L’emploi féminin au Maroc, une force «sous-exploitée»

Par Karima El Otmani – MAP

Sous-emploi, travail peu qualifié, disparités sont, entre autres caractéristiques, de l’emploi féminin au Maroc. Pourtant, il constitue une force motrice pour le développement économique.

Malgré les efforts déployés par le Royaume pour changer la donne, le niveau de participation de la femme au marché du travail et même le niveau de son implication dans l’entreprenariat restent très modestes. Les chiffres du Haut-Commissariat au Plan (HCP) le confirment. Selon sa dernière note sur la situation des femmes au marché du travail au deuxième trimestre de 2020, publiée à l’occasion de la Journée nationale de la femme marocaine, le taux d’emploi des femmes au Maroc a reculé à 17,5% au deuxième trimestre 2020 contre 61,8% parmi les hommes.
Par milieu, cette baisse a été le plus marquée dans le milieu rural, passant de 28,4% à 23%, pendant la même période, alors qu’en milieu urbain ce taux oscille autour de 14,7%.

Les femmes actives occupées restent plus présentes dans le secteur de « l’agriculture, forêt et pêche » avec une part de 43,3% de l’emploi féminin, suivi des « services », avec une part de 42,4% et celui de « l’industrie y compris l’artisanat » avec 13,8% comme part dans l’emploi féminin.

Conscient du rôle important de la femme en tant qu’acteur incontournable de la croissance économique du Maroc, le Royaume a mis en place une panoplie de réformes institutionnelles et sociétales lui garantissant des droits de plus en plus élargis et favorisant son émancipation et sa contribution au développement du Royaume.
Toutefois, sa présence quantitative sur le marché du travail n’a pas été portée par ces évolutions, naturellement favorables. Au contraire elle a même reculé au cours de ces dernières années.

Pour la Présidente nationale de l’Association des femmes cheffes d’entreprises au Maroc (AFEM), Leila Doukali, une plus large intégration de la femme dans des postes de responsabilités accroitrait le PIB de 2%.
« L’entreprenariat féminin au Maroc a véritablement besoin d’une stratégie nationale collaborative d’encouragement à la création d’entreprise et de soutien à l’existant », relève Mme Doukali, dans une interview accordée à la MAP.
« Le taux de création d’entreprises par la femme est en recul passant de 12% en 2015 à 10% en 2018 et ce malgré toutes les mesures gouvernementales mises en place », précise-t-elle.

Et de souligner que « le Covid-19 n’est pas venue arranger les choses. Bien au contraire. Le tissu entrepreneurial féminin est majoritairement composé de TPE exerçant dans les secteurs du commerce et des services, lourdement impactés par cette pandémie », notant que beaucoup d’entre elles ne peuvent plus faire face aux charges courantes de leur activité du fait d’un carnet de commande vide. Elles restent néanmoins animées par une forte volonté de maintenir leur business.

L’AFEM, poursuit-t-elle, a décidé de se mobiliser pour être au plus près de ces femmes pour leur apporter le soutien nécessaire et les aider à franchir ce cap difficile.

« Nous ne pouvons pas concevoir que le taux de création d’entreprise, qui est déjà très bas, continue à décliner d’autant plus que la femme marocaine veut plus que jamais son autonomie financière », dit la présidente.
Un chiffre récent de Deloitte stipule que l’appétence actuelle de la femme à créer son entreprise se situe à 34% au Maroc contre 17% en France, fait observer Mme Doukali.

« La création d’entreprise par la femme est un véritable parcours de combattant. Il lui faut beaucoup de détermination et de courage pour aller au bout de son projet. Elle fait face à un problème de financement car elle ne dispose pas de garanties à offrir. Elle porte également la totale responsabilité de son foyer, ce qui impacte considérablement sa volonté de créer son affaire », insiste la présidente.

La femme marocaine a besoin d’être épaulée, d’être accompagnée et surtout d’être rassurée. Elle pense ne pas être capable de concilier vie familiale et vie professionnelle. Et pourtant, elle en est parfaitement capable, poursuit-t-elle. 

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