«Le style, c’est l’homme», disait feu SM le Roi Hassan II. Cette citation se traduit profondément dans le contexte de son successeur, SM le Roi Mohammed VI, depuis son intronisation. En effet, en matière de communication, le style du souverain est adapté à son statut historique et constitutionnel avec ses approches communicationnelles.
Dès sa montée sur le Trône en juillet 1999, SM le Roi a reconfiguré le «concept d’autorité», le mettant sur les rails de la «proximité», le renforçant par l’initiative nationale du développement humain (INDH), la consolidation des «institutions impartiales», la «réconciliation», l’instauration d’une nouvelle forme de gouvernance, l’ancrage de la culture démocratique et du pluralisme politique, pour baliser la voie à une nouvelle constitution en 2011 pour mieux poursuivre le chantier du développement social et économique, dans un contexte bâti sur les valeurs démocratiques et le respect des libertés et des droits de l’Homme.
C’est dans ce cadre, où le Roi qui est au-dessus de la mêlée politique et partisane, que la communication royale se distingue des autres genres de la communication, notamment le marketing politique, la communication politique et la propagande. «La communication politique royale se base sur une rhétorique de l’Agir et non seulement et ordinairement sur celle du dire-faire; elle est « performative » au niveau de l’action tout d’abord. Les actions politiques royales constituent « une parole politique » en pratique, en action.
Elles parlent actionnellement politique. Les voyages à dessein politique effectués intensivement dans le pays et ailleurs ont le plus souvent pour but de montrer et non seulement de dire et décrire des décisions politiques d’envergure. L’influence de l’image en action de l’action politique royale est d’autant plus rapide et efficace qu’elle se passerait de tout commentaire descriptif et/ou explicatif qui, quelles que soient sa nature et sa portée, ne pourrait en l’espèce que ressasser, sinon résumer à outrance, ce qui est bellement et suffisamment « dit » par l’acte diffusé immédiatement dans les médias», souligne le professeur de l’enseignement supérieur, Rachid Arraichi, coordonateur du master «la communication politique», chef de «L’Equipe de Recherche en Communication Politique» (ERCOP ) à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales, Aîn Chock de l’Université Hassan II de Casablanca, et président du Centre International de Recherches et d’Etudes en Sciences de la Communication Politique (CIRESCOP).
Une visée illocutionnaire
En fait, les concepts forgés par SM le Roi dans ses discours sont déclinés sur le terrain par des actions royales donnant lieu à des actes, qui améliorent les conditions de vie des citoyennes et des citoyens, en créant des postes d’emplois, en lançant des chantiers structurés et structurants, en renforçant les infrastructures nécessaires, en promouvant le développement économique et social du pays. Cette approche, ciblant le «bien commun» du Maroc, conduit ainsi, à longueur de l’année, SM le Roi dans différentes contrées du royaume pour rencontrer les citoyennes et les citoyens en s’adressant à eux dans leur «parler local», en interrogeant leur répertoire de références, pour que le message soit bien reçu, comme l’explique la théorie du célèbre linguiste russe, Roman Jackobson (1896-1982).
Le feedback du message royal, selon la même théorie, se lit dans les ambiances de fête et des liesses populaires que réservent spontanément et massivement les populations au souverain partout dans le royaume. En vingt ans, le souverain aura parcouru tout le territoire de son pays et visité toutes les contrées du royaume. Cette communication par l’action se trouve confortée par le choix du lieu d’énonciation des discours. La pertinence du choix et la charge symbolique du lieu cadrent le message royal et lui donne toute sa portée. Dans ce sillage, par exemple, le discours prononcé par SM le Roi Mohammed VI, le 17 octobre 2001 à Ajdir (Khénifra) a marqué la fin d’une conception monolithique de la culture marocaine.
De même, le discours prononcé à partir de la ville de Laâyoune, à l’occasion du quarantième anniversaire de la Marche verte en 2015, a jeté les bases de développement des provinces du sud, selon un modèle de développement adapté à la région dans le cadre de la politique de régionalisation avancée. Une année plus tard, SM le Roi a choisi la capitale sénégalaise, Dakar, pour prononcer son discours à la même occasion (41ème anniversaire de la marche verte) pour souligner et réaffirmer l’africanité du Maroc. De même encore, le discours prononcé à l’occasion de la fête du Trône, le 29 juillet 2018, à partir de la ville d’AL Hoceima, a tracé une feuille de route pour le décollage du pays dans plusieurs secteurs, tout en soulignant les questions prioritaires dans les domaines économique et social. Les jalons d’un nouveau modèle de développement ont été en effet lancés.
Une dimension actionnelle
«La communication politique royale dans sa forme discursive se démarque par une « force douce »: autant elle est simple et claire, autant elle est percutante et efficace. La clarté expressive imprime au texte sa transparence sémantique, celle là même qu’assure autrement et emphatiquement l’image en relatant directement l’action. La simplicité et la concision de l’expression garantissent à la communication politique discursive sa visée illocutionnaire. Il s’agit là aussi d’un discours-action: les mots et les expressions sont qualitativement et quantitativement à la mesure parfaite du sens, la syntaxe globale du discours s’écartant totalement du tortillage fastidieux et le style imitant et relatant la finalité réaliste de son auteur», relève le PES, Rachid Arraichi dans cette analyse académique accordée à AlBayane. Et de souligner que «la communication politique royale est « vivante ». Elle s’adresse tout d’abord au cœur de la société, sa jeunesse. L’investissement conséquent qu’elle fait des réseaux sociaux et de la peopolisation cautionne la volonté de rompre avec les pratiques obsolètes de communication et de montrer objectivement l’adoption de modes d’échange modernes, appréciés et prisés essentiellement par les jeunes».
Ces caractéristiques de la communication royale, estime le PES Rachid Arraichi, doivent être davantage étudiées, montrées et démontrées, par les chercheurs en la matière. L’intérêt, a-t-il fait savoir, étant de faire voir la mise en forme de cette dimension actionnelle que relate verbalement le discours et montre directement l’image.
Image et communication de leadership
Dans le même sillage, précise le professeur de l’enseignement supérieur et coordonnateur du Master «la Communication politique» à l’Institut supérieur de l’information et de la communication (ISIC) de Rabat, Mohamed Abdelwahab Allali, ce modèle de communication royale intéresse la recherche en matière de communication politique et demeure un champ à explorer par les chercheurs en la matière. A ce propos, il a fait savoir que selon les traditions du système politique marocain, SM le Roi Mohammed VI, en utilisant un style spécifique de communication du leadership, est au cœur de la communication politique. Et ce par des actions communicatives stratégiques, sur les chantiers du Maroc depuis 1999, son évolution socioéconomique, sur la promotion du Maroc contemporain, sur la politique africaine du royaume et dans le monde, a-t-il souligné. C’est cette approche communicationnelle qui conforte le rôle du souverain garant, du souverain protecteur et du souverain bâtisseur dans le développement du pays et de sa stabilité. D’ailleurs, ce leadership proactif, audacieux et distingué de SM le Roi est toujours hautement salué par la communauté internationale, confortant ainsi la devise éternelle du royaume : «Dieu, la Patrie, le Roi».
Belkassem Amenzou