sur le champ culturel du pays et le rôle déterminant qu’a pu jouer dans le débat d’idées, une revue qui, devenue pôle d’attraction intellectuel, était parvenue à réunir autour d’elle des poètes, des peintres, des écrivains ainsi que des hommes politiquesnationaux et étrangers soucieux de faire accéder la culture marocaine à l’émancipation et à l’universalité.
Ce cinquantenaire a débuté par le vernissage,le 7 Avril 2016, d’œuvres signées par ces figures emblématiques de la peinture marocaine qui ont pour noms Mohamed Ataalah, Farid Belkahia, Saâd Ben Cheffaj, Mohamed Bennani, Mohamed Chebaâ, Ahmed Charkaoui, Jilali Gharbaoui, Mohamed Hamidi et Mohamed Melehi et qui, dans l’expérience de la Revue «Souffles», ont été «soit des acteurs de premier plan soit des compagnons de route».
Les journées des 8 et 9 Avril ont été, quant à elles, consacrées à un colloque intitulé «Retours à Souffles, Retours de Souffles» durant lequel des figures marquantes de la vie de la Revue ainsi qu’une multitude d’universitaires et d’intellectuels du Maghreb, d’Europe et d’Amérique ont parlé de leurs rapports avec cette revue, des idées de progrès qu’elle a véhiculées et du message qu’elle a laissé aux générations futures.
A l’ouverture de la séance, des anciens de la revue ; à savoir, Abdellatif Laâbi, Mostafa Nissabouri, Mohamed Melehi et Tahar Benjelloun, qui les a rejoint un peu plus tard, ont, chacun, de son côté, évoqué leurs premiers pas dans une Revue dont l’existence serait inimaginable aujourd’hui alors que la problématique islamiste semblerait coloniser les pensées.
La parole fut alors donnée à Madame Zakya Daoud qui a rappelé que les revues «Souffles» et «Lamalif»,qui ont vu le jour à peu près au même moment dans un Maroc qui venait de vivre une période particulièrement tumultueuse, dure, intense et politiquement éprouvante marquée notamment par les évènements qu’a connu la ville de Casablanca en Mars 1965 puis,peu de temps après, par la disparition du leader tiers-mondiste Mehdi Benbarka, peuvent être assimilées à un acte de résistance qui s’est déployé avec force, rage et énergie à un moment où, au sortir du Protectorat, la culture ambiante,au Maroc, était plutôt dominée pour ne pas dire encore réduite au folklore.
De leur côté, Monsieur Charles Bonn, Professeur à l’Université Lyon 2, considère que la Revue «Souffles» signeune rupture avec le régime en place et avec le néo-impérialisme mondial alors que Monsieur Mohamed Berrada, rappelle, pour sa part, que la Revue «Souffles» qui a vu le jour dans un contexte mondial en effervescence incarnait un projet d’avenirde la littérature marocaine mais déplore, néanmoins, que 60 ans après l’indépendance cette même culture marocaine ne soit plus qu’une pseudo-culture intégriste, passéiste et sclérosée où serait absente toute notion de modernité sociétale et qui ne chercherait pas le changement sur terre lui préférant les promesses du ciel.
Intervenant, Monsieur Guy Dugas, Professeur de Littérature comparée à l’Université Paul Valéry de Montpellier a, dans l’étude comparative qu’il a faite entre ces deux revues francophones des années soixante que furent «Souffles» au Maroc et «Parti-Pris» au Canada, rappelé que dans les deux cas, ce n’est pas l’ idéologie qui a fait les revues mais que ce sont les revues qui ont mené à l’idéologie.
Prenant la parole, Monsieur Khalid Zekri, critique littéraire et professeur à l’Université Moulay Ismail à Meknès a rappelé que d’une Revue poétique et littéraire la revue «Souffles» s’est rapidement transformée en une revue purement politique et ce, dans une période dominée par ce qu’il était convenue d’appeler « guerre froide » mais qui, dans les faits, était encore plus meurtrière qu’une guerre ouverte et déclarée.
L’orateur n’a pas manqué, non plus, de déplorer le fait que contrairement aux années Soixante du siècle dernier, l’époque présente n’est plus celle du Groupe.
Dans une intervention commune, Madame Naget Khadda et Monsieur Ismail Abdoun, Professeurs à l’Université d’Alger ont abordé l’impact de «Souffles» dans le champ intellectuel algérien dès lors qu’elle s’était ouverte à des écrivains algériens qui avaient rejeté la littérature «coloniale» ethnographique et rappelé son extrême exigence d’autonomie et de liberté.
L’après-midi de ce vendredi et la journée du samedi ont vu défiler plus d’une vingtaine d’autres intervenants qui ont apporté leurs témoignages.
Il est à signaler, enfin, pour ceux qui voudraient en savoir d’avantage sur cette commémoration, que les actes du colloque «Retour à Souffles, Retour de Souffles» seront publiés, incessamment à Casablanca, par les Editions du Sirocco.
«Souffles» célèbre son cinquantenaire
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