Taghazout Bay: la notion introuvable du développement

Fallait-il encore une intervention royale pour museler les corrompus impliqués dans le projet dit Taghazout Bay.

Les organes de l’Etat censés s’acquitter de leurs missions en matière de contrôle n’ont-ils pas failli à leur mission en matière de contrôle en bafouant de plain-pied le b.a.-ba de l’Etat de droit? Une chose est sûre, c’est que l’affaire de Taghazout Bay témoigne de la faiblesse de l’Etat pour mener à bout ses politiques publiques en matière de tourisme. Un Etat qui subit le chantage  et l’opportunisme cynique des «acteurs économiques», transformés instantanément  aux prometteurs immobiliers cupides, motivés purement par l’aspect pécuniaire au détriment des intérêts suprêmes de l’Etat.

D’ailleurs, ce projet inscrit dans le plan Azur a accusé beaucoup de retard pour qu’il soit livré conformément au deadline fixé en amont. Etalé sur 615 hectares, l’ébauche initiale a consacré environ  70% aux activités touristiques alors que 30% de la superficie a été réservée à l’habitat  luxueux, sachant que l’Etat a mis, en vain, les moyens propices à la disposition des investisseurs, à savoir la CDG, Sud Partners, FMDT, SMIT!

Il faut dire que la construction de cette station balnéaire a nécessité la mobilisation d’une enveloppe budgétaire s’élevant à 6 milliards de DH. Encore plus, les partenaires économiques se sont approprié les lots de terrains à un prix dérisoire. Pour ce faire, l’Etat a recouru à la procédure d’expropriation, contraignant plusieurs propriétaires  à céder leurs biens à un prix insignifiant, soit 20 DH le mètre carré. Certains d’entre eux, n’ont même  pas été remboursés jusqu’à l’heure actuelle.

Pire encore, les résultants ont été décevants voire,  en dessous de toutes les attentes et ce contrairement à ce qui a été établi dans la phase initiale. En fait, les investisseurs se sont engagés à construire environ 12.300 lits alors qu’il n’en est rien. Selon les chiffres révélés par plusieurs médias, seulement 2800 lits ont été livrés. Il s’agit d’un gap énorme entre les objectifs stratégiques et les résultats obtenus, qui sont si décevants.  Certains parmi eux, ont commencé les travaux avant de disposer du  permis d’autorisation de construction en dépit des mises en gades adressées par la commune, comme si ce territoire relevait d’une zone de non-droit.

Population locale délaissée

Qui plus est,  on est même parvenu à modifier le plan de masse en obtenant la dérogation auprès de la commission compétente pilotée par le Wali de la région. Au final, on s’est trouvé face à un projet vidé de sa finalité,  qui est celle de contribuer au développement économique  de la région.

Des villas qui poussent comme des champignons ont été vendues à des prix faramineux allant jusqu’à 15 millions de DH et même livrées dans un état lamentable. Ainsi, à titre indicatif,  la société Sud Partners a été enjointe de démolir 24 villas. Idem pour la société  Madaif, filiale de la CDG, sommée de son côté, à détruire 4 villas pour défaut d’autorisation…

Plus grave, ce projet a été mis en place sans construire les zones de connexion, notamment, la voie liant l’aéroport à la station balnéaire. A cela s’ajoute les structures d’accompagnement, telles la construction d’une école publique, maison de culture, un centre de formation… Des projets qui sont restés lettres mortes, nous déclare Taoufik Smida, acteur associatif.  Comme quoi, ajoute-t-il, la population locale a été laissée pour compte et que la dimension du développement globale est une notion introuvable auprès de certains décideurs, sachant que ce projet devrait créer presque 8000 emplois.

Pour notre interlocuteur, l’enquête diligentée par SM le Roi, Mohammed VI et menée la brigade judiciaire de la gendarmerie Royale doit aller jusqu’au bout en vue de  déterminer les responsabilités et ce sans exception.  La finalité consiste, précise-t-il, à concrétiser le principe de la responsabilité et la reddition des comptes, conformément à la loi suprême du pays.  Cela va certainement  servir de leçon aux décideurs zélés pour les empêcher de plus reproduire les forfaits de genre, notamment en ce qui concerne la construction de la future  station balnéaire d’Aghroud, conclut-il.

Khalid Darfaf

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