Mardi et mercredi a eu lieu à Watford, dans la banlieue londonienne, un sommet réunissant les dirigeants des pays membres de l’OTAN et ce, dans le cadre des célébrations du 70e anniversaire de l’alliance atlantique. Particularité de cette rencontre, l’ambiance n’était très festive au vu des multiples différends opposant les dirigeants des pays membres.
En tête de liste, figure le conflit opposant le président français Emmanuel Macron à son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, au sujet de l’intervention lancée par Ankara dans le nord-est de la Syrie sans même que les autres membres de l’alliance atlantique n’en soient informés. Ce litige ayant abouti à un échange d’invectives entre les deux hommes, leurs partenaires ne pouvaient qu’espérer que ces derniers aillent aplanir ce différend lors de la réunion de Londres sur la Syrie qui, la veille, avait précédé le sommet de l’OTAN et à laquelle, outre Erdogan et Macron, participaient Boris Johnson et Angela Merkel, mais il n’en fut rien, chacun est resté ferme sur ses positions.
Mais, il n’y a pas que l’opposition Macron-Erdogan. Au-delà de la Turquie, les propos du président français sont loin de faire l’unanimité si bien que le Premier ministre néerlandais Mark Rutte bien qu’étant d’accord avec Macron lorsqu’il a déclaré que « l’Europe devait renforcer son système de défense » a estimé que le président français est, tout de même, «allé trop loin».
Ainsi, parmi les divergences qui figuraient au menu du sommet de l’OTAN, il y avait aussi les rapports entre le président américain et son homologue français qui ne sont pas non plus au « beau fixe » et même loin de là ; le premier reprochant au second ses propos « très insultant » à l’égard de l’OTAN lorsqu’il avait déclaré que l’alliance atlantique était en état de « mort cérébrale ». Les intéressés ne se sont, d’ailleurs, pas privés d’étaler leurs désaccords lors de la conférence de presse de mardi devenue, par la force des choses, une véritable passe d’arme entre les deux chefs d’Etat lorsque Donald Trump a jugé comme étant «très méchante à l’adresse des 28 pays membres de l’alliance» la déclaration d’Emmanuel Macron sur l’OTAN. Le président américain ajoutera même que «personne n’a besoin de l’OTAN plus que la France».
Et même si sur le plan commercial, rien ne va plus et qu’en représailles à la volonté de Paris «de taxer les géants technologiques américains», Trump a fait part de son intention d’imposer à la France des droits de douane pouvant atteindre 100% sur près de 2,4 milliards de dollars de produits français tels le roquefort, les yaourts et le vin, le président américain a fini par adopter un ton plus conciliant lorsqu’il a qualifié de «mineur» leur différend commercial.
S’agissant de la Russie, en emboitant le pas à son homologue français, Donald Trump a convenu de la nécessité d’«initier un dialogue sans naïveté… pour réduire la conflictualité» avec Moscou et s’entendre avec cette dernière.
Mais quoiqu’il en soit, après avoir étalé leurs divergences face au monde entier, les présidents américains et français ont achevé leur conférence de presse comme ils l’avaient commencé, sans aucune poignée de main…
Enfin, si Donald Trump a tenu, comme il le fait depuis 2017, à rappeler aux pays membres de l’OTAN qu’il leur appartient de mieux «partager le fardeau» de l’alliance, le président français, quant à lui, n’y est pas allé avec le dos de la cuillère lorsqu’il a déclaré qu’il ne voyait «pas de consensus possible» avec la Turquie qui, bien qu’ayant «réaffirmé clairement son engagement dans la lutte contre Daech » considère comme terroristes les unités kurdes syriennes de protection du peuple (YPG) et leur bras politique, le PYD, alliés de la coalition internationale de lutte contre l’organisation Etat islamique en Syrie. Qu’en sera-t-il alors des relations entre Paris et Ankara sérieusement mises à mal lors de ce sommet de l’OTAN ? Attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi