Le bourdonnement politique national continue. Alimenté beaucoup par le bavardage polémiste que par la synergie des efforts, il est assourdissant que l’on n’arrive plus à distinguer la bonne parole à travers le verbiage des uns et des autres. Sans vouloir en ajouter, il apparaît néanmoins qu’il faudrait revenir sur l’essentiel.
En premier, cette affaire du drapeau national. On ne peut accepter que l’emblème de la nation soit seulement corrélé à l’Etat dans l’exercice de ses pouvoirs régaliens qui imposent des normes et organisent la société. Comme on ne peut revenir à l’Histoire pour avancer que ce drapeau est un héritage que l’on ne veut plus assumer. On pourrait comprendre à la limite l’expression de ces deux positions fausses et corrompues si elles s’intégraient dans un débat sur la Constitution. Car c’est l’article 4 de notre Constitution, votée le 1er juillet 2011 « dans un contexte où toutes les opinions ont pu s’exprimer aussi bien au sein des institutions que dans la rue », qui détermine que « l’emblème du Royaume est le drapeau rouge frappé en son centre d’une étoile verte à cinq branches ». Par ce fait, qui que ce soit n’a plus le droit de venir exprimer à ce propos des remarques pour défendre un état critiqué et critiquable qui a sévi lors des manifestations d’Al Hoceima. A moins que cette personne se met d’elle-même au-dessus de la Loi fondamentale du Royaume du Maroc ? Ou ne voudrait-elle pas que le Royaume soit une monarchie constitutionnelle.
Il serait aussi important de connaître la position de cette individualité sur l’Etat en tant qu’entité qui s’impose à toute la collectivité nationale. À vouloir expliquer l’inexplicable, on tombe dans le mensonge, le dogmatisme et la forfaiture. Il faut arrêter de raconter des balivernes en se donnant des airs doctes, en dehors du respect de la Loi, se croyant intouchable ou cherchant à se faire épingler pour se donner une stature fantasmée au sein du mouvement social marocain.
En second lieu, cette affaire de l’interpellation d’un ministre pour savoir dans quelle entité il exerce sa charge, gouvernement ou gang ? On peut exprimer sa contestation et son opposition au gouvernement sans pour autant s’abaisser à ce niveau d’ignorance et d’insolence. On peut dire que ce gouvernement ne répond pas aux aspirations légitimes des masses populaires, qu’il a perdu la confiance de la population, qu’il ne développe aucune action pour consolider les solidarités entre les personnes et pour affermir la cohésion entre les territoires, qu’il se soumet aux exigences infondées des institutions financières internationales, qu’il est léthargique à tel point que le capital démocratique amassé depuis des années se dissipe sous l’érosion du tribalisme et de la confrontation, que sa faiblesse porte atteinte au respect que l’on doit à l’Etat et à ses institutions, qu’il fait partie du problème et ne peut de ce fait apporter la solution adéquate …etc. Le gouvernement est issu d’un processus régi par la Constitution du royaume. Sa gestation a montré les difficultés issues de la différence entre la méthodologie démocratique et la consolidation du processus démocratique. Il ne peut être qualifié de gang, association criminelle mafieuse. Cela constitue un déni de toute la construction démocratique conduite jusque-là avec beaucoup de sacrifices et de patience.
L’ensemble de croyances et de valeurs qui sont communes au peuple marocain, l’ambition dans le changement démocratique et la démarche consensuelle adoptée pour y parvenir intiment à tout un chacun d’user de clarté, de transparence et de respect à l’encontre d’autrui, aussi bien dans son interpellation que dans toute réponse, réplique ou répartie. Cette clarté éclaire le dessein poursuivi et positionne le propos dans son contexte bien défini. L’usage du double langage et des faux fuyants n’aide en rien à la recherche du consensus, au développement du débat démocratique et à la conscientisation des masses populaires. Il ne fait qu’accentuer ce ronflement qui sème le trouble et ajoute de l’huile sur le feu.
Notre société a besoin d’un discours enthousiasmant où la critique est constructive pour aller de l’avant, afin de consolider l’édification de l’Etat national démocratique et moderne et ouvrir les perspectives pour l’émergence de notre pays, l’émancipation de notre société et l’établissement de la justice sociale.