L’émission hebdomadaire les Mardis du PCNS produite par le Policy Center for the New South (PCNS) a été consacrée cette semaine à l’intelligence artificielle (IA) et la cyberguerre en Afrique.
Lors de cette émission, Redouan Najah, chercheur en relations internationales spécialisé dans le cyberespace au PCNS a abordé plusieurs axes en vue d’analyser la cyber-colonisation et ses manifestations ainsi que la situation de concurrence mondiale et ses implications sur le continent africain, indique un communiqué du PCNS.
En effet, le terme de cyber-colonisation a été utilisé pour la première fois par un chercheur français en mathématiques, Cédric Villani, auteur d’un rapport parlementaire sur l’intelligence artificielle, note la même source, relevant que l’intervenant a défini ce concept par une pratique qui permet de prendre le contrôle total ou partiel du cyberespace d’un Etat par un autre Etat ou par des entreprises privées et de l’exploiter en vue d’attirer la valeur ajoutée vers son économie.
Najah a, dans ce sens, expliqué que la cyber-colonisation se manifeste sous deux formes : la première lorsque des infrastructures sont construites par des entreprises étrangères tels que les centres de données pour stocker les informations des ordinateurs et des smartphones dans les quatre coins du continent avant de les véhiculer à travers les câbles sous-marins qui transportent les informations entre les continents, et la deuxième se manifeste lorsque les données stockées dans les centres de données sont exploitées.
Les informations des centres de données sont rares et sensibles au niveau de l’Afrique, souligne PCNS, soulevant que selon les statistiques, le continent dispose d’environ 80 centres de données dont la moitié se trouve en Afrique du Sud à elle seule. «Or, les lois et réglementations en matière de cybersécurité et de protection contre la cybercriminalité sont quasi absentes malgré la promulgation de l’Union africaine de la Convention de Malabo qui vise à évaluer les actions dans le cyberespace et convenir de dispositifs législatifs à l’échelle nationale et qui n’a été ratifiée que par 32 sur les 54 Etats du continent», note le communiqué.
Au niveau mondial, le chercheur a souligné que la course aux armements est devenue aujourd’hui une compétition pour le contrôle du cyberespace. « La puissance des Etats se limitait au domaine économique, politique et militaire, mais de nos jours, la puissance des Etats s’est étendue au domaine technologique, cela s’est traduit par la domination des Etats-Unis, du Japon et de la Chine sur le reste du monde. Ainsi, l’économie numérique a généré une activité économique considérable donnant lieu à une concurrence et une bataille au plan mondial pour s’approprier et développer le domaine technologique », précise la même source.
Les implications de cette bataille mondiale se sont traduites par l’installation en Afrique des sociétés géantes américaines et chinoises, les deux principaux pôles dans cette compétition, en raison de considérations démographiques importantes et du vaste marché que ces sociétés peuvent exploiter dans le continent, ajoute la même source.
Najah a indiqué que parmi les conséquences de cette guerre électronique, il y a lieu de signaler l’exploitation des données personnelles numériques dans les domaines économique, social et politique rappelant à titre d’exemple qu’entre 2013 et 2017, deux gouvernements africains ont engagé le cabinet Cambridge Analytica pour influencer les résultats des élections et recourir à un système de recommandations en vue d’influer sur le comportement des électeurs.
Lancé en 2014 à Rabat avec plus de 40 chercheurs associés du Sud comme du Nord, le Policy Center for the New South (PCNS) offre une perspective du Sud sur les enjeux des pays en développement. Il vise à faciliter les décisions stratégiques et les politiques publiques relevant de ses principaux programmes : Afrique, géopolitique et relations internationales, économie et développement social, agriculture, environnement et sécurité alimentaire et matières premières et finance.