Le Royaume ciblé

Nul besoin de rappeler que la moindre faille dans le dispositif mis en place risquerait de coûter cher, très cher, à la stabilité du pays. Celle qui fait du Royaume une exception régionale que seuls les aveugles ne voient pas. En effet, s’il faut s’attendre à ce que le processus de démantèlement des cellules terroristes s’inscrive dans la durée, et c’est ce qui est largement expliqué par la multiplicité des rafles et des procès, c’est que le Maroc est ciblé par la nébuleuse terroriste qui se revendique d’Al Qaïda. Un ciblage qui n’est pas étranger à ce qui s’opère dans un pays qui s’est choisi le meilleur cap pour assurer son essor. Celui de la consolidation des acquis démocratiques et du parachèvement de l’édification d’un Etat de droit. Avec pour toile de fond un projet de société axé autour des valeurs de la modernité et du progrès. Dès lors, on comprend l’ire des « idéologues » du néant qui réussissent à embrigader des kamikazes auxquels n’est assignée qu’une seule mission : déstabiliser les pays musulmans qui osent négocier autrement leur place dans un monde global qu’en s’agrippant aux préceptes d’un passé figé.

 

Et le Maroc a fait bien des choix dans ce domaine pour mieux accompagner le 3ème millénaire et les défis qu’il relance. Des choix qui se rapportent à une gestion moins butée du champ religieux, garantissant une sécularisation à toute épreuve, à l’émancipation de la femme, et à l’adoption des principes élémentaires des droits humains… C’est ce processus là qui est ciblé par les terroristes qui sont allaités aux mamelles du rejet systématique de l’Universel et de l’Autre. Ils aspirent donc à arrêter un processus qui ne fait que démarrer. Pour emprisonner le Royaume et sa population dans le carcan du sous-développement cultuel, culturel et économique. En seront-ils capables ? Rien ne le présage au vu de la dynamique que vit le pays. Mais est-ce pour autant une raison de se complaire dans l’expectative ? La réponse est évidemment non. Démocrates et progressistes ont pu mesurer l’ampleur des dégâts psychologiques qui ont marqué la mémoire collective au lendemain des attentats sanglants du 16 mai, à Casablanca. Ils ont su aussi que les kamikazes n’hésiteront devant rien pour stopper net l’élan qui fait l’exception marocaine. Dès lors, la riposte à un tel ciblage ne doit pas rester du seul ressort des sécuritaires qui méritent, il faut le rappeler, toute notre gratitude. Elle doit plutôt être un fait collectif.

Dès lors, la bataille à engager sur plusieurs pistes à la fois doit démarrer par la condamnation sans appel de tous les discours «exclusionnistes» qui font l’apologie du Djihad aveugle au nom d’une lecture de l’Islam aussi radicale qu’erronée. Un travail de fond doit être mené sur le terrain cultuel en vue d’assécher tous les terroirs qui permettent l’éclosion d’une pensée radicale qui part de l’anéantissement de l’autre pour s’auto-anéantir. Comme elle suppose de faire valoir autrement les vraies valeurs qui ont de tout temps marqué l’Histoire du Royaume. Un pays qui a fait siennes les valeurs de l’ouverture et de la tolérance. Cette bataille qui s’inscrit dans la durée ne doit pas occulter, non plus, les impératifs de la refondation de l’action politique de sorte que l’encadrement des citoyens ne laisse point de place aux prêches des apprentis sorciers. Les états-majors des formations politiques, toutes tendances confondues, sont dans l’obligation de réhabiliter la politique aux yeux du peuple. C’est à eux d’imaginer les meilleurs moyens pour y parvenir. En tout cas, pour le camp du progrès, cette bataille doit s’opérer sur deux fronts : une action de proximité de meilleure facture et la mise en branle des revendications en suspens liées aux réformes institutionnelles d’une nouvelle génération. La stabilité du Royaume est tributaire de ce coup de fouet à imprimer, dans l’absolu, à l’action politique responsable. Certes, bien des pistes ont été sondées dans ce cadre-là. Mais il faut croire qu’il relève de l’urgence que de baliser toutes les voies susceptibles de redonner espoir aux Marocains d’ici et d’ailleurs. Une affaire qui relève de l’urgent !

 


 

Top