L’Irak en pleine paralysie institutionnelle

Toujours privé de nouveau président

Trois tentatives, trois échecs et aucune sortie de l’impasse en vue: privé de quorum en raison du boycott d’une coalition chiite, le Parlement irakien a de nouveau échoué à élire le président de la République mercredi, accentuant la paralysie institutionnelle.

Cela fait près de six mois que les Irakiens ont élu leurs députés, lors d’élections législatives anticipées remportées par l’impétueux mais incontournable leader chiite Moqtada Sadr. Depuis, rien.
Le président — dont le poste est largement honorifique — n’a pas été élu, pas plus que le nouveau Premier ministre n’a été désigné pour remplacer l’actuel titulaire, Moustafa al-Kazimi. L’actuel chef de l’Etat, Barham Saleh est toujours en fonctions et candidat à sa succession.

Or, les parlementaires doivent d’abord élire le chef de l’Etat pour que celui-ci nomme à son tour le chef du gouvernement, poste qui fait l’objet d’interminables tractations entre partis.
Mercredi, pour la troisième fois en moins de deux mois — le 7 février et le 26 mars –, le boycott d’une coalition chiite pro-Iran a privé l’Assemblée du quorum des deux-tiers requis pour que l’élection du président de la République puisse avoir lieu.

« L’Assemblée a ajourné sa séance jusqu’à nouvel ordre », a indiqué le service de presse du Parlement, quelques heures seulement après que le président de l’Assemblée a déclaré la séance ouverte. Selon une source parlementaire, seuls 178 députés sur 329 étaient présents dans l’hémicycle.
Aucune nouvelle date pour une prochaine tentative n’a été divulguée. Mais la Cour fédérale, plus haute instance judiciaire d’Irak, a donné jusqu’au 6 avril aux députés pour doter le pays d’un chef de l’Etat. Ce délai passé, la Constitution est muette sur la prochaine étape.
« Nous pourrions arriver à un point où de nouvelles élections (législatives) seraient nécessaires pour sortir de l’impasse », explique à l’AFP le politologue Hamza Haddad.

Mais l’échec du vote met surtout en lumière les profonds clivages qui traversent le chiisme politique, clivages qui retardent infiniment le processus législatif et exécutif. Le budget de l’année 2022 n’a, par exemple, toujours pas été adopté par les élus.
Ce sont en fait deux projets qui s’opposent dans l’hémicycle et en dehors.
D’un côté, Moqtada Sadr veut un « gouvernement de majorité » soutenu par des partis sunnites et le Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Il dit rassembler un total de 155 députés et veut imposer ses candidats aux postes de président et de Premier ministre.

De l’autre côté, le Cadre de coordination, un alliage de partis chiites pro-Iran, ne l’entend pas de cette oreille. Il veut poursuivre la tradition irakienne du « gouvernement de consensus » en rassemblant tous les partis chiites. C’est aussi la raison pour laquelle le Cadre avait boycotté les deux séances précédentes.
« Il est préférable d’être dans une impasse politique plutôt que d’être d’accord avec vous et de partager le gâteau avec vous », s’est échauffé sur Twitter Moqtada Sadr à l’adresse du Cadre de coordination, tout en brocardant le « gouvernement de consensus ».
Pilier du Cadre de coordination, l’ancien Premier ministre, Nouri al-Maliki, lui a répondu avoir préparé une « initiative » pour sortir de la crise, appelant au « dialogue ».

Parmi les 40 candidats à la présidence se distinguent le sortant Barham Saleh, président de l’Irak depuis 2018 et issu de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), et Rebar Ahmed du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Le candidat victorieux doit obtenir au moins deux-tiers des voix des députés.
L’alliance autour de Moqtada Sadr, baptisée « Sauvetage de la patrie », soutient Rebar Ahmed.
Prévoyant la suite, le leader chiite veut ensuite confier le poste de Premier ministre à son cousin et beau-frère Jaafar al-Sadr, actuel ambassadeur d’Irak à Londres. Pour entrer en fonctions, ce dernier devra obtenir la majorité absolue lors d’un vote de confiance au Parlement.

Étiquettes

Related posts

Top