Quel espace d’expression pour la nouvelle scène musicale?

La jeune scène artistique marocaine bouillonne, évolue, se diversifie… mais les fonds nécessaires pour faire éclore ces talents ne suit pas toujours. Preuve en est que cette année, le Tremplin et le festival L’Boulevard, qui permettent depuis 16 ans de révéler et d’accompagner les jeunes talents, n’a pas eu lieu cette année. L’évènement, qui était vivement attendu par les jeunes talents, a été finalement reporté sine die. Ses organisateurs évoquent le manque de sponsors et de financements. Toutefois, l’association Eac L’Boulevart reste optimiste pour son tremplin et son festival, même si pour Hicham Abkari, directeur général du théâtre Mohamed VI, «le festival L’Boulevard est victime de son succès» et de son évolution. L’avenir de la jeune scène artistique marocaine se pose avec acuité. Des initiatives, à l’instar de l’Uzine créée en 2015, visent à favoriser l’échange et la rencontre entre les jeunes créatifs et les amateurs et pallier ce manque.

Hamza Lyoubi, coordinateur de projets pour la fondation Touria et Abdelaziz Tazi

Al Bayane : En tant que responsable administratif de l’Usine, pouvez-vous nous parler de cet établissement?

Hamza Lyoubi : l’Uzine est avant tout un espace de création et d’échange entre les artistes et le public. C’est un lieu de rencontre entre les créatifs de tout genre. Nous avons à notre disposition un local administratif que nous avons réaménagé. Nous l’avons découpé en plusieurs disciplines pour avoir un aspect pluridisciplinaire. C’est un espace d’art et de création, un espace de travail où toutes les disciplines sont confondues. L’Uzine est aussi un espace de transmission : ateliers, master-class, stages… et de diffusion : cinéma, théâtre, danse,… Nous avons un peu de tout.

Qui anime les différentes disciplines ?

Pour ce qui est des ateliers, des master-class et stages, nous avons des professionnels pour effectuer ces tâches. Dans l’absolu, ce sont des gens qui ont déjà fait leurs preuves et qui maitrisent bien leurs domaines. En effet, la démarche se fait dans les deux sens. Il y’a une partie qui est programmée par l’établissement, c’est-à-dire que c’est nous qui prenons l’initiative de ramener des gens pour animer ce genre de formations. Mais cela se fait aussi dans le sens inverse. Il y’a des gens qui viennent nous voir pour solliciter les lieux ou des subventions ou simplement pour demander de se produire à l’Uzine, sachant qu’il n’ya pas un million de centres où les jeunes peuvent se produire.

L’Uzine prévoit-elle de lancer un événement comme «L’boulevard» qui a commencé avec le centre de musiques actuelles Boultek ?

De la taille du boulevard non, sauf si nous avons les moyens ! Parce qu’il faut être honnête, L’boulevard c’est le Coc, les Abattoirs. Ce sont des centaines de milliers de festivaliers qui viennent à cette manifestation culturelle. Nous sommes plutôt dans une démarche «Underground», mais sans l’être vraiment ! Nous donnons la priorité aux artistes qui ont réellement besoin de ce qu’on leur offre.  Je dirais qu’à l’Uzine, nous donnons plus de priorité aux amateurs qui viennent répéter et aux habitués de cet établissement qu’aux gens qui ont déjà un nom sur la scène artistique.

Le concept de l’Uzine changera-t-il au cours des années à venir ? Peut-être se dirigera t-il vers les professionnels et moins vers les amateurs ?

J’espère que le concept évoluera, et je tiens à souligner que du moment que nous sommes à la direction de ce lieu, on s’en porte garant. Ça ne peut pas évoluer autrement étant donné que ça a été lancé dans un sens particulier.

rachidtaha_lboulevard2013-ph-ouvrertureIl y’a des festivals qui n’avaient pas besoin de gros budgets pour avoir lieu. Aujourd’hui, ils sont absents de la scène à cause du financement. Comment voyez-vous cette problématique ?

L’boulevard est le seul festival gratuit, qui propose à des centaines de festivaliers d’être devant la scène et de voir des concerts en live animés par des artistes de renommée. Les projets culturels, aussi petits qu’ils soient, ont besoin de financement. Et je dirais que cela vient même combler un vide laissé par le ministère de l’éducation et le ministère de la culture.

Les besoins financiers du Boulevard sont légitimes. Il est vrai que l’argent pervertit les démarches, mais il faut savoir aussi que sans argent nous ne pouvons pas faire tourner un immeuble comme l’Uzine ni un festival comme L’boulevard ou encore moins le Boultek.

Nous nous inspirons du Boulevard parce que L’Boulevard durant des années a été une grande réussite. Mais L’Uzine aura toujours les mêmes valeurs car le but dernière ce projet est de créer un lieu culturel au cœur d’Aïn Sebaâ. Un lieu de répétition et de rencontre entre le grand public et les artistes confirmés. Tant que ces deux missions sont d’actualité, et tant qu’il n’y a pas de nombreux projets comme l’Uzine à Casablanca, notre démarche sera toujours la même.

L’Uzine lancera t-elle un festival bientôt ?

Pour l’instant non, mais si nous avons les moyens ce sera avec grand plaisir. Par contre, nous avons un nouveau projet qui porte le nom de «Aïn Sebaâ K-YBD3» à l’Uzine. C’est un événement culturel offrant au public du 26 novembre au 18 décembre 2016 un autre regard sur le quartier, à travers des expositions, des projections, des rencontres, de la bande dessinée, du graff, de la photographie…

Omayma Khtib

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