20.000 emplois perdus et d’énormes difficultés de mise à niveau

Rabie Ouachi, président de la Fédération des associations des propriétaires des Hammams et Douches publiques

Par Fairouz EL Mouden

A l’instar de plusieurs secteurs d’activité  qui ont accusé de nombreux effets néfastes liés à la pandémie de la Covid-19 et qui continuent d’en subir encore après plus d’une année de crise sanitaire, le secteur des hammams et des douches publiques a été frappé de plein fouet. La fermeture des hammams et l’absence de mesures de soutien et d’aide aux personnels et employés de ce secteur ont ruiné la vie de nombreuses familles déjà socialement vulnérables. Selon Rabie Ouachi, président de la fédération des associations des propriétaires des hammams et douches publiques, le manque à gagner est  important et traduit une perte d’emplois de plus de 20.000 postes. Plus encore, la décision de réouverture des hammams n’a pas connu un engouement significatif  de la clientèle qui reste malgré tout, réticente face aux multiples incertitudes liées à la pandémie et aux discours émis par le département de la Santé. Les propos. 

AL Bayane: Après plus d’une année du déclenchement de la pandémie liée à la covid-19, quelle est aujourd’hui la situation dans le secteur et comment évaluez-vous le manque à gagner des Hammams traditionnels et douches publiques?

Rabie Ouaachi: La décision de confinement et de fermeture imposées par l’Etat marocain a touché pratiquement la quasi-totalité des secteurs économiques et sociaux. Celui des Hammams et douches publiques n’a pas échappé à cette décision que je qualifie de très dure, car elle a mis à mal tout un secteur et ruiné la vie d’une grande partie des employés des Hammams qui s’avèrent être vulnérables  et fragiles socialement…et ce malgré que ce secteur soit considéré comme un centre de remise en forme, de détente et d’hygiène et de renforcement de la santé musculaire et morale. Valeur aujourd’hui, je peux dire que les pertes sont énormes et délimitées. Le manque à gagner se creuse d’un jour à l’autre en l’absence de mesures de soutien du gouvernement à ce secteur social. Pis encore, le faible retour des clientes et clients n’est pas en mesure de résorber la situation. La reprise de l’activité peine toujours à trouver un rythme normal au quotidien qui permettrait au propriétaire du hammam de couvrir ses charges fixes et variables. Un indicateur de taille des effets de la pandémie de la Covid-19 est la perte de plus de 20.000 postes d’emplois, d’où l’appauvrissement d’une grande frange sociale.

Comment la réouverture des hammams à été suivie par la clientèle malgré les mesures restrictives liées à la pandémie? Comment gérez-vous ces conditions pour éviter une nouvelle fermeture ?

La décision de rouvrir les hammams et douches publiques prise par le gouvernement, il y a moins d’un mois, n’a pas été véritablement suivie par un engouement de la clientèle. D’ailleurs, ni la productivité, ni le rendement ne sont aujourd’hui au rendez-vous à cause de la réticence d’une bonne partie de la clientèle, conséquence de la durée assez longue de fermeture. Le manque à gagner financier et social est énorme. Après un mois passé depuis la réouverture des hammams, la situation ne permet  même pas aux propriétaires de couvrir les charges de réhabilitation et modernisation qui ont été jugées nécessaires après plus d’une année de cessation d’activité. Ainsi, la cadence de travail actuelle et la faible affluence ne permettent  ni le remboursement des dettes ni le roulement normal de l’activité pour pouvoir payer les salaires et les dettes accumulées depuis le mois de mars 2020.

Oui mais comment  se déroule la nouvelle organisation du travail pour justement  éviter des sanctions qui risquent de pénaliser les contrevenants? Quel est le coût réel d’une bonne remise en forme d’un hammam?

Le personnel du Hammam est tenu de respecter les normes de distanciation et d’hygiène imposées par le gouvernement. La capacité d’accueil est réduite à 50% par rapport à la conjoncture normale. Ainsi, les gérants et propriétaires de hammams restent mobilisés pour sensibiliser sur le respect des exigences sanitaires et de distanciation en vigueur. Nous avons également mis en place des commissions de suivi pour veiller sur les contrôles appropriés. Du coup, le cycle de productivité et de rendement est au ralenti depuis la décision de réouverture des hammams. Un rendement qui ne permet même pas de s’acquitter des charges courantes et encore moins de commencer des travaux de réhabilitation et d’équipement qui nécessitent un budget non négligeable estimé à près de 200.000 dirhams.   

La décision de l’Etat de venir en aide au secteur à été annoncée tardivement. Comment les choses se sont-elles déroulées depuis cette annonce? Quel est le nombre de personnes ayant bénéficié ou qui vont bénéficier de cette aide ?

Depuis l’annonce du  gouvernement de soutenir et venir en aide au secteur,  rien n’a été fait. Nous  attendons des réponses concertées et concrètes de l’Etat  pour faire sortir le secteur de sa léthargie. Aucune indemnité n’a été versée malgré la situation chaotique dans laquelle se trouve le personnel des hammams et autres douches publiques. Nous attendons toujours le soutien du gouvernement et une prise en charge  correcte et valable de tous pour éviter un véritable drame social. 

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