Par Abdelhak Najib
«Ici sur cette terre africaine, tout a vu naissance. Ici sont nés le noir et le blanc. Tout part de cette dimension et tout converge vers une ouverture sur d’autres dimensions humaine, anthropologiques, ethnologiques, archéologiques et spirituelles.
Ici, en Afrique ce crée ce dialogue entre les sphères. Une musicalité chromatique qui va du bas vers le haut et inversement et qui embrasse toutes les variations de l’Être dans ce qu’il a d’unique et d’éternel». Ainsi parle Hassan Echaïr, auteur d’une œuvre magistrale dédié au monde et à l’Afrique comme origine et comme finalité infinie. Une œuvre monumentale présenté comme point d’orgue lors de la Première conférence africaine sur la réduction des risques en santé. «Il est question ici de la santé dans son sens le plus ouvert possible.
La santé du cœur, celle de l’esprit, celle de l’âme, celle du cerveau, celle des organes, celles de nos sinuosités artérielles, celle de notre sang humain, qui a la même couleur et qui est la résultante finale des trois étapes de la transmutation alchimique, passant de l’œuvre au noir, de l’oeuvre au blanc à l’œuvre au rouge, comme un pèlerinage intérieur pour faire du noir la source intarissable de la lumière. La lumière des sphères. La lumière dans son alignement intérieur et primal. La lumière comme vision du monde», nous dit le peintre.
Au cours de ce voyage qui ne prévoit aucune finitude, mais qui crée de multiples escales, le peintre vit ses différentes périodes picturales tel un pèlerinage, dans le alchimique plein, celui de l’homme qui avance en créant de toutes pièces un sentier, qui ne ressemble à aucun autre, et qui doit être, nécessairement, un chemin à réinventer au fur et à mesure qu’il crée cette profondeur qui se manifeste à nous quena le pèlerin s’allège, une peau après l’autre, couche après couche, strate après strate, pour, enfin, percevoir. Percer et voir de l’autre côté de nos dimensions multiples.
C’est ce qui nous donne cette intime intuition que Hassan Echaïr écrit en noir et blanc une certaine histoire du monde, le sien, et partant le nôtre, avec des variations infinies. Le peintre, avec ses cordes qui sont autant de silhouettes vivantes, écrit ce qui ne peut être exprimé en langage connu et admis. C’est parce que le peintre, l’artiste et surtout l’artisan cherche à faire porter une voix au cœur du silence, créant ainsi ce que l’on pourrait, avec émerveillement, nommer : une langue de l’âme. Zao Wou-Ki disait que : «Les gens croient que la peinture et l’écriture consistent à reproduire les formes et la ressemblance.
Non, le pinceau sert à sortir les choses du chaos». C’est exactement ce que tente de réaliser Hassan Echaïr qui est conscient du double sens derrière le chaos : à la fois éclatement et débris épars, mais également ordre incarné. Dans cette approche de l’art comme corollaire du chaos, le plasticien nous invite à repenser à cette phrase de Pablo Picasso : «Faut-il peindre ce qu’il y a sur un visage ? Ce qu’il y a dans un visage ? Ou ce qui se cache derrière un visage ?».