Le Centre d’études et de recherches Aziz Belal (CERAB) a reçu, lundi 20 juin à Rabat, dans le cadre de ses activités intellectuelles, le directeur de Dar Al Hadith Al Hassania, Ahmed Khamlichi. Cette rencontre s’inscrivant dans le cadre de l’échange intitulé «un homme et expérience» a été l’occasion pour braquer les projecteurs sur un parcours de l’une des figures de proue de la pensée islamique et de l’Ijtihad.
Cette initiative «un homme et expérience», souligne Mohammed Chiguer, président du CERAB, se veut un hommage aux intellectuels marocains de toutes sensibilités ayant investi dans ce pays. Cette rencontre, a-t-il ajouté, est un moment d’échange convivial et amical ramadanesque autour d’un parcours et d’une expérience aussi riche que variée qui a duré presque 40 ou 50 ans consacrée à la réflexion et à la contribution à un processus de réformes fondamentales, celle d’Ahmed Khamlichi. Ce dernier, poursuit-il, figure parmi les intellectuels ouverts ayant participé à l’enrichissement du paysage intellectuel national.
De son côté, Abdelatif Oualou, vice-président du centre, a fait savoir que le CERAB à travers ses activités œuvre pour le dialogue, l’échange fructueux mais aussi et surtout ouvre de nouvelles pistes de la pensée collective autour des grandes questions que vit le Maroc, et ce, en invitant des penseurs et des intellectuels à croiser les regards et les réflexions.
«C’est une rencontre avec une figure de proue dont le parcours a été consacré aux grandes questions sociétales», a-t-il précisé. Il va sans dire qu’Ahmed Khamlichi est considéré comme l’un des penseurs marocains qui ont élaboré des issues et solutions «modernes» à partir de la Charia islamique. Sa pensée est toujours d’actualité.
Intervenant à l’occasion, Khamlichi a affirmé que le problème des études en matière du fiqh et de la shari’a réside dans les références qui contiennent des erreurs, des défaillances. «On tourne souvent le regard vers ce passé sacralisé et on ne voit plus le présent. Notre problème dans les études du fiqh réside dans la considération de l’explication de la shari’a comme un constat juste et indiscutable», a-t-il dit. Et pourtant, il existe des zones d’ombre dans certains textes. Dans cet esprit, le savant a présenté un savoir alternatif adéquat aux exigences et attentes de la société actuelle. «J’ai essayé de présenter un savoir contraire à ce qui a été présenté et ce qui a déjà été dit, et ce, en retournant aux références, à leurs erreurs et défaillances sachant qu’il y a des références incitant à la violence et à l’intimidation», a-t-il ajouté. Pour lui, la lutte contre l’extrémisme exige une révision de dites références.
Le problème fondamental d’après Khamlichi réside dans nos bibliothèques, à savoir que des milliers de textes présentant des erreurs et des principes qui ne riment pas avec la société actuelle circulent toujours. Concernant Dar Al Hadith Al Hassania, Ahmed Khamlichi a souligné quelques avancées d el’établissement, entre autres l’intégration des sciences humaines, l’Histoire des religions et des cours de philosophie. «C’est déjà un pas important», estime-t-il, sachant que dans cette école, les étudiants doivent maitriser au moins deux langues étrangères.
Khamlichi a également mis la lumière sur de nombreux sujets et débats marquant notre société, en l’occurrence : l’héritage, le code de la famille, la Moudawana. «La question de l’héritage est un problème minutieux et complexe. On ne peut arriver à trouver des solutions qui satisfont tout le monde», a-t-il déclaré à l’occasion.
L’invité n’a pas manqué de rappeler que l’un des problèmes entravant l’évolution dans le domaine du fiqh et shari’a demeure l’inexistence d’un instrument efficient de transition d’un jugement à l’autre. «On n’a pas encore de moyen efficace et réel pour le changement, notamment dans un monde complexe, et qui fait face à plusieurs problèmes», a-t-il expliqué.
Mohamed Nait Youssef