L’Algérie doit protéger les droits de l’homme dans les camps de Tindouf

Les discours populistes de diabolisation et de rejet de l’autre à la mode aux Etats unis, en Europe et dans leurs zones d’influence sont empruntés aux grands dictateurs sanguinaires du siècle dernier (Hitler, Mussolini, Franco, etc…) dont les politiques sont à l’origine de la 2ème guerre mondiale, a averti mercredi le Directeur général d’Amnesty International-Maroc, Mohamed Sektaoui.

Ces discours de rejet des «autres», représentant un véritable recul mondial des droits humains, ont éveillé les appétits des petites et grandes dictatures dans le monde comme c’est le cas en Israël, où l’extrême droite a donné libre cours à ses diatribes et actions, à l’heure de la mise en œuvre de la politique des    Etats unis de Donald Trump. Quant à la communauté internationale, elle réserve désormais une riposte timide aux atrocités massives commises partout dans le monde.

En annonçant la construction d’un mur entre les Etats unis et le Mexique, le nouveau président américain officialise en fait la division du monde entre ceux qui méritent un traitement humain et ceux qui méritent d’être maltraités, a expliqué Sektaoui, expliquant que c’est ce discours qui avait favorisé la montée du nazisme et du fascisme à la veille de la 2ème guerre mondiale.

S’inspirant des «succès» et de la victoire surprise aux élections du nouveau locataire de la maison blanche, d’autres dirigeants à travers le monde tentent eux aussi de séduire l’électorat par une manipulation pernicieuse des politiques identitaires, de nature à semer la division, en jetant la faute sur l’autre, «l’étranger», le réfugié, le migrant, a-t-il dit citant outre Donald Trump, Viktor Orbán, RecepTayyipErdoğan, Rodrigo Duterte… qui s’acharnent sur des groupes entiers de population, les désignent comme boucs émissaires et les déshumanisent.

Selon SalilShetty, secrétaire général d’Amnesty International, « la politique actuelle de diabolisation propage honteusement l’idée dangereuse selon laquelle certaines personnes sont moins humaines que d’autres, privant des groupes entiers de leur humanité et menaçant de libérer les instincts les plus sombres de l’être humain».

La situation au Maroc

Evoquant la situation au Maroc en 2016, Sektaoui a affirmé que des restrictions continuaient de peser sur la liberté d’expression, d’association et de réunion. Les autorités ont poursuivi des journalistes et dispersé par la force des manifestations. Les femmes faisaient l’objet de discriminations dans la législation et dans la pratique. La loi sanctionnait toujours pénalement les relations sexuelles consenties entre personnes de même sexe.

Les tribunaux ont prononcé des condamnations à mort mais aucune exécution n’a eu lieu.

En 2016, les autorités ont donc poursuivi des journalistes et des détracteurs du gouvernement qui n’avaient fait qu’exercer pacifiquement leur droit à la liberté d’expression.

Selon le rapport d’AI, les autorités ont bloqué en 2016 l’enregistrement officiel de plusieurs organisations de défense des droits humains, notamment des branches locales de l’Association marocaine des droits humains, de FreedomNow et de la Coordination maghrébine des organisations des droits humains.

Elles ont également empêché des groupes de défense des droits humains, entre autres associations, d’organiser des manifestations publiques et des réunions. Des journalistes, des défenseurs des droits humains et des militants étrangers ont été expulsés ou se sont vu refuser l’entrée sur le territoire. En juin, l’Institut International pour l’action non violente (NOVACT), une organisation non gouvernementale espagnole, a fermé son bureau au Maroc après que deux de ses membres se sont vu refuser l’entrée dans le pays. Amnesty International a poursuivi le dialogue avec les autorités en vue d’obtenir la levée des dernières restrictions qui entravaient ses propres activités de recherche au Maroc et au Sahara.

La liberté de réunion pacifique restait soumise à des restrictions. En janvier, la police a dispersé par la force des manifestations pacifiques d’enseignants stagiaires à Inezgane et dans d’autres villes.

Selon des témoins, les protestataires ont été frappés à coup de matraque et de bouclier et plus de 150 personnes ont été blessées.

En août, huit militants ont été condamnés, à l’issue d’un procès, à des peines allant de quatre mois à un an d’emprisonnement pour avoir participé à une manifestation pacifique à Sidi Ifni. Leurs déclarations de culpabilité ont été confirmées en appel, une peine de quatre mois d’emprisonnement a été réduite à trois mois.

Selon AI, les autorités n’ont encore rien fait pour mettre en oeuvre les principales recommandations émises par l’Instance équité et réconciliation, 10 ans après la publication par cet organe de son rapport sur les atteintes aux droits humains commises entre 1956 et 1999.

Evoquant la situation des droits des femmes, le rapport d’AI rappelle qu’en juillet 2016, la chambre basse du Parlement a adopté un projet de loi contre les violences faites aux femmes, qui était attendu de longue date. Ce texte était cependant toujours en cours d’examen devant la chambre haute à la fin de l’année. Il contenait des éléments positifs, notamment des mesures en vue de protéger les victimes de violence pendant la procédure judiciaire et par la suite, mais, sans renforcement notable, il n’assurerait pas aux femmes une véritable protection contre la violence et la discrimination.

Par ailleurs, l’avortement était toujours érigé en infraction pénale. Les autorités ont proposé des modifications prévoyant des exceptions en cas d’inceste ou de viol et pour certaines raisons médicales. Ces modifications prévoient toutefois l’obligation d’informer un tiers et d’obtenir son accord, ce qui risque de retarder l’accès à un avortement légal et de mettre en danger la santé des femmes enceintes. Ces modifications n’avaient pas été adoptées à la fin de l’année.

En juillet, le Parlement a adopté une loi réglementant le travail des employés de maison, des femmes et des filles pour la plupart. Ce texte fixait à 18 ans l’âge minimum des employés de maison, tout en prévoyant une période de transition de cinq ans durant laquelle des mineurs de 16 et 17 ans pourraient continuer à effectuer ce type de travail.

Abordant la situation dans les camps de Tindouf, le rapport d’AI souligne que le polisario n’a pris aucune mesure pour mettre fin à l’impunité dont bénéficiaient ceux qui étaient accusés d’avoir commis des atteintes aux droits humains durant les années 1970 et 1980 dans les camps qu’il contrôlait. Brahim Ghali a été élu secrétaire général du front après la mort de Mohamed Abdelaziz en mai. Dans le cas d’espèce c’est à l’Algérie qu’incombe la responsabilité de faire respecter et de protéger les droits de l’homme dans les camps de Tindouf situés en territoire algérien, a estimé le DG d’AI-Maroc. Le rapport 2016/17 d’AI sur la situation des droits humains dans le monde couvre 159 pays.

M’Barek Tafsi

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