Selon elle, ces événements resteront à tout jamais gravés dans l’inconscient des Marocains et encore plus chez les personnes qui ont perdu un ou plus des leurs. D’un autre côté, Bouayache estime que la lutte contre le terrorisme passe avant tout, par la sensibilisation des citoyens contre la haine et le racisme. Propos.
Al Bayane : En tant que présidente de l’Organisation Marocaine des Droits de l’Homme (OMDH), que pouvez-vous nous dire à propos des actions qu’entreprend votre association dans le soutien aux familles des victimes des attentats terroristes du 16 mai 2003 à Casablanca ?
A. Bouayache : Le soutien aux victimes de ces attentats meurtriers, se fait sur plusieurs volets. Nous oeuvrons pour le soutien moral des familles des victimes mais aussi ceux qui vivent depuis 7 ans avec des handicaps graves. L’OMDH travaille aussi dans la lutte contre le terrorisme et la promotion des droits de l’homme, à travers la sensibilisation aux dangers que représente le terrorisme de nos jours. Notre organisation a participé à la lecture et à la promotion du livre de Madame Khammal qui avait, rappelons le, perdu son fils et son mari, lors de ces événements atroces qu’avait connus la capitale économique du Royaume. Aussi l’OMDH a participé aux audiences et procès des inculpés dans ces événements.
– Certaines familles se disent profondément attristées et choquées par le fait que la ferveur et l’intérêt envers ces attentats ont commencé à diminuer pour ne pas dire s’estomper au fur et à mesure que le temps passe et que la date du 16 mai 2003 commence à s’éloigner chaque jour un peu plus. Que pouvez-vous nous dire à propos de cela ?
Je comprends parfaitement la douleur et les plaies encore ouvertes des familles des victimes et des blessés graves engendrés par ces attentats inoubliables. Les familles des victimes ont tout à fait le droit de reprocher à la société de ne pas faire ce qu’il faut pour les aider et faire en sorte de ne pas les oublier. L’OMDH s’inscrit également dans cette approche. Il faut sensibiliser davantage la société marocaine contre la haine, le racisme et les poussées « Takfirristes », qui ont justement donné lieu à ce genre d’atrocité.
– Khalid Naciri, ministre de la communication et porte parole du gouvernement avait affirmé dans la presse qu’il n’y aurait pas de dialogue en tout cas pas dans l’immédiat, avec les terroristes jugés dangereux. De votre côté, pensez-vous qu’ il faudrait mieux entrer dans un dialogue avec les « repentis » ou bien faut-il prendre leurs demandes avec des pincettes ?
Ce qui nous intéresse le plus, c’est plutôt le défit de l’Etat marocain. Il faut donner la possibilité à tout un chacun de s’exprimer librement. Je considère que la stratégie nationale doit s’inscrire plus dans la prévention ou ce qu’on peut appeler le stade «près endoctrinement». Il faut que l’Etat empêche la poussée intégriste à gagner du terrain et emporter avec elle un bon nombre de citoyens.
-Pensez-vous que la réforme du champ religieux au Maroc réussira à atténuer cette poussée ?
Je pense que telle qu’elle est faite, elle ne réussira pas à arranger les choses. Il faut que la réforme du champ religieux se fasse en profondeur. En d’autres termes, il faut chercher les vraies raisons qui poussent des jeunes à adhérer aux groupements terroristes «takfirist». Il faut guérir le mal de sa source.