Attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi
«L’Espagne a perdu, les indépendantistes ont gagné et le PSOE est en train de disparaître !». C’est par de tels propos que le leader du Parti populaire (droite conservatrice), Alberto Nuñez Feijoo, a accueilli l’accord d’amnistie qui permet, désormais, à son rival socialiste, Pedro Sanchez, de se maintenir au pouvoir pour quatre années supplémentaires grâce à l’appui des indépendantistes catalans.
Mais cette loi d’amnistie, qui a été négociée avec le leader indépendantiste catalan, Carles Puigdemont, à Bruxelles, où ce dernier avait trouvé refuge, et qui permettra, après sa «validation» par les Cortès, à toutes les personnes qui étaient sous le coup de décisions ou de procédures judiciaires pour leur implication dans le référendum controversé de 2017, d’échapper à la justice, a suscité bien des remous au sein de la classe politique espagnole tant et si bien que les multiples manifestations de dénonciation de cet accord qui ont vu le jour dans diverses villes du pays ont été émaillées d’affrontements, parfois violents, entre manifestants et forces de l’ordre qui ont fait plusieurs blessés des deux côtés.
Lundi soir, des milliers de manifestants s’étaient retrouvés devant les différents bureaux du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) à Barcelone, Valence et Madrid où ils étaient tellement nombreux que la police fut contrainte de recourir aux bombes lacrymogènes pour les disperser.
Lors de leur retour, dans la nuit de mardi à mercredi, devant le siège du PSOE de la capitale, les violences étaient telles qu’un bilan provisoire de la préfecture a fait état de l’arrestation de 6 personnes pour «troubles à l’ordre public» et que le service médical d’urgence de Madrid a indiqué, à l’AFP, que parmi les 39 personnes légèrement blessées figurent 29 policiers.
Un autre rassemblement, tenu à l’appel de plusieurs groupes de la droite nationaliste, avait regroupé quelques 7.000 manifestants. Parmi ces derniers, certains avaient tenté de se rapprocher de la Chambre des députés mais en avaient été empêchés par un important cordon policier.
Ce rassemblement était soutenu par le parti Vox, extrême-droite, dont les militants, qui brandissaient des pancartes sur lesquelles pouvait lire «Non à l’amnistie !», «L’Espagne ne paie pas les traîtres» et même «Pedro Sanchez en prison !» étaient encadrés par Pepa Millan, le chef de son groupe parlementaire qui avait affirmé que sa formation était venue manifester «pacifiquement».
Après avoir participé à la manifestation qui avait eu lieu lundi à Madrid, Santiago Abascal, le leader de Vox, a appelé la police «à ne pas respecter des ordres illégaux» et à s’abstenir d’utiliser des bombes lacrymogènes avant de renouveler son appel aux militants du parti pour une «mobilisation permanente» contre le «scandale» du projet d’amnistie.
De son côté, tout en condamnant les débordements qui ont eu lieu lors de ces manifestations, Alberto Núñez Feijóo, le chef du PP, le premier parti de droite, qui avait organisé, le même jour, à Malga, au sud de l’Espagne, sa propre manifestation contre le projet d’amnistie à laquelle ont participé plus de 20.000 sympathisants, a appelé ces derniers à se mobiliser, à nouveau ce dimanche, contre le «scandale» du projet d’amnistie qui n’a pas été « négociée au nom de l’Espagne » alors même que «tous les Espagnols devraient être autorisés à voter sur cette question, mais au nom de Pedro Sanchez».
Ce bras-de-fer, qui divise profondément la classe politique espagnole, est-il là pour durer ?
Tout porte à le croire mais attendons pour voir…