Sur le vif
Mohamed Nait Youssef
«L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde.», écrivait Albert Camus dans “Le mythe de Sisyphe” (1942). Edgar Morin, 102 ans, était l’invité d’honneur de la 2e édition du Festival du livre africain de Marakech (FLAM) qui a eu lieu du 8 au 11 février à la ville ocre. Lors de son discours lucide, puissant, franc et sincère, l’éminent philosophe et sociologue n’a pas mâché ses mots en évoquant la «tragédie horrible» à Gaza. «Je pense que nous vivons une tragédie horrible.», a-t-il déploré. Ses réflexions profondes, engagées et humanistes n’ont pas pris une seule ride. Dans son témoignage poignant, Edgar Morin a dénoncé le carnage massif, le silence des Etats et du monde face aux crimes commis par Israël à Gaza. Face au silence incompréhensible et inquiétant de l’intelligentsia, le philosophe a mis les mots sur les maux d’un peuple déchiré par la guerre. Edgar Morin est l’exemple des penseurs impliqués ayant œuvré pour une humanité partagée, solidaire, juste. Et c’est en témoignant, dit-il, qu’on brise ce silence. D’où en effet l’une des tâches majeures des intellectuels : dénoncer l’injustice et battre en brèche toutes les violences, les guerres, les violations… En ces temps troublés où de nombreuses voix ont recouru au silence, Edgar Morin a appelé à « regarder les choses en face ». Il faudrait de l’audace, ici et maintenant. C’est une urgence : arrêter la sale guerre Israélienne contre Gaza. Les intellectuels et les voix libres et engagées assument une grande responsabilité en avalant leurs langues en ces moments curiaux que traverse l’humanité. Car, ce sont des innocents, des enfants, des femmes, des humains qui meurent chaque jour au su et au vu de tous. C’est l’un des rôles centraux de l’intellectuel : dire NON aux boucheries et à la tuerie. Le message d’Edgar Morin est clair et juste : briser le silence, témoigner et dénoncer la «tragédie horrible» à Gaza. C’est un devoir qui devrait être accompli par les voix libres, humanistes et engagées. C’est une urgence.