore pas », indique la présidence. Mais il prévoit aussi des « transformations en profondeur pour construire des infrastructures adaptées » à l’horizon 2030.
« Tous les secteurs – industrie, agriculture, tourisme et loisirs, collectivités, particuliers, etc. – seront mobilisés car c’est bien l’ensemble des Français qu’il faut engager pour faire entrer notre politique de l’eau dans une nouvelle ère », souligne l’Élysée.
L’un des volets les plus scrutés concernera l’agriculture, première consommatrice d’eau via l’irrigation (plus de 2 milliards de m3), pratiquée seulement sur 7% des surfaces cultivées mais le plus souvent en été, quand la ressource est rare.
Les tentatives de conserver l’eau hivernale dans des retenues artificielles braquent des écologistes et une partie du monde agricole, qui dénoncent un « accaparement » d’un « bien commun ».
Outre des solutions de stockage accrues, le gouvernement planche sur le développement de cultures plus résistantes à la sécheresse.
Autre piste, pour l’agriculture comme pour les terrains de sport ou la chasse d’eau: la réutilisation des eaux usées, actuellement pratiquée pour moins de 1% des volumes en France contre 8% en Italie, 14% en Espagne et 85% en Israël.
Le plan devrait aussi annoncer des financements pour mieux lutter « contre les gaspillages ». « Actuellement, environ 1 litre d’eau potable sur 5 part dans les fuites », et même un litre sur deux dans certains territoires, qui n’ont pas les moyens de réparer des infrastructures antiques, selon l’exécutif.

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