La nouvelle vision des voyages

L’industrie du tourisme

Saoudi El Amalki

« Le voyage c’est d’aller de soi à soi, en passant par les autres ! » disait un adage touareg. La nouvelle conception du tourisme, n’est-elle pas un peu celle de connaître les peuples et migrer dans le monde ? Jules Verne a fait le tour de la planète en 80 jours pour sublimer l’univers et en relater les exotismes. Le tourisme n’est plus le seul concept où on est en quête de la détente, sous les bains de soleil et les sensations voluptueuses de la mer. Sur ce plan, le Maroc que l’on avait conçu comme une destination balnéaire pouvant conquérir le globe par son climat clément et son eau cristalline, est littéralement terrassé par les concurrents du pourtour méditerranéen, rien qu’en matière de capacités litières, en Espagne, en Turquie, en Grèce, en Égypte ou encore en Chypre. On aura beau pondre les bâtisses somptueuses du trend hôtelier, on ne pourra  jamais se mesurer aux  Costa del Sol, Charm El-Cheikh, Athènes, Antalya ou encore Paphos. La vocation touristique du pays se situera dorénavant ailleurs, après les déboires subies en l’incapacité de tenir la dragée haute aux cadences phénoménales de ces merveilles. L’échec du plan Azur résonne toujours dans les six sites du royaume, depuis les déchéances des responsables en charge de cette stratégie chavirante. Seule, la station Taghazoute en est sortie indemne et encore si l’on sait qu’elle a mis plus de trois décennies pour voir le jour, non sans douleur, après le désistement successif de Dalla Baraka et Colony Capital, tout en passant sous silence la transformation de l’espace, en quasiment un projet immobilier, au lieu de se limiter exclusivement à une structure hôtelière, tel que définie initialement. On déplore que le secteur ait essuyé, durant des décades, une ribambelle de banqueroutes de ce genre, par la décrépitude de ses multiples décideurs, à la tête de l’une de ces composantes vitales de l’économie nationale. Pire encore, toutes les « Visions du tourisme » que les divers ministères et leurs binômes en l’occurrence les ONMT avaient mis sur selle en tant que feuilles de route pour l’instauration d’un réel décollage du secteur, ont tourné au vinaigre, en se retrouvant à présent avec le volume d’hébergement de 280 000 lits, alors que Las Palmas, destination canarienne d’Espagne, à titre indicatif, en ferait autant. On est donc face à un sérieux dilemme : d’une part notre train-train d’économie s’annonce prometteur dans sa diversité et d’autre part, notre train touristique se met en panne dans cet entrain économique en pleine éclosion. Visiblement, il y aura anguille sous roche, face à ce déphasage extravagant qui prête à la frustration collective d’une Nation résolument acquise aux vertus de la bonne hospitalité. Il faudra tout d’abord, reformuler la question de principe : serait-on toujours une destination à vocation de tourisme ? Si on veut vraiment maintenir ce label, on enchaînera avec une autre question tout aussi décisive que la première : quelle orientation serait-on en mesure de mettre en avant pour remodeler  un secteur en queue de poisson ? La traditionnelle formule Soleil/Mer semble être obsolète, du fait  qu’on ne pèse plus lourd sur le champ de bataille à l’accueil comme à l’aérien et au produit à proposer aux visiteurs. Il va falloir alors réinventer le fer de lance du secteur vers d’autres ingrédients attractifs qui émanent de nos spécificités intrinsèques dont regorge la civilisation marocaine et dont l’aura et le génie ne manquent point. Quelle recette donc au tourisme de demain ? Place aux jeunes créateurs, imprégnés de magie digitale et de souci inventif, en phase des changements multiformes, sont donc en mesure d’opérer toutes ces mutations. Mais, avant tout, cela devra reposer sur la volonté, le civisme, la compétence, surtout le sérieux que le Souverain n’a jamais cessé de faire prévaloir !

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