Halte aux approches technicistes et aux tendances régressives

de tous les acteurs, notamment ses habitants, qui sont les véritables concernés pour l’élaboration de toute démarche qui se veut démocratique. Ainsi, la rencontre organisée par le groupe de réflexion du PPS, jeudi dernier, autour de la gouvernance dans la capitale économique de la ville a été un moment opportun pour débattre du présent et de l’avenir de la ville, dans le dessein de préparer un mémorandum du parti qui sera présenté ultérieurement aux autorités compétentes.

Casablanca, cité de tous les maux du monde, nécessite, en fait,  un nouveau raisonnement pour s’atteler à ses problèmes, ont souligné les militants du PPS. Certes, la volonté et la bonne foi des autorités publiques existent, comme en témoigne la réunion du Wali de Casablanca, Khalid Safir, avec les représentants des partis politiques,  tenue récemment et à laquelle ont pris part Abderrahim Bensar,  secrétaire régional du PPS à Casablanca, et Ahmed Boukioud, membre du bureau régional.

A première vue,  le document présenté par la Wilaya, qui est d’ailleurs l’œuvre d’un cabinet de la place, fait l’impasse sur une variable déterminante dans la construction des politiques de la ville, en l’occurrence le citoyen. «Le texte ne contient aucune indication concernant l’implication de la population casablancaise dans ce projet», a noté  Bensar en substance. Pour l’intervenant «la mise en place d’un bloc des acteurs politiques et civils, abstraction faite de leur positionnement dans le système concret d’action, est un préalable indispensable pour s’attaquer aux véritables problèmes de Casablanca». Le membre du BP du PPS a en outre évoqué l’absence d’un agenda précis où les objectifs sont agencés en fonction des priorités. A cela s’ajoute également une pléthore des objectifs qui réduit à néant les efforts déployés dans ce sens. Or, la raison recommande, après d’avoir effectué un diagnostic,  de fixer 4 ou 5 objectifs SMART, a-t-il laissé entendre. Et d’ajouter que le citoyen doit être placé au cœur de la problématique du développement local. Autrement dit, la citoyenneté s’est ainsi imposée, avec l’avènement de la modernité et du projet démocratique, comme la forme de médiation privilégiée entre la société et l’État, a-t-il précisé.

La dimension  politique, la notion introuvable !

De son côté Ahmed Zaki, membre du BP du parti, a considéré que le problème de Casablanca est tributaire des «règles du jeu électoral». Ceci dit, la falsification de la volonté populaire a contribué à l’émergence de certains lobbys au service de leurs propres intérêts. D’où le divorce consommé entre les citoyens et la politique. Chiffre à l’appui, seulement 15 ou 20% de population casablancaise participent aux échéances électorales. «Il est temps de donner libre cours à l’expression démocratique réelle et réconcilier les citoyens avec la sphère publique», a-t-il jugé.  Ahmed Zaki a même a préconisé l’institutionnalisation d’un referendum local pour permettre aux citoyens de décider, par leur vote, de la mise en œuvre ou non d’un projet…

Par ailleurs, Abdelouahed Souhail, également membre du BP du PPS a mis en avant une condition indispensable pour qu’on puisse élaborer une stratégie en bon et due forme. En premier lieu, il faut se mettre d’accord sur le diagnostic pour que les partis politiques soient en mesure de faire des prépositions et définir des objectifs réalisables, a-t-il indiqué.  Des objectifs qui s’expriment les attentes des habitants et favoriser les solutions innovantes.

Rien que pour la question du patrimoine, Souhail a fait savoir qu’il n’existe aucun document faisant état du patrimoine de la ville. Cela débouche sur la question de la gouvernance. Pire ! Aucun élu de la ville ne connait véritablement le patrimoine du Casablanca. Ce qui est encore plus grave, a-t-il martelé.

Autre point non moins important relevé par lui, c’est que Casablanca, par ses infrastructures et sa logistique  assume une charge lourde par rapport à d’autres villes du royaume et contribue pleinement au développement économique du pays, mais en contrepartie, elle ne bénéficie point d’un soutien financier suffisant au prorata de sa contribution. Pour parer à une telle défaillance, Souhail plaide pour revoir les rapports entre l’Etat et la ville.

Sur un autre registre, Ahmed Boukioud a évoqué le modèle de l’unité de la ville qui a déjà trouvé ses limites, appelant ainsi à trouver un nouveau modèle de gestion pour incorporer des objectifs de proximité et trouver des alternatives au régime de gestion délégué qui était bien voué à l’échec. Un autre facteur de blocage de développement de la ville réside, selon lui,  dans la multiplicité des intervenants (Conseil préfectoral, Conseil communal, Conseil régional…) qui entravent la mise en place d’une  bonne gouvernance.

La nécessité de la redevabilité sociale

Pour sa part, Abdelahed El Fassi Fihri a axé son intervention sur l´absence de la dimension sociale dans les projets de développement de la métropole. A l´instar des autres intervenants, il a mis l´accent sur l´importance de la démocratie participative, tout en mettant en garde contre les approches uniformes, appelant même à doter Casablanca d´un statut particulier et la mise en place d´un pôle social au niveau de la région afin de réduire l´exclusion et la précarisation. Le but escompté est de créer  synergies entre les institutions intervenantes pour éviter tout chevauchement entre  les logiques d’action.  En d’autres termes, les problèmes de la cité blanche ne peuvent se résoudre que par la mise en place d´une démarche intégrée et adaptée aux spécificités de la ville.

Rachida Tahiri et Nouzha Skalli, respectivement membres du BP et du CC, ont insisté sur l´intégration de la dimension sociale dans les politiques publiques des villes. «La finalité de la ville est de procurer un minimum de confort social», a déclaré l´ancienne ministre du développement social, de la famille et de la solidarité.

En critiquant vertement  le mode de scrutin actuel qui bloque la composition d´une majorité homogène, Skalli a jugé, elle aussi, que le modèle de l´unité de la ville a contribué a la concentration du pouvoir entre les mains d´une majorité hétéroclite, incapable d´assumer sa responsabilité en matière de gestion en réduisant à néant le rôle des arrondissements. Idem pour Rachida Tahiri, qui a souligné, pour sa part, la nécessité d´un diagnostic global, voire exhaustif, prenant en considération les aspects politique, social et juridique.
Quant à Aicha Lablaq, fraîchement promue nouveau membre du BP du PPS, elle a attiré l’attention sur le concept de la «redevabilité sociale»,  qui est «un processus proactif par lequel des fonctionnaires, élus… divulguent et justifient leurs plans d’action, leur comportement et leurs résultats, et sont évalués en conséquence». Comme quoi, la démocratie participative est un processus irréversible. D’ailleurs, les dispositions de la Constitution sont on ne peut plus clairs. Et toute démarche contraire visant à renforcer les pouvoirs d’une institution administrative quelconque serait une dérive, voire une régression, par rapport à la dynamique démocratique que connait le pays, a conclu Aicha Lablaq.

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