Rien ne va plus selon le Haut-commissariat au plan.En plus du retard des pluies, l’inquiétude est aussi alimentée par la faible croissance du secteur non agricole.
La croissance de l’économie marocaine sera seulement de 1,3% en 2016 indique l’institution statistique marocaine. «Cette année sera difficile. C’est une évidence !» C’est ce qu’a annoncé Ahmed Lahlimi Alami, Haut-commissaire au plan le mercredi 27 janvier, à Casablanca, lors d’une conférence de presse présentant l’analyse de la situation macro-économique nationale en 2015 et les perspectives de son évolution en 2016.
Ce faible niveau de croissance serait la conséquence du repli de l’activité agricole à 12,7%, rejoignant ainsi celui des campagnes agricoles des années sèches. D’où le message d’alerte de Lahlimi adressé au gouvernement Benkirane, en général, et au ministre de l’Agriculture, Aziz Akhennouch, de façon particulière. «Nous appelons les responsables du Plan Maroc vert à aider le Maroc à surmonter les difficultés de la sécheresse» avance le haut-commissaire au Plan précisant que «pour relancer la production agricole et l’activité dans le monde rural au cours de cette année, voire celles qui la suivront, devrait susciter des inflexions sérieuses de la politique économique, financière et monétaire, autant qu’à la politique sociale et ce, quelle que soit la clémence des conditions climatiques à venir».
De plus, ce repli de l’activité agricole serait la conséquence d’un faible taux de croissance des activités non-agricoles, estimé à +2,2% pour 2016. «Ce taux de 2,2% est pour nous une croissance optimiste et il faut dire que cette amélioration n’est toutefois pas suffisante pour rassurer sur les perspectives de ces activités» déclare A. Lahlimi. Dans le détail, le secteur secondaire devrait connaitre une croissance de 2,1% sous l’effet du réajustement mécanique de la croissance des activités minières et de la reprise progressive du secteur du BTP et des industries de transformation. Le secteur tertiaire, quant à lui, progresserait de 2,2%.
Par ailleurs, A. Lahlimi a mis en avant trois points. En premier, le ralentissement notable de la demande intérieure en raison d’un effort d’investissement moins soutenu et d’une baisse de régime de la consommation. En effet, la persistance du ralentissement de la demande intérieure qui constitue la principale source de croissance des activités non agricoles. Et ce, malgré une maitrise, à des niveaux parmi les plus bas du monde, de l’inflation et une aisance des liquidités monétaires soutenue par une nette reconstitution des réserves de change du pays
Le deuxième point porte sur la demande extérieure. Celle-ci amorce, certes, une timide mais progressive contribution à la croissance. «Elle ne saurait, cependant, se départir de son caractère conjoncturel tant que notre offre exportable ne gagne en diversification, en croissance et en compétitivité. Ce qui renvoie à la problématique du ralentissement tendanciel de l’activité non-agricole et au faible effet d’entraînement, déjà noté, des industries émergentes sur leur environnement productif» explique le Haut-commissaire au plan
Le troisième point porte sur la baisse de l’investissement brut qui s’inscrirait dans le prolongement du trend baissier amorcé en 2012, avec 29,6% du PIB en 2016, au lieu de 34,7% en 2013.« Alors que le rôle de l’investissement s’érige, plus que jamais, en facteur stratégique, pour une amélioration durable de la croissance et de l’emploi, l’atténuation du déficit budgétaire se réalise par un relâchement de l’effort de l’investissement public sans que le capital privé ne prenne significativement le relais, ni qu’une politique monétaire, confortée par une situation internationale favorable, n’apporte sa souhaitable contribution à la redynamisation de l’activité non-agricole » fait savoir A. Lahlimi.
Enfin, l’une des importantes conséquences de ce ralentissement de l’économie est l’accroissement du chômage, dont le taux devrait passer à 10,2% en 2016 au lieu de 9,6% en 2015.
Kaoutar Khennach
Les déclarations phares de Lahlimi
Recevant la presse ce mercredi 27 janvier, le haut-commissaire au plan, Ahmed Lahlimi Alami, n’a pas hésité de transmettre plusieurs messages clés liés à la conjoncture économique du pays et à l’activité du HCP :
«Affronter 2016 s’impose à plus d’un titre, sachant que 2017 devra être encore plus difficile et ce, même si les conditions climatiques sont appropriées».
«Les conditions, telles qu’en augure le début de 2016, sont porteuses d’un contexte social où la problématique de la pauvreté et des inégalités sociales et territoriales devrait se poser avec une nouvelle acuité»
«C’est le moment de lancer une alerte et de revoir nos politiques économiques, financières, monétaires et sociales».
«Nous allons exposer bientôt une étude sur l’évolution du cadre macroéconomique pour évaluer la soutenabilité du modèle économique que nous vivons et de son financement».
«Nos écarts de prévisions sont plus fins et plus petits par rapport aux écarts de la banque mondiale, du fonds monétaires international (FMI) et du gouvernement».
«Nous sommes une institution pour beaucoup de milieux. Notre mission est de mettre la réalité en face de la population».
«La seule chose qui n’est pas dans nos attribution est de dire au gouvernement ce qu’il faut faire».