Droits de l’Homme et nouveau modèle de développement
La promotion des droits de l’homme requiert la mise en place des politiques publiques inclusives, ont souligné les participants à la table ronde autour du thème : « L’effectivité des droits de l’Homme et le nouveau modèle de développement », organisée, jeudi 9 décembre, par le Laboratoire de droit public et les droits de l’Homme relevant de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales à Mohammedia.
Mohamed Hachimi : Pour une démarche transversale
Prenant la parole, Mohamed Hachimi, chargé de mission auprès de la présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), a indiqué que la mise en place d’une politique inclusive nécessite, avant tout, de revoir notre vision de l’action publique.
Il faut dire, selon le représentant du CNDH, que le nouveau modèle de développement nous met devant un défi, celui de maintenir l’équilibre entre la préservation de l’ordre public et la protection des libertés, surtout dans le contexte de crise pandémique. D’ailleurs, ce débat se pose même dans les pays démocratiques les plus ancrés, d’où la nécessité d’ouvrer à mettre en place des solutions innovantes, adaptées à l’environnement marocain a-t-il appelé. Pour ce faire, l’intervenant a ainsi mis en garde contre les visions sectorielles étroites, en mettant l’accent sur la nécessité d’adopter une approche multidisciplinaire voire transversale lors de l’élaboration d’une politique publique dédiée aux droits de l’homme. Abondant dans le même ordre d’idées, Mohamed Hachimi a évoqué dans ce sens l’impérativité de l’intégration des dimensions (écologique et culturelle) pour qu’on puisse parler d’une politique publique en bonne et due forme tout en évoquant l’importance de l’institutionnalisation de « la démarche d’évaluation » afin de mesurer les effets de l’action publique. Mohamed Hachimi a conclu que l’investissement dans le capital humain demeure une priorité, à commencer par le droit à la santé, à l’éducation et à la culture, sur lesquels le CNDH publiera un rapport thématique en début de l’année prochaine.
Habib Belkouch : instaurer une culture de confiance
De son côté, Habib Belkouch, Président du centre d’études en droits humains et démocratie, a rappelé dans son intervention le rapport du cinquantenaire, un document référentiel, tout en invitant les artisans des politiques publiques à consacrer « la culture de l’évaluation continue » afin d’anticiper les risques. Le conférencier a jugé que les droits de l’homme sont une condition sine qua non de tout modèle de développement. Pour ce faire, il a appelé à renforcer la capacité des décideurs, pour pouvoir concrétiser les politiques publiques basées sur les droits de l’homme, et ce sur la base d’une approche qui respecte les droits civils et politiques des citoyens. A cela s’ajoute, le respect du pluralisme et la redéfinition des rôles des institutions de la gouvernance en inscrivant son action dans une démarche de complémentarité, a-t-il martelé. Autre élément non moins important, a-t-il insisté, est celui de la mise en place des politiques publiques devant être basées sur la culture de confiance. Sur un autre registre, Habib Belkouch s’est interrogé sur la visée du document du modèle de développement : est-ce qu’il constitue un guide pour l’élaboration des programmes des politiques publiques ou un document référentiel ? Pour le militant des droits de l’homme, la mise en œuvre des politiques publiques, passe par le respect des droits politiques et civils qui garantissent l’expression et la participation des citoyens à la gestion de la chose publique.
Mohamed Ayyadi : La consécration du droit au développement
Par ailleurs, Mohamed Ayyadi, directeur de coordination et de la promotion des droits de l’homme auprès de la Délégation interministérielle aux droits de l’homme, a estimé que la réussite des objectifs du nouveau modèle de développement est tributaire du renforcement de la confiance du citoyen, en indiquant dans ce sens qu’il y ait des grandes attentes sociales dans les domaines de la santé et de l’éducation. Il faut dire, a-t-il poursuivi, que ce nouveau modèle de développement s’inscrit dans le cadre des multiples réformes menées par SM le Roi Mohammed VI depuis son accession au Trône. Des réformes qui ont abouti à une réforme constitutionnelle et qui répond à l’ensemble des aspirations des Marocains, en garantissant des droits et des libertés.
Le responsable de la délégation interministérielle a souligné que les consultations pour l’élaboration du rapport du nouveau modèle de développement sont conformes aux normes des droits de l’homme au niveau international tout en insistant sur le fait que les droits de l’homme contenus dans le rapport du modèle de développement s’assignent comme objectif la consécration du droit au développement conformément aux dispositions de la Constitution 2011. Comme quoi, ce document a renforcé les fonctions de l’État de droit en faisant référence à ses engagements forts dans le contexte de la crise ou encore en renforçant ses rôles en matière de la protection des droits de l’homme, des libertés, du pluralisme et la mise en œuvre des principes de la bonne gouvernance.
Habib Kamal : Pour une société démocratique
Habib Kamal, président de l’Observatoire marocain des libertés publiques considère quant à lui que le modèle de développement est resté prisonnier d’une vision technocratique. Pour l’intervenant le fait d’imposer un modèle de développement à la société nécessite la mise en place d’un gouvernement de coalition nationale avec des procédures d’urgence pour une courte période, jusqu’à ce que toutes les conditions soient réunies pour la tenue d’élections libres et intègres. D’ailleurs, a-t-il expliqué, que la prolifération des mouvements sociaux, témoigne de l’échec du modèle de développement précédent. L’invité a ainsi appelé à la libération de tous les détenus des mouvements de protestation, car l’échec du modèle précédent, signifie que ces jeunes avaient tout bonnement raison. Habib Kamal a souligné dans ce sens l’importance de la mise en place des mécanismes d’un dialogue global et institutionnalisé entre toutes les parties dans le dessein de bâtir une société démocratique.
Khalid Darfaf