Pour Mohamed Chiguer, membre du Comité central du PPS, l’effort du gouvernement dans le domaine social est important, mais reste insuffisant. Et de souligner que la pauvreté a certes diminué, mais les inégalités n’ont cessé de s’aggraver. Le Maroc n’a de choix que de réhabiliter le concept de développement, insiste-t-il.
Al-Bayane : Quelle évaluation faites-vous du bilan du gouvernement concernant le volet social ?
-Mohammed Chiguer : L’effort du gouvernement dans le domaine social est important, mais insuffisant. Tant que l’Etat marocain ne place pas l’homme (le citoyen) au cœur de sa politique économique, la question sociale continuera à peser et risquerait même de mettre à mal la cohésion sociale. Des efforts ont été accomplis, mais les résultats obtenus sont en deçà des attentes en raison de l’importance du déficit social. Le domaine social compte une « armée » d’intervenants, mobilise des fonds non négligeables et pourtant, il ne s’améliore qu’à la marge. Ce domaine exige plus que jamais une révision profonde. La pauvreté a certes diminué, mais les inégalités n’ont cessé de s’aggraver. Le Maroc n’a de choix que de réhabiliter le concept de développement. La croissance, à elle seule, risque de rendre ce déficit insoutenable. Le Maroc a intérêt de reconsidérer sa perception des dépenses sociales pour les assimiler à l’investissement social. Il doit se rendre à l’évidence et admettre que la ressource humaine est la seule vraie richesse.
-Le Premier ministre a mis l’accent sur une approche globale pour améliorer le pouvoir d’achat, qu’est-ce que vous en pensez ?
L’approche globale s’impose. Seulement cette approche ne peut prendre toute sa signification que dans le cadre du processus de développement. Il est difficile de parler approche globale, alors que le pays se désindustrialise (la part de l’industrie dans le PIB est en baisse constante). Il est difficile de parler approche globale alors que l’Urbain se ruralise. Il est difficile de parler approche globale alors que l’enseignement est le moins qu’on puisse dire, dans une situation catastrophique. Il est difficile de parler approche globale sans le respect du droit…Il ne s’agit pas là d’une critique, mais d’un constat. Il serait indécent de ma part de faire supporter au Premier ministre la responsabilité de cette situation qui est en fait le résultat d’une accumulation
-La lutte contre le chômage a-t-elle sa place dans la politique du gouvernement ?
Il n’y a pas dans le monde un seul gouvernement qui ne cherche pas à lutter contre le chômage. Mais la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a. Je dois dire, au risque de me répéter, que sans une politique de développement basée sur l’industrialisation du pays, la généralisation du salariat et la promotion de la R&D, le chômage, mais aussi la faiblesse du pouvoir d’achat des Marocains resteraient une tare de l’économie marocaine.
-Dans ce sillage, et au-delà des propos du Premier ministre qu’en est- il du système de santé ?
A croire les professionnels, ce système n’est pas au point pour ne pas dire plus.
-Estimez-vous que les actions du gouvernement en matière de la réforme du système éducatif sont suffisantes ?
C’est là où le bât blesse. Nous avons un système à plusieurs vitesses. Le jour où les Marocains ne se bousculeront plus devant les écoles de la mission, ce jour là le gouvernement peut se targuer de sa politique éducative. L’école publique marocaine est en crise. L’une des manifestations de cette crise est l’état où se trouve actuellement l’ascenseur social. La mise à niveau de l’infrastructure éducative est nécessaire, mais insuffisante. Il faut garantir aux Marocains et Marocaines, tous les Marocains et à toutes les Marocaines, une formation de qualité. Il faut donner à tous les Marocains et à toutes les Marocaines la même chance pour faire valoir leurs potentialités et pour qu’ils puissent avoir droit au rêve. Nombreux sont les Marocains, notamment les plus jeunes, qui ne rêvent plus .Un peuple qui ne rêve pas s’expose à des risques majeurs.