Attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI
Si ce dimanche, à partir de 7 h (0 h GMT), 9,7 millions d’électeurs ont été appelés aux urnes dans 23.789 bureaux de vote afin d’élire les 125 députés de l’Assemblée nationale cambodgienne, il n’est nul besoin d’attendre la fin du scrutin, le dépouillement des bulletins et la fermeture des bureaux de vote, prévue le jour-même à 15 h, pour connaître les premières estimations de cette consultation avant la proclamation officielle des résultats le 9 Août prochain puisqu’en l’absence de toute opposition crédible après l’exclusion du principal parti hostile au pouvoir, les conclusions de cette élection sont connues d’avance.
Au terme de cette élection, « profondément inquiétante », selon les propos d’une coalition de 17 ONG internationales rapportés par un communiqué diffusé ce samedi, et marquée par « un manque notable de transparence, d’équité et d’inclusion » d’après des organisations de défense des droits de l’Homme, dont la FIDH et le Réseau asiatique pour des élections libres (Anfrel), à laquelle participent le Parti du peuple cambodgien (PPC) du Premier ministre Hun Sen et le Funcinpec, dirigé par le prince Norodom Chakravuth, il est donc quasiment certain que c’est le Parti du Peuple cambodgien (PPC) du Premier ministre Hun Sen, 70 ans, qui dirige le pays d’une main de fer depuis 38 ans, qui va rafler tous les suffrages, comme en 2018, et permettre au vieux dirigeant de passer, d’ici 3 à 4 semaines, le flambeau à son fils aîné, le général quatre étoiles Hun Manet, 45 ans, formé aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.
Autant dire qu’après avoir éliminé, en amont de ce scrutin, tous ses adversaires, dont le principal mouvement d’opposition, le Parti de la Bougie, qui avait été écarté en mai dernier, par la Commission électorale, pour « des motifs techniques » qui ne sont rien d’autre qu’une atteinte au pluralisme politique, Hun Sen, qui est à la tête du Cambodge depuis 1985 mais qui n’est toujours pas prêt à se dessaisir réellement du pouvoir puisqu’il a prévenu qu’il continuerait à dominer la politique cambodgienne même après son départ, va donc se contenter d’opérer une transition « formelle » en passant, de manière officielle, le relais à son fils.
Après avoir déclaré, ce vendredi, lors de son dernier rassemblement de campagne, que c’est « un jour de victoire », Hun Manet qui est, pour la première fois, candidat sur une liste du PPC à Phnom Penh, première étape nécessaire pour devenir Premier ministre, et qui s’adressait à une marée de supporters, sous un portrait de son père, a exhorté ses compatriotes à voter pour le PPC qui est le seul « capable de diriger le Cambodge » et promis de faire retrouver, au pays, « la fierté de l’empire khmer ».
En considérant, enfin, que, dès son arrivée au pouvoir, le vieux Premier ministre a utilisé le système judiciaire pour museler ses adversaires qu’il a jetés, par dizaines, en prison et faire reculer les libertés fondamentales, il n’est donc point étonnant qu’après la fermeture des bureaux de vote, le parti du Peuple Cambodgien revendique la victoire.
Quelles seront les suites de ce scrutin quand on sait que la politique répressive de Hun Sen n’a fait que se durcir au fil du temps, que ses opposants sont soit en prison soit en exil et que, dans le régime dynastique qu’il a mis en place, c’est toujours lui qui tiendra réellement les rênes du pays même quand il les aura officiellement cédées à son fils ?