«Pour un pacte national pour la démocratie, le développement et la citoyenneté»

 Fondations et Centres d’études politiques lancent l’appel

Les 7 Fondations et centres d’études et de recherches (Fondation Allal El Fassi, Fondation Abderrahim Bouabid, Fondation Ali Yata, Fondation Abou Bakr El Kadiri, Centre Mohammed Bensaid Aït Ider, Centre Mohammed Hassan Ouazzani  et la Fondation Abdelhadi Boutaleb) ont rendu public un document commun intitulé « Pour un pacte national pour la démocratie, le développement et la citoyenneté », dont voici la version officielle.

Le but recherché par l’adoption d’un pacte national est de susciter une mobilisation collective qui œuvrerait à l’accomplissement d’une cause nationale supérieure ayant la priorité sur toute autre affaire. Ce choix suppose d’établir une relation entre citoyens et gouvernants basée sur la confiance et la conscience d’une responsabilité partagée. Pour cela, ce pacte doit non seulement être issu d’un large débat national, mais il doit d’abord rappeler les acquis réalisés par notre pays grâce aux efforts de ses enfants, procéder d’une critique claire des expériences ayant abouti à l’échec de notre modèle de développement et reconnaitre les erreurs de ce modèle. Il ne s’agit pas ici de juger telle ou telle partie mais simplement de s’approprier collectivement une conscience critique qui nous évitera de répéter de mauvaises expériences.

Le pacte doit se dégager de la confusion qui caractérise le rapport en se contentant d’évoquer les syndromes de nos échecs sans en établir les causes par un diagnostic précis.

Le pacte doit réaffirmer la place du dialogue comme mécanisme incontournable pour décider des grands choix de notre pays et doit contenir des signaux très forts relatifs aux ruptures nécessaires pour l’ouverture d’une nouvelle page. Car pour dépasser l’atmosphère que nous vivons, marquée par l’absence de confiance et la crainte de la non-concordance entre les paroles et les actes, il est nécessaire de lancer des signaux forts et courageux qui constitueront les prémices du rétablissement de la confiance entre les citoyens et la classe politique. Cette démarche devra être confirmée dans les faits en consolidant les règles de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption, de l’intégrité et de l’indépendance de la justice, et en cessant de dénigrer le rôle des partis politiques mais au contraire en les invitant à accomplir pleinement leur mission dans le cadre d’un système démocratique.

  • Il est important que le pacte se réfère aux grands chapitres de nos choix d’avenir, en laissant aux politiques publiques la mission de les traduire en décisions applicables sur le terrain. Dès lors, la compétition entre les acteurs politiques se jouera sur le contenu de ces politiques et sur leur degré de compatibilité avec les choix ayant recueilli l’adhésion de la nation. Dans cette optique, on peut s’inspirer des idées et recommandations et parfois des propositions pratiques contenues dans le rapport de la commission royale, qu’il s’agisse de la nécessité de l’investissement dans l’homme marocain en priorisant l’éducation, la formation et les secteurs sociaux essentiels et en œuvrant à la préservation de l’environnement, des ressources naturelles et à la lutte contre les changements climatiques ou bien qu’il s’agisse d’investir dans les secteurs d’avenir tels que l’économie numérique et les énergies propres. On pourrait également préciser certaines options ayant trait au rôle et à la place du secteur public de manière à confirmer sa prééminence dans la conduite de la stratégie de progrès de notre pays. Il en est de même pour la politique de l’égalité des genres, de celles relatives aux luttes contre la pauvreté et les inégalités, la corruption, les rentes et les conflits d’intérêt.

Nous devons aussi prendre en considération que la préparation de l’homme marocain aux défis de l’avenir ne peut se limiter à la dimension matérielle visant à améliorer ses conditions de vie et à assurer une croissance économique et une solidarité sociale qui maintiendraient la stabilité du pays et la cohésion de la nation. Elle doit également prendre en charge les dimensions culturelles et spirituelles du progrès que nous recherchons. D’où la nécessité d’accorder la plus grande importance au droit de tous les enfants marocains à intégrer l’école publique et à y apprendre obligatoirement dans l’une des deux langues nationales tout en leur assurant l’apprentissage obligatoire des langues étrangères nécessaires.

Dans le même temps, le fait de porter un grand intérêt à forger l’identité nationale en puisant dans ses différentes sources avec un grand esprit d’ouverture suppose un investissement fort et continu dans la production culturelle nationale, dans les institutions et métiers de la culture et dans l’enseignement artistique, ainsi que de donner au citoyen marocain l’occasion de consommer le produit culturel dans ses diverses expressions. Enfin, consacrer ces choix fondamentaux et garantir leur efficacité nécessite de mettre en place une politique courageuse d’éradication de l’analphabétisme, d’éducation à la citoyenneté et de qualification au numérique.

L’éducation culturelle et spirituelle de l’homme marocain suppose également de veiller à asseoir un islam d’ouverture et de tolérance, qui privilégie la raison, respecte la liberté et qui rejette toute intolérance et tout excès.

Vouloir édifier un Etat fort est certes nécessaire. L’Etat ne peut toutefois être fort que s’il est démocratique et protecteur de tous les citoyens. De même, tendre à une société forte est bienvenu mais la société ne sera forte que si on élargit l’espace de la connaissance et de la science, si on établit l’égalité, si on élargit les domaines des libertés individuelles et collectives, si on met en place des mécanismes d’insertion sociale, économique et culturelle de la jeunesse, si on réforme le système de santé et qu’on améliore ses services et si on instaure une protection sociale efficace, qu’on appuie la recherche scientifique et les capacités techniques du secteur médical.

Il faut aussi souligner qu’un Etat fort suppose d’abandonner la verticalité dans les relations entre les institutions, l’Etat et la société et au contraire de recourir à la participation horizontale et de s’appuyer sur une organisation régionale efficace et une démocratie locale qui mobilise les énergies.

En faisant ces choix d’un Etat fort et d’une société forte, on garantit la participation de toutes les énergies à la construction d’un Maroc de progrès, capable de répondre aux attentes de ses citoyens, dans un climat marqué par la confiance et la crédibilité et où règnent les valeurs du mérite, de la compétence et de l’intégrité.  

  • L’importance de ce pacte ne réside pas uniquement dans la détermination des choix stratégiques et dans l’établissement des process techniques permettant leur traduction dans les faits. Elle réside d’abord dans l’horizon politique que laisse entrevoir le pacte, qui pourrait permettre d’établir un sentiment solide de confiance dans la vie publique, dotant le pays d’un nouveau modèle politique. Ce qui n’est pas possible sans la réaffirmation de la concomitance naturelle de la démocratie et du développement, en insistant sur :
  • La centralité de la constitution dans la vie publique et la prédominance de l’interprétation démocratique de ses dispositions ;
  • La monarchie démocratique parlementaire et sociale à travers l’application effective de la séparation des pouvoirs, leur équilibre, leur coopération, ainsi que le respect absolu des institutions élues ;
  • Les réformes fondamentales politiques constitutionnelles et institutionnelles de nature à recrédibiliser le champs politique et syndical, à le rendre plus efficient et à doter la société civile des mécanismes de participation et d’initiative créatrice ;
  • L’assainissement et la détente du climat politique par des actes concrets de l’Etat pour initier le retour de la confiance, passant en premier lieu par la libération des journalistes et des détenus du Hirak social ;
  • La protection des droits et des libertés essentiels, l’interdiction de toute restriction dans ces domaines et leur reconnaissance comme partie intégrante de l’édification démocratique.

Avec cette vision, le pacte aura contribué à rénover les valeurs patriotiques, aura incité les jeunes à s’engager dans un projet collectif qui dépasse les intérêts personnels et catégoriels. Ainsi, ce nouveau souffle, ce patriotisme régénéré demandera à tous d’innover en créant des politiques publiques mobilisatrices dont le but sera de préparer les nouvelles générations à contribuer à la réalisation des desseins et des ambitions supérieurs du pays.

Fondation Allal El Fassi

Fondation Abderrahim Bouabid

Fondation Ali Yata

Fondation Abou Bakr El Kadiri

Centre Mohammed Bensaid Aït Ider

Centre Mohammed Hassan Ouazzani

Fondation Abdelhadi Boutaleb

Rabat, 19 juillet 2021

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