Depuis quelques semaines, au moment où les incidents du Rif s’intensifient, les réactions, par-ci, par-là, prennent des tournures plutôt déconcertantes. Aussi bien dans les ambiances vivantes des citoyens qu’à travers leurs avances sur les réseaux sociaux, les impressions et les analyses donnent libre cours aux effets excessifs de l’émotion, au détriment des facultés de l’esprit.
Il est bien évident que la solidarité avec les manifestants en quête d’une vie meilleure n’est pas à contester. Cependant, on ne saurait non plus être dupe si la fronde est synonyme de trahison et d’imposture.
Il parait donc naturel qu’en plein moment de malaise, on ne se retienne sans doute plus, au point de verser dans l’extrémisme, sans s’en rendre peut-être compte. Cela peut se comprendre, en effet, dans certaines mesures. Mais, le changement n’a jamais été une formule toujours ascendante ou tout moins, linéaire. C’est à coup sûr, un processus sinueux et accidenté, en fonction, bien entendu, des circonstances et les rapports de force.
Certes, notre pays s’est engagé dans l’épreuve ardue de la démocratisation, d’une manière irréversible. Toutefois, cet engagement solennel, dicté par sa loi suprême et ses institutions, est truffé de velléités et de déboires, en cours de chemin, jonché de contraintes et de résistances. Rectifier toutes les anomalies qui peuvent affecter cette volonté commune de se ranger dans la cour des nations démocratiques, ne voudra jamais dire tout balancer en l’air, une fois qu’on se trouve face à tel ou tel écueil, comme c’est le cas aujourd’hui des émeutes d’Al Hoceima ou les incidents de Gdim Izik, il y a quelques années.
Dépasser les entraves se fait tout d’abord dans la sagesse et la sérénité, sans emportement ni précipitation. Ensuite, il semble qu’il n’est pas permis non plus de tout chambouler, dans la panique absolue, parcequ’un événement agitateur a surgi, en cours de route. On ne peut, du jour au lendemain, passer l’éponge sur tout ce qui ne va pas, d’une seule traite. Même si le présent Exécutif et l’actuel parlement peuvent paraitre, aux yeux de certains, limités et incompétents.
Ce sont bel et bien le fruit d’une expérience à laquelle ont contribué les composantes de la nation. Leur remplacement ne pourra se faire que par les voies institutionnelles reconnues par tous. Sinon, on tombera dans l’anarchie, la débandade et…l’instabilité. Ce que souhaiteraient, sans conteste, les récalcitrants internes de notre démocratie vulnérable et les ennemis externes de notre intégrité territoriale. On ne saurait jouer ce vilain jeu par des réflexions nihilistes et dévastatrices…