Santé et pratique du jeûne de Ramadan
Pendant le ramadan, le jeûne peut affecter les personnes souffrant de problèmes de santé. C’est notamment le cas pour celles atteintes de certaines maladies cardio-vasculaires, qui ne doivent pas jeûner dans certains cas, ou observer ce jeûne à condition de faire l’objet d’un suivi par leurs médecins. Pour en savoir plus sur le jeûne de Ramadan et les maladies cardiovasculaires, la rédaction Al Bayane est allée à la rencontre du professeur Ahmed Bennis, cardiologue.
Pour de nombreux malades souffrant de pathologies chroniques, le jeûne du mois de Ramadan est une question existentielle, combien même leur santé est mise à rude épreuve, voire en danger. S’agissant des patients qui présentent des maladies cardiovasculaires, l’observation du jeûne peut conduire à une détérioration, de leur état de santé, à une aggravation de la maladie et la venue de complications secondaires plus ou moins graves. Pourtant, malgré les textes religieux qui autorisent à ne pas respecter le jeûne dans certaines situations, une forte majorité des patients cardiaques, d’hypertendus tiennent malgré tout) pratiquer le jeûne durant le mois de Ramadan. Une situation qui dans la majorité des cas met les médecins traitants face à un dilemme, à savoir celui d’autoriser ou non les patients à observer le jeûne. Une telle décision pour le médecin n’est pas facile à prendre, car il doit prendre en considération plusieurs éléments à la fois. L’état du malades, son traitement, ses différents examens, l’évolution de la maladie, la sécurité du patient, le volet religieux et la pratique du rite….
Tout cela en sachant que scientifiquement et médicalement parlant, l’impact du jeûne chez les patients souffrant de maladies chroniques ne peut être que délétère, car s’abstenir de manger et de boire en journée est incompatible avec la prise de médicaments prescrits qui dans la majorité des cas doivent être pris par le malade à des horaires précis, comme c’est le cas pour certaines maladies cardiaques ou encore l’hypertension artérielle. Pour en savoir plus sur tous ces aspects forts complexes, nous faisons le point avec le professeur Ahmed Bennis cardiologue.
Entretien avec le professeur Ahmed Bennis, cardiologue
«Le jeûne du Ramadan n’est pas un facteur aggravant chez des patients hypertendus ou cardiaques»
Propos recueillis par Ouardirhi Abdelaziz
Al Bayane : Il est communément admis que la grande majorité des malades cardiaques qui sont suivis peuvent pratiquer le jeûne de Ramadan sans risques. Qu’en est-il dans la réalité de votre pratique quotidienne?
Ahmed Bennis : C’est tout à fait vrai, il est prouvé que la pratique du jeûne même en dehors du mois sacré de Ramadan entraine des effets positifs sur l’état de santé des individus. ces effets positifs concernent la tension artérielle, le glycémie, le cholestérol, l’immunité, le poids, le système vasculaire. Plusieurs études ont démontré les bienfaits du jeûne de Ramadan sur l’organisme, et nous conseillons aux citoyens de le pratiquer même en dehors de ce mois sacré, pour justement éviter de nombreuses maladies cardiovasculaires.
Parmi les malades cardiaques qui peuvent jeuner après avis de leurs médecins, il y a les patients qui ont l insuffisance cardiaque compensée, ceux qui ont eu un infarctus du myocarde ancien, les valvulopathies stables.
Qui sont les malades qui ne peuvent pas jeuner?
Les malades qui ont un infarctus du myocarde récent de moins de 6 mois à un an. Les malades à qui on a fait un cathétérisme pour déboucher les artères coronaires et qui doivent s’abstenir de jeuner au moins pendant une année. Les malades victimes d’un AVC accident vasculaire cérébral avec hémiplégie, ceux hypertendus dont la tension reste instable même sous traitement. Les patients qui souffrent de troubles du rythme cardiaque et de valvulopathies,
Les malades insuffisants cardiaques dont le cœur ne fonctionne pas bien, qui présentent des douleurs thoraciques à la marche, des dyspnées.
Que pouvez-vous nous dire au sujet des malades hypertendus?
S’agissant du malade qui a une hypertension artérielle stabilisée, et si ce patient nécessite une seule prise médicamenteuse, mono-thérapeutique par jour, ou encore le malade qui présente une hypertension modérée, nous conseillons la pratique du jeûne, car il y a un effet bénéfique du jeûne sur la pression artérielle.
Quels sont les conseils que vous pouvez donner aux patients?
Mes conseils pour les malades cardiaques qui sont autorisés à pratiquer le jeûne de Ramadan consistent à dire qu’il est très important de suivre le traitement prescrit par le médecin, que les différents médicaments doivent être bien repartis après la rupture du jeûne (iftar ). Il y a des médicaments qui doivent être pris deux fois après la rupture (après Iftar et après Shour).
Les malades doivent bien s’hydrater (boire) après le Ftour, boire plusieurs fois au moins un litre et demi, afin d’éviter des atteintes rénales surtout chez les personnes qui sont sous traitement diurétique.
Les malades doivent contrôler leurs poids et noter toutes les anomalies qui doivent faire l’objet d’une visite chez leurs médecins spécifiques. Dans les cas de figure, il faut savoir que le jeûne du Ramadan n’est pas un facteur aggravant chez des patients hypertendus ou cardiaques, à condition que leurs maux soient bien contrôlés et stabilisés. Au contraire, le jeûne semble même avoir un effet bénéfique chez beaucoup de patients. Cependant, compte tenu des grandes variations individuelles, il est souhaitable pour tout patient cardiaque, de demander conseil à son médecin.