Gaza, le point de bascule ?

Par Mustapha Labraimi

Alors que la population de Gaza est soumise aux bombardements israéliens dans le but déclaré de l’exterminer toute entière, au vu et au su du monde ;à suivre ce qui se passe à travers la planète dans le présent ; à entendre ou voir les différentes interventions des uns et des autres pour exprimer leur vindicte, leur haine, leur mépris de la justice et leur dédain envers la paix, on est déconcerté par cette géopolitique de la régression.

L’aveuglement est-il total que la rage de tuer sans discernement a prévalue auprès de ceux dont la puissance et l’expansionnisme colonial n’ont pu leurs assurer la sérénité, et encore moins la paix.

La violence exercée depuis des années et des années, au quotidien envers les palestiniens et par des guerres qui n’ont jamais cessées, est-elle la solution ?

Fallait-il à l’Homo sapiens du vingt-et-unième siècle toute cette tragédie pour manifester sa bêtise, alors qu’il se targue de sa distinction, à plus d’un titre,sur l’ensemble des êtres vivants de son environnement ?

Gaza serait-elle le point de bascule ?

Une occasion malheureuse pour s’assurer de quelle conscience a-t-on de la réalité de notre environnement, de l’état de l’ensemble de ses composantes et des volontés qui les animent ? Une épreuve pour tester la compréhension de ce qui se passe à notre niveau personnel, au niveau de notre environnement local, régional et planétaire.

Les subjectivités individuelles alimentées par l’amalgame, la haine, la vendetta et la stupidité sont-elles devenues prépondérantes sur la recherche et le respect de ce dénominateur commun, une sorte du « plus petit commun multiple », proche du réel de l’Homo sapiens et qui constitue la base du vivre ensemble ?

Les échecs ressentis par l’Occident le poussent-il à se parjurer ? Cet occident dont les discours ne cessent de relever que la planète est un environnement partagé avec d’autres personnes humaines autant que soi ; mais qui, dans les faits, ne cesse de chercher son profit, sa suprématie et sa prééminence sur les autres pour les assujettir à sa domination.

Que reste-t-il des institutions internationales organisées pour que les angoisses de l’humanité soient dépassées, pour« préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances,à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites,à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international,à favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande » comme le stipule le préambule de la Charte de l’Organisation des Nations Unies ?

L’Homo sapiens s’est-il fourvoyé au point de créer les conditions de son malheur ? 

Qu’en est-ildu progrès technologique, de l’intelligence que l’on veut transmettre aux machines alors qu’elle nous fait défaut aux moments les plus cruciaux ? quelle utilité présente cette communication virtuelle, dans un monde devenu village par elle, si elle ne fait que répandre des images de destruction, si elle ravive la tension au sein de l’humanité au moment où celle-ci croyait atteindre sa suprématie ici-bas.

Ceux qui, derrière les atrocités de la guerre, croient détenir la maîtrise de la destinée du monde, se doivent de répondre à ces interrogations déterminantes.  Répondre, non par des discours usés par la réalité mais par des faits pour que l’on puisse « vivre en paix l’un avec l’autre dans un esprit de bon voisinage » dans ce siècle bousculé par tant d’inégalités et de désordres.

Ceux qui subissent le poids des évènements voulus et produits par l’Occident, eux qui souffrent encore de l’injustice et de l’exploitation, essayent d’assumer leur existence en se portant solidaires pour s’émanciper alors que l’apprentissage de la vie est devenu plus complexe eu égard à l’accélération du temps vécu et des contradictions profondes de la mondialisation.

Tant que l’espoir de vaincre « les problèmes internationaux (et locaux) d’ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire, en développant et en encourageant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinctions de race, de sexe, de langue ou de religion »,est fort, la géopolitique de la régression et les forces qui la développent ne peuvent vaincre. Ainsi est l’histoire de l’humanité. Gaza est le point de bascule.

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