Avec un nouveau Président, une nouvelle ère pour la Gambie…

Dans notre précédente édition, mise sous presse avant la proclamation officielle du résultat des élections du 1er Décembre 2016 en Gambie et à l’issue du dépouillement intervenu dans les bureaux de vote de 17 localités, nous avions annoncé que la défaite du Président en place depuis 22 ans était de plus en plus imminente…

Maintenant, c’est officiel : le cinquième mandat tant attendu par Yahya Jammeh n’aura pas lieu ! En effet, celui qui au moment de glisser son bulletin dans l’urne ce 1er Décembre 2016, drapé dans son boubou blanc et tenant un Coran dans la main, ne doutait pas, un seul instant, de sa victoire et qui prévoyait même le « plus grand raz-de-marée de l’histoire de (ses) élections » a, bel et bien, raté le coche cette fois-ci puisqu’il a été évincé du pouvoir par Adama Barrow, le candidat soutenu par une très large coalition de l’opposition.

Ainsi, après vingt-deux années d’un règne sans partage, le tombeur de son grand oncle Dawda Jawara, reconduit à trois reprises à la tête de l’ex-colonie britannique devenue, depuis une année, République Islamique de Gambie, a été clairement désavoué par les urnes au profit d’Adama Barrow qui a obtenu 45,5% des suffrages exprimés alors que lui-même n’a pu recueillir que 36,6% des voix et que l’autre candidat Mama Kandeh est arrivé en troisième position après avoir été soutenu par 17,8 % des électeurs.

Une page a donc été tournée ce 1er Décembre 2016 par des gambiens qui manifestaient leur joie dans les rues de Banjul alors que le président Yahya Jammeh, dont tout le monde disait qu’il n’acceptera aucune autre issue, n’a en aucune manière remis en question sa défaite ; ce qui est tout à son honneur et qui a fait dire au Président de  Commission Electorale qu’il « est vraiment exceptionnel que quelqu’un qui a dirigé le pays aussi longtemps ait accepté sa défaite».

Mais comment expliquer une telle situation lorsqu’on sait que le Président sortant tenait le pays d’une main de fer ? Tout simplement parce que les gambiens qui ont participé massivement à l’opération électorale (65% des inscrits environ) et bravé, durant toute la campagne, la peur que leur inspirait l’appareil militaro-policier de l’Etat en réclamant que toute la lumière soit faite sur la mort en détention de l’opposant Solo Sandeng, se sont ralliés dans leur grande majorité à un homme perçu comme neuf avec la très forte envie de balayer le passé.

Mais qui est donc Adama Barrow ? Né en 1965 dans le chef lieu de Fouladou et titulaire d’un diplôme en Immobilier, Adama Barrow milite depuis 1996 dans les rangs du Parti Démocratique Unifié (UDP) dont il était le Trésorier. Il était parvenu à faire fortune lorsqu’il s’était lancé dans les affaires grâce à son Agence la Majum Real Estate. Ayant bénéficié, à l’issue d’un congrès qui avait réuni sept partis de l’opposition, des voix de 308 délégués sur les 487 mandatés par les sept régions administratives de la Gambie, Adama Barrow s’est donc présenté aux élections du 1er Décembre fort du soutien inconditionnel d’une très large coalition de l’opposition.

Ainsi, pour marquer le début d’une nouvelle ère, le troisième président de la Gambie indépendante, qui a fort à faire pour sortir le pays dans la misère dans laquelle il se débat, a mené des consultations, dès ce samedi 3 Décembre, avec les différents acteurs politiques du pays ainsi qu’avec les diplomate accrédités à Banjul et le représentant spécial du Secrétaire Général de l’O.N.U. en Afrique de l’Ouest et au Sahel.

Une page semble donc bel et bien tournée dans ce plus petit Etat de l’Afrique de l’Ouest avec ses 10.689 kilomètres carrés et une population de près de 1,8 million d’âmes dont 46% ont moins de 15 ans. Avec un PIB de 427 dollars, plus de 20% de la population qui vit avec moins d’1,25 dollars par jour et un taux d’alphabétisation n’excédant pas  50%, la Gambie reste parmi les pays les plus pauvres d’Afrique bien que son sous-sol renferme de la bauxite, du phosphate et même du pétrole qui ne sont pas exploitées. Le nouveau Président sera-t-il en mesure de faire profiter le pays et ses habitants de ces bienfaits de la nature ? Rien ne permet pour l’heure de ne pas formuler cet espoir et, s’il y parvient, alors il sera permis de dire qu’après le petit pas qu’a fait la Gambie vers la démocratie ce 1er Décembre 2016, les gambiens pourront envisager l’avenir avec sérénité.

Nabil Bousaadi

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