Désobéissance civile en Birmanie

Attendons pour voir….

A l’aube du 1er Février 2021, l’armée birmane a brutalement mis fin à la fragile transition démocratique qu’avait connu le pays en instaurant un état d’urgence d’une année et en assignant à résidence Aung San Suu Kyi, la cheffe du gouvernement civil ainsi que le président Win Myint.

En réaction au putsch perpétré par l’armée, des automobilistes ont, dès le lendemain, investi les rues de Rangoon, la capitale économique du pays en klaxonnant sans interruption pendant que des piétons tapaient sur des casseroles en scandant à l’unisson «Vive Mère Suu !» après que cette dernière les ait exhorté, dans une lettre, à «ne pas accepter» ce coup d’Etat.

Mais quand, deux jours après ce complot unanimement condamné par la communauté internationale, un tribunal a ordonné la «détention provisoire» et jusqu’au 15 Février de la dirigeante birmane officiellement «pour avoir enfreint une loi sur les importations/exportations », des appels à la désobéissance civile ont immédiatement été lancés par les médecins et le personnel de la santé qui, en arborant des rubans rouge – la couleur de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND), le parti d’Aung San Suu Kyi – ont pris la tête d’un vaste mouvement de contestation.

Dénonçant le fait que l’armée ait contesté les résultats des élections législatives de Novembre dernier remportées haut la main par la LND, Aung San Min, le responsable d’un hôpital de la région de Magway (Centre du pays) a déclaré à l’AFP : «Nous obéirons uniquement au gouvernement élu démocratiquement». Pendant ce temps-là, des membres du personnel médical de l’hôpital général de Yangon se sont réunis devant l’établissement en faisant ce salut à trois doigts, qui fut adopté comme geste de résistance par les militants pro-démocratie de Thaïlande et de Hong Kong.

Même les réseaux sociaux ont été de la partie lorsqu’un groupe de 160.000 abonnés, se faisant appeler «Mouvement de désobéissance civile», a immédiatement fait son apparition sur Facebook en brandissant les slogans disant « Honte à l’armée » ou encore «Les militaires sont des voleurs».

Mais, en considérant qu’en dépit du concert de condamnations qu’il a déclenché à l’international, son coup d’état était «inévitable», le général Min Aung Hlaing, qui, avec l’aide d’une poignée de généraux, détient, désormais, tous les pouvoirs, a lancé un avertissement mettant en garde contre tout discours ou message qui pourrait «encourager des émeutes ou une situation instable».

La réponse de la nouvelle administration américaine ne s’est pas fait attendre et, dès mardi, cette dernière a déclaré, dans un communiqué, être parvenue à la conclusion qu’Aung San Suu Kyi  et l’ex-président de la République Win Myint «avaient été déposés par un coup d’Etat militaire».

Aussi, en considérant que cette décision «bloque l’aide directe de Washington à l’Etat birman», l’administration de Joe Biden, dont c’est le premier grand test international, a haussé le ton et menacé d’imposer de nouvelles sanctions contre la Birmanie quand bien même son acte reste purement symbolique dans la mesure où l’armée birmane est déjà sous le coup de sanctions depuis les exactions menées par ses soldats, en 2017, contre la minorité musulmane des Rohingyas qui avait été qualifiées de «génocide» par des enquêteurs de l’ONU.

Et si, les ministres des Affaires étrangères du G7 se sont dit «profondément préoccupés» par les évènements qui ont eu lieu en Birmanie et que le Fonds monétaire international est «très soucieux» de l’impact qu’ils pourraient avoir sur l’économie d’un pays déjà frappé de plein fouet par la pandémie du coronavirus (plus de 140.000 contaminations et 3.100 décès), la réunion de mardi du Conseil de Sécurité de l’ONU est restée sans suite dès lors que Pékin qui reste le principal soutien de la Birmanie peut faire jouer son droit de véto.

De quoi donc demain sera-t-il fait en Birmanie ? Faudra-t-il s’attendre à un retour à la case départ après une petite éclaircie sur la voie de la démocratie ? Tout porte à le croire mais attendons pour voir….

Nabil El Bousaadi

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