Le débat budgétaire reste chaque année un moment fort de la vie parlementaire. Mais l’entrée en vigueur de la loi organique des finances, prévue en janvier 2016, devrait consolider davantage le rôle du parlement dans le renforcement de la gouvernance financière.
Rachid Talbi Alami, président de la Chambre des représentants, semble en tout cas conscient de l’ampleur de la tâche qui attend les députés. Surtout que le budget de 2016 sera exécuté à la lumière de la nouvelle loi organique des finances. «Nous devons réfléchir à une stratégie destinée à renforcer les compétences du Parlement et à mettre à niveau ses organes afin d’être en mesure d’exécuter la loi organique des finances», a-t-il souligné lors d’une journée d’étude organisée hier par la Chambre des représentants en collaboration avec la Banque mondiale. Car,«le rôle du Parlement n’est plus limité au pré-contrôle des lois de finances, mais s’est élargi à leur élaboration et au suivi de leur exécution», s’est réjoui Rachid Talbi Alami. En effet, la nouvelle loi organique associe le Parlement à la préparation du budget. Ainsi, «la procédure d’élaboration du projet de loi de finances a été revue pour garantir l’implication du Parlement», comme l’a rappelé Said Khairoun, président de la commission des finances à la Chambre des représentants. Jusque là, le Parlement ne prenait connaissance du contenu du projet de loi de finances qu’après achèvement de la phase de préparation au niveau de l’exécutif. Or, la nouvelle loi organique introduit une phase de consultations pour informer les parlementaires des grandes orientations et du cadre général de la préparation du projet de budget. Cela, à travers des réunions qui devront être tenues chaque année en juillet.
Au-delà de leur implication dans le processus d’élaboration du projet de budget, le Parlement devrait aussi veiller à la mise en place d’un système de gestion budgétaire axée sur les résultats. Surtout que la loi organique a introduit de nouveaux principes de gestion budgétaire, basés sur la performance. Patrick Delage, contrôleur budgétaire et comptable au ministère des affaires sociales de France, cite principalement la structuration du budget en programmes budgétaires. Des programmes qui sont en fait présentés en projets de performances exposant la stratégie du ministère concerné, les objectifs poursuivis ainsi que les résultats attendus. Sachant que le but de cette démarche est de «faire mieux avec autant de crédits que les années précédentes», a dit Patrick Delage.
Notons que 16 départements ministériels ont déjà structuré leur budget en programmes et ont élaboré un projet de performance qu’ils ont transmis au Parlement au cours de l’examen du projet de loi de finances de 2016. Parmi eux, celui de l’Education nationale et de la formation professionnelle. Si le projet du département de Rachid Benmokhtarest conforme aux règles définies par l’exécutif, il n’en demeure pas moins que certaines faiblesses ont été enregistrées. Patrick Delage pointe une discordance de chiffres. Alors que le programme relatif à l’obligation de scolarité garantissant équité et qualité absorbe 64,8% des crédits du ministère, celui sur l’éducation non formelle ne mobilise que 0,2%. Cet écart pousse Patrick Delage à s’interroger sur l’effectivité de ce programme. «Le budget consacré à l’éducation non formelle est presque anecdotique. Pourtant, ce programme est crucial pour le pays», a-t-il dit. Un clin d’œil aux députés, qui ont validé ce budget. Ainsi, Patrick Delage a appelé les députés à ne pas limiter leur tâche à un accusé de réception de ces projets de performance mais à exprimer leur avis et attentes.
Hajar Benezha
Rapports
Pour renforcer le rôle du Parlement dans la gouvernance financière, la loi organique des finances a prévu pas moins de 14 rapports que le gouvernement devra transmettre aux parlementaires pour enrichir le débat sur la loi de finances. Outre le rapport annuel de performance qui consolide les documents de chaque ministère, le gouvernement doit, entre autres, présenter un rapport sur les finances des collectivités territoriales. Sans oublier les rapports d’audit de performance qui doivent être préparés par l’IGF.