Ismail Alaoui: «C’est le destin de la nation qui m’importe le plus»

Présentation et dédicace de son ouvrage à la bibliothèque Sbihyia à Salé

Après sa présentation en Juillet dernier à la Bibliothèque nationale du Royaume, l’ouvrage de Moulay Ismail Alaoui «la lutte démocratique, défis du passé et interrogations du présent», dont la première édition est épuisée, a été revisité lors d’une rencontre organisée, mercredi soir à la Bibliothèque scientifique Sbihyia à Salé avec la participation de l’auteur et de son «complice», le philosophe Abdellah El Belghiti Alaoui, directeur du Centre des Temps modernes et rédacteur en chef de la revue Al Azmina Al Haditha.

Réagissant aux questions de l’auditoire sur l’intérêt de l’ouvrage, qui est loin d’être une autobiographie, l’auteur a indiqué que tout au long de l’entretien, réalisé sur une période de trois ans, il cherchait «sans grand succès d’ailleurs une réponse aux questions qui me préoccupent tout le temps au sujet du destin de l’entité marocaine durant toute son histoire et en particulier, en cette période très mouvementée dans le monde arabe».

En donnant à ce travail, une fois terminé le titre de «la lutte démocratique au Maroc, défis du passé et interrogations du présent», l’auteur a voulu inscrire son travail dans une logique bien précise :  le salut du Maroc réside dans la marche du pays vers la démocratie, par tous les moyens possible dans le cadre du combat à mener pour renforcer l’unité, l’harmonie et l’homogénéité de cette nation et défendre son intégrité territoriale, a précisé le président du Conseil de la présidence du Parti du progrès et du socialisme, qui était l’invité de l’Association Salalmoustaqbal.

S’exprimant devant un public averti, Ismail Alaoui a affirmé que le Maroc a connu durant les 20 dernières années une croissance économique sans précédent (le PIB a doublé et le parc auto a quadruplé par exemple), qui n’a fait qu’accentuer malheureusement le fossé qui sépare pauvres et riches et exacerber les tensions, comme c’est le cas dans les régions du Rif, Zagoura, Tinghir, Moyen Atlas et Sidi Ifni.

De tels évènements montrent que les disparités sociales sont en train de s’aggraver et les foyers de tensions se multiplient. Ils constituent un véritable danger pour l’unité du pays, a-t-il estimé, précisant qu’il est peut être temps d’agir avant qu’il ne soit tard pour trouver des solutions à ce grand problème, à travers le renforcement de l’Etat de Droit et la marche du pays vers davantage de respect des droits de l’Homme, de la justice sociale et spatiale, de liberté et d’égalité entre les régions et les personnes.

Les foyers de tension constituent une véritable menace qu’il faut prendre au sérieux, car les ennemis de la nation n’attendent que l’occasion propice pour diviser le pays comme ils le font actuellement dans des pays arabes, a souligné Moulay Ismail Alaoui. Pour lui, le dernier discours royal, prononcé à l’ouverture de l’actuelle session parlementaire exprime dans une certaine mesure les mêmes préoccupations, en appelant notamment à la révision du modèle de développement économique marocain à bout de souffle et en avançant d’autres pistes pour consolider le tissu social marocain.

La tâche n’est pas facile, car les choses échappent de plus en plus au contrôle de l’Etat et de la société, qui voient leur rôle réduit devant l’avancée vertigineuse des médias à l’heure de la prolifération des réseaux sociaux et des nouvelles technologies de l’information, qui sont totalement monopolisés par le système capitaliste dominant et de la mondialisation rampante. De tels nouveaux moyens de communication ne cherchent en dernier ressort qu’à façonner les esprits pour que «tous les téléspectateurs deviennent par exemple des consommateurs de Coca cola», pour paraphraser un des directeurs de la chaine française TF1, a affirmé Moulay Ismail, qui n’a pas caché sa déception de voir par exemple l’actuel président français supprimer tout simplement l’impôt sur la fortune pour «remercier les fortunés pour leur soutien».

C’est pourquoi, il est impératif de poursuivre la lutte démocratique par tous les moyens légaux disponibles pour permettre à la communauté marocaine de relever en rangs unis et soudés tous les défis qu’elle affronte pour le bien des générations futures, a-t-il déclaré, rappelant que le pays dispose pour ce faire de tous les atouts dont en premier, d’authentiques partis politiques et des élites citoyennes qui œuvrent en toute sincérité pour le bien du pays, malgré les obstacles dressés par ceux qui cherchent à préserver leurs avantages en défendant le statut quo.

Auparavant, Abdellah Belghiti a donné plus de détails sur la personnalité de l’auteur et les événements historiques marquants intervenus dans le pays ainsi que sur les objectifs de la pratique politique concernant, notamment l’organisation de la vie collective.

L’ouvrage soulève aussi des questions sur le rôle des élites dans l’histoire du pays, tout en soulignant qu’il ne peut y avoir de développement inclusif sans renforcement de l’Etat de Droit et la modernisation de l’Etat, telle que énoncée par Emmanuel Kant, selon lequel la modernisation serait l’art des peuples de se gouverner par le biais de constitutions qu’ils se choisissent librement.

Selon Belghiti Alaoui, le dernier discours royal à l’ouverture de la session parlementaire est venu confirmer l’actualité de l’ouvrage de Moulay Ismail Alaoui en appelant à l’adoption d’un nouveau modèle de développement, à la concrétisation de la régionalisation et à l’ouverture de chantiers aux jeunes.

L’ouvrage a aussi le mérite de revenir en détail sur la genèse de la pensée socialiste au Maroc, la création du PCM et le sort de la pensée marxiste, en tant que produit de la modernité occidentale et héritage de la philosophie allemande, de l’économie politique anglaise et de la pensée socialiste française.

L’auteur démontre dans cet ouvrage que le marxisme se distingue par l’analyse pertinente qu’il fait du capitalisme et des différents modes de production dans l’histoire de l’humanité et qu’il a été introduit au Maroc dans le but de le moderniser sur les plans politique, économique, social et intellectuel.

Mieux encore, le PCM avait jeté les bases depuis les années 60 de la révolution nationale démocratique, dont les tâches sont toujours d’actualité, selon Belghiti Alaoui.

Pour sa part, le chercheur Ali Angame, modérateur de la rencontre, est revenu sur les qualités humaines et morales de l’auteur, soulignant qu’il s’agit d’un homme intègre et honnête dont la crédibilité est reconnue par tous.

Il a également évoqué les particularités de l’ouvrage qui développe un certain nombre de concepts et de notions qui se soutiennent et se complètent à l’instar de la Koutla historique, différente de la Koutla politique, de l’économie solidaire, des coalitions, de la révolution nationale démocratique, de la révolution culturelle et du phénomène de prolifération des partis politiques, etc…

M’Barek Tafsi

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