Législatives au Salvador : Nayib Bukele crie victoire

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

Accusé d’autoritarisme, par ses détracteurs, mais très critique envers les partis traditionnels qui ont été discrédités par de nombreuses affaires de corruption lors de leur passage au pouvoir, Nayib Bukele, 39 ans, qui préside aux destinées du Salvador depuis 2019 et qui affiche sa ferme volonté de lutter contre l’insécurité et le crime organisé, bénéficie d’une très grande popularité auprès de ses compatriotes.

Aussi, a-t-il de très fortes chances de contrôler le Parlement unicaméral du pays. C’est, en tous cas, ce que révèlent les premiers résultats des élections législatives qui se sont déroulées, ce dimanche, pour le choix des 84 députés du parlement monocaméral du pays, 210 maires et 20 députés du Parlement Centraméricain (Parlacen, une assemblée d’intégration régionale) représentant 10 formations politiques.

Selon les premiers décomptes partiels publiés par le Tribunal Electoral Suprême (TSE), il semblerait que le parti « Nuevas Ideas » fondé par Nayib Bukele et qui a participé, pour la première, fois à un scrutin législatif, et le parti de la Grande Alliance Nationale (Gana, centre-droit) qui avait présenté ce dernier à l’élection présidentielle de 2019, auraient raflé plus de 67% des suffrages. Ces deux formations politiques auraient donc toutes les chances de renvoyer, aux dernières places, les deux partis d’opposition qui dominaient la vie politique du pays depuis la signature des accords de paix qui mirent fin à douze années de guerre civile ; à savoir, à droite, l’Alliance Républicaine Nationaliste (Arena) et, à gauche, le Front Farabundo Marti de Libération Nationale (FMLN, ex-guérilla marxiste).

Si cette tendance se confirme, à l’issue des résultats définitifs qui ne devraient être connus que dans quinze jours alors même que rien, pour l’heure, n’indique qu’il pourrait en être autrement, le président Nayib Bukele  va atteindre son objectif et consolider son pouvoir en contrôlant, tout au long des trois années qui lui restent pour boucler son quinquennat, cette même assemblée qu’il fut contraint d’affronter pendant les deux premières années de son mandat. En disposant, ainsi, d’un pouvoir législatif tout acquis à sa cause, le jeune président salvadorien va donc pouvoir faire nommer les juges de la Cour Suprême et du Parquet Général ; deux institutions qui, jusqu’alors, lui tenaient tête.

Autant dire qu’après une campagne électorale marquée par ces violences qui se sont soldées par la mort de deux militants du FMLN et un scrutin qui s’est déroulé, dans le calme, sous l’œil vigilant de quelques 40.000 membres des forces de sécurité et de plusieurs observateurs de l’Organisation des Etats américains, le jeune chef de l’Etat avait toutes les raisons de jubiler et de crier « victoire » dès la fermeture des bureaux de vote et l’annonce des premiers résultats partiels par ce même Tribunal Electoral Suprême qu’il avait accusé sur Twitter de « corruption et d’incompétence ».

Enfin, si, comme l’a dit l’analyste José Miguel Vivanco, le directeur pour les Amériques de l’organisation Human Rights Watch (HRW), « jusqu’ici, les attaques constantes du président contre l’Etat de droit ont été balancées par des contre-pouvoirs efficaces : la Cour constitutionnelle, une presse indépendante qui ne se laisse pas intimider et l’Assemblée nationale », avec une majorité parlementaire des deux tiers, Nayib Bukele, le jeune président du Salvador, va pouvoir, désormais, choisir à sa guise la composition de la Cour Suprême et du Tribunal électoral et, peut-être même, se tailler une Constitution sur mesure qui va lui permettre de se présenter à la présidentielle de 2024.

Alors, attendons pour voir…

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