Les voyous de l’économie

Récit national 2-3

Par: Sami Zine

Les foyers de la rente, revenu indu dans une économie de marché, sont de dimension inégale. Les foyers mineurs de la rente (exploitation de carrières, transport et commerce extérieur), validés par des autorisations et autres agréments, sont fortement décriés par la population qui appelle à répudier ces pratiques de favoritisme qui pérennisent la concurrence déloyale. Les foyers majeurs de la rente, que l’on soupçonne dans les domaines oligopolistiques de la finance, des télécommunications et de l’énergie, sources d’un enrichissement scandaleux au détriment des consommateurs, sont demeurés jusqu’à récemment à l’abri de toute véritable régulation.

Si les gouvernements successifs ont été incapables de redresser la situation dans les secteurs qu’ils encadrent, les autorités indépendantes de régulation semblent amorcer une évolution encourageante. En effet, l’Agence nationale de réglementation des télécommunications a émis un signal fort en condamnant en début d’année de façon spectaculaire le mastodonte des télécommunications «Ittissalat Al-Maghreb» à verser 3,3 milliards de dhs d’amende pour abus de position dominante. En infligeant à l’équipementier historique de la téléphonie cette sanction exemplaire, l’ANRT ouvre symboliquement la voie aux autres régulateurs, le Conseil national de la concurrence, Bank Al Maghrib et l’Autorité nationale de régulation de l’électricité, qui pour sortir de sa léthargie, qui de sa frilosité, qui encore de l’anonymat où il se trouve.

La conjoncture semble donc tout à fait propice au conseil national de la concurrence pour imprimer ses marques à son tour. Sa décision attendue dans l’affaire de l’entente sur les prix des hydrocarbures va constituer un moment historique pour signifier l’indépendance réelle de cette institution et sa capacité de sanctionner de façon exemplaire les pratiques anticoncurrentielles moralement condamnées par la population.

En la matière, les preuves directes comme les preuves indirectes sont recevables, et la sanction pécuniaire plafonnée à 10% du chiffre d’affaires des entités convaincues de  pratiques déloyales  applicable dans le cas d’espèce est incontournable. Si le conseil se range à cette appréciation, cette première décision produira un véritable tsunami aussi bien économique que politique puisque l’une des entités dans le collimateur appartient à un chef de parti, également  membre du gouvernement.

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