Chants «dissidents» face à la colonisation

Ces chants sont l’œuvre des « dissidents » amazighs qui ont résisté à la pénétration coloniale française au début du XXe siècle. Leur valeur documentaire est incontestable. Ils nous informent sur la progression de la machine de guerre coloniale dans le Maroc Central principalement. Les noms des héros, des saints et des lieux nous permettent de suivre l’évolution des opérations, appréhender l’identité des soldats engagés par la France, connaître le type d’armes utilisées.

Sidi Hmad Uhanu (1) hezza d ixf id

Is da iggan unna gher d idda Saligan (2) s ixamn

Sidi Hmad d’Ahanu réveille-toi donc,

Peut-il dormir celui dont les tentes sont menacées par les Sénégalais.

A yalmu n Tbuda (3) llig ittghima ccix Ali (4)

Idewweâ dik Iâqub (5) i tfunast

La plaine d’Almu n Tbuda où jadis le Cheikh Ali venait s’installer

Appartient désormais au juif Jacob qui y attache sa vache.

Gan irumin g zzawit (6) ahidus

Allig ur ufigh mani nekka ad nzur

Les Chrétiens ont dansé dans la Zawiya

Je n’ai pu trouver de passage pour faire mes dévotions au Saint.

Ufigh d tiâurma tusi d agelzim (7)

Da teqqaz abrid ini tt ugdrur

J’ai vu la jeunesse manier la pioche

Creusant la route dans un nuage de poussière

Unna ur mi ur tagh ixf itturets, ur tli lixra ahedda zeg digun

Ad d ikker wasif mellul ad ihery idammen n warraw n Saligan

Celui qui n’est pas touché à la tête est atteint ailleurs. La mort

Vous harcèlent, ô Chrétiens

Et bientôt l’Assif Melloul coulera grossi du sang des Sénégalais.

Tella ghuri taddwat izeryi tt id baba nw

Allig d turu lmehbula d ttyyara ur iqqimi ca n lâdda

J’ai un fusil que mon père m’a laissé

Mais depuis que sont apparus mitrailleuses et avions, nos moyens de défenses sont inefficaces.

Ttaâiyya  d nnfed mayd as iqddan

Ruran d Sidi Lmekki (8) gan ahebbas

Lebel et canon, qui peut s’opposer à eux

Ils permirent (aux Chrétiens) de faire de Sidi Lmekki un prisonnier.

Tettel d adu new a ttir (9) is i tezlid

Da y i ikkat ssbah iwwet tadeggwat

Tu fais mon malheur et me force à l’exil

O avion qui soir et matin me bombarde.

Iga d lbarud ghifi rray n tegniw

Ur da ttettagh nnâemt ula da neggan

Le fracas du bombardement produit sur moi l’effet d’un tonnerre

Je ne puis ni manger ni goûter le sommeil.

  • Marabout des Aït Sokhman (Zone d’Aghbala)
  • Il s’agit des régiments sénégalais engagés par la France BTS (Bataillons de tirailleurs sénégalais).
  • Plaine située près de Tizi n zzou dans la région des Aït Ihya de Tounfyt
  • Ancien ccix des Imtchimen, fraction de la tribu des Aït Ihya de Tounfiyt
  • Nom d’un cantinier juif du camp de Tizi n Zzou.
  • Zawiya de Sidi Yahya à Tounfit
  • Il s’agit de des travaux de corvée imposés par le colonisateur à la population.
  • De la Zawiya des Imhiwach (Zawiya Dilaiya), qui fut à la tête des tribus du Moyen Atlas
  • Métaphore de l’avion

Moha Moukhlis

Top