«La littérature, une ouverture sur le monde…»

Rencontre avec Vincent Engel, fondateur des Editions Edern

Propos recueils par Mohamed Nait Youssef

La littérature, les littératures tissent les liens, et construisent les ponts entre les cultures et les peuples. En marge du SIEL, nous avons rencontré Vincent Engel, fondateur de la maison d’édition belge Edern, pour qui les mots n’ont pas de frontières. Dans cette entrevue, l’écrivain et dramaturge belge francophone nous éclaire sur les liens littéraires unissant la Belgique et le Maroc, grâce au soutien de la délégation Wallonie-Bruxelles. Entre découverte d’auteurs belgo-marocains comme Sofia Douieb ou encore Jean Zaganiaris et réflexion sur l’avenir des traductions, il partage sa vision d’une littérature francophone ouverte sur le monde. Un plaidoyer pour des ponts culturels plus dynamiques, où la langue française devient le vecteur d’imaginaires multiples. Rencontre avec un passeur de mots convaincu que les livres peuvent rapprocher les rives.

Al Bayane : Pouvez-vous nous éclairer sur cette collaboration belgo-marocaine, en particulier avec la Wallonie, et sur ce stand dédié à la promotion d’écrivains ? Comment mieux faire connaître ces auteurs belgo-marocains auprès du public marocain, réputé pour son appétit littéraire ?

Vincent Engel : Je suis ici en tant qu’éditeur d’une nouvelle maison d’édition francophone dans laquelle nous publions des auteurs tunisiens, marocains et de toute la francophonie. Pour moi, il était indispensable de venir à Rabat. Nous avons eu la possibilité de le faire grâce à la délégation Wallonie-Bruxelles qui nous a invités et a pris en charge le stand, car je pense qu’il existe des liens très forts entre le Maroc et la Belgique. La communauté marocaine en Belgique est la plus importante en termes de communauté non belge. Nous avons donc des liens historiques qui remontent très loin.

Est-ce votre première participation au SIEL ?

Non. Nous étions présents l’an dernier, mais avec très peu de titres. Cette année, nous consolidons notre présence.

Ces derniers jours, le SIEL a su attirer un public varié, allant des jeunes aux moins jeunes, tous venus découvrir avec passion les nouveautés littéraires du monde entier. Quelles sont les grandes nouveautés de cette édition ? Et peut-on y retrouver des auteurs belgo-marocains parmi les invités ?

Je pense que pour le public marocain, le fait qu’un auteur marocain soit publié en Belgique est un signe qu’il s’agit d’une œuvre intéressante et importante. Je ne dis pas que c’est indispensable, évidemment, mais si cela a séduit un éditeur étranger, c’est qu’il y a sans doute quelque chose de plus dans ce livre qui en vaut la peine. Nous avons Jean Zaganiaris, plusieurs autres auteurs, et cette liste ne fera que s’allonger.

Envisagez-vous des débats pour le SIEL 2026 afin de rendre votre espace plus vivant, visible et dynamique ?

Pour 2026, nous réfléchissons avec la délégation à organiser des débats pour animer davantage le stand, ou à des rencontres professionnelles avec des acteurs locaux, moins visibles mais tout aussi stratégiques.

Vous étiez membre du jury du prix de la Mamounia. Quel regard portez-vous sur la littérature marocaine ?

Je connais la littérature marocaine depuis quelque temps, car j’ai eu la chance de faire partie du jury du prix de la Mamounia. Bien sûr, cela ne représente qu’une partie de la littérature marocaine. Je ne peux juger que de la littérature en langue française. Ne maîtrisant pas l’arabe, je ne peux pas lire la littérature en langue arabe. Mais il y a vraiment une très grande richesse entre les deux. Je pense que la littérature est une ouverture sur le monde. Et la langue française n’est pas la langue de Paris. S’il existe des variantes du français, avec évidemment une structure commune qui permet de se comprendre, il y a non seulement des particularités dans l’expression, mais surtout dans le vécu, les univers et l’imaginaire. Je pense que la littérature sert à cela. Elle permet de rencontrer d’autres réalités et de comprendre que ce que nous considérons comme notre réalité n’est pas universel. Comme disait Shakespeare : « Il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre, Horatio, que n’en rêve ta philosophie. »

Concernant les traductions, avez-vous des projets à venir ?

La traduction est une autre étape, car la difficulté réside dans son coût. Une traduction coûte très cher si l’on veut qu’elle soit bien faite, et ce sont des coûts que les petites structures éditoriales ne peuvent pas facilement supporter. Il faut trouver des solutions. En tout cas, si nous travaillons avec des auteurs francophones au Maroc, nous n’avons pas ce problème. Mais il serait effectivement intéressant de trouver des moyens pour traduire en arabe ces auteurs, qu’il s’agisse d’auteurs marocains francophones ou d’auteurs de toute la francophonie.

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