L’art de la Aïta séduit les jeunes marocains

Lart de la Aïta a le vent en poupe. De nos jours, ce genre artistique, musical et poétique ne cesse de séduire les jeunes. Est-ce un retour nostalgique ou une quête de soi dans les chants authentiques d’un art ancestral ?

En effet, la Aïta est écoutée aujourd’hui sur Youtube et partagée de plus en plus par les jeunes sur les réseaux sociaux. Il y a quelques semaines, le jeune chanteur populaire Othmane Mouline a fait le buzz sur la toile grâce à ses reprises originales et authentiques des chansons de la Aïta et de la musique populaire marocaine. A trente ans, cette star montante du Chaâbi est très appréciée. Othmane s’inspire de Hajja Hlima, l’une des références incontournables de la Aïta au Maroc.

Plusieurs groupes intéressés par cet art et d’autres expressions musicales et culturelles marocaines ont investi les réseaux sociaux comme Facebook, notamment le groupe «les chevaliers du patrimoine » qui est suivi par 19 229 passionnés et passionnées. Ce groupe a été créé par le chercheur en patrimoine et culture populaire marocaine, Nacim Haddad. D’autres pages comme « l’art de la Aïta» contribuent également  à la promotion de cet art.

Le Maroc a connu plusieurs figures de proue de la Aïta Azzaaria, Al Jablia, Al Gharbaouia, Al Haouzia, Al Marsaouia et Al Mallalia…en l’occurrence de Hammounia, Hajja Hamdaouia, Fatna Bent Alhoucine, Hajja Hlima, Khadija El Bidaouia, Hadda Ouakki, Kharboucha, Hajib, Stati, Mohamed Laaroussi et bien d’autres voix.

L’Aïta, un appel de ralliement, puise ses paroles dans le vécu des petites gens. Il traite de l’amour, du plaisir, de la beauté et de la nature. Toute une histoire se résume dans un poème, dans une chanson rythmée et harmonieuse. L’envie de renouer avec l’art de l’Aita existe, la volonté aussi. Il reste toutefois à accompagner ces jeunes pour assurer une relève capable de pérenniser cet art et le sauver de l’oubli.

***

Hajib : «La Aïta, un art authentique qui a besoin de documentation»

hajjibTrès tôt, le chanteur Hajib a commencé à chanter dans les fêtes locales. C’est à l’âge de 13 ans que l’artiste a entamé sa carrière d’artiste. Après avoir été marqué par la voix de Fatna Bent Lhoucine, il s’est consacré à la Aïta, notamment Al Marsaouia, Al Haouzia et Al Mallalia. «L’art de la Aïta est entre de bonnes mains parce qu’il séduit un tas de chercheurs et de professeurs universitaires. Cet art est sur la bonne voie. Si les jeunes s’adonnent certes à cet art, il faut toutefois savoir que chaque personne chantant le Chaâbi n’est forcément pas dans le registre de la Aïta», explique le chanteur à Al Bayane.

Selon lui, il faut distinguer entre la chanson populaire estivale consommée et l’art de la Aïta,  car cet art a ses symboles, ses genres, ses rythmes, des rituels. «Effectivement, aujourd’hui, il y a des jeunes qui pratiquent cet art ; ils commettent des fautes. Mais ce qui est primordial c’est cet intérêt accordé à la Aïta», fait-il savoir. «Il ne faut pas non plus oublier que des films et feuilletons traitent la question de la Aïta», ajoute t-il.

D’après lui, malgré ces vagues de musique qui monopolisent et dominent la scène, la Aïta a toujours sa place. «Il faut documenter cet art. Cette documentation doit être audiovisuelle et écrite tant qu’il y a encore des Cheikhs et Cheikhates en vie», avance Hajib. Pour lui, la technologie ne menace pas l’art de la Aïta parce que les gens cherchent un art vivant et originel.

***

Abdelaziz Stati : «Il faut que les jeunes apprennent les rouages du métier !»

stati«Il faut apprendre l’art de la Aïta. Cet art appartient à tous les Marocains», estime le chanteur populaire Abdelaziz Stati.  Pour lui, le domaine est ouvert à tous les passionnés et amoureux de cette expression musicale. «Les voix féminines de cet art authentique sont en voie de disparition. Il n’y a pas de relève», déplore t-il. Si aujourd’hui les jeunes sont intéressés par cet art, Stati estime toutefois qu’il « faut qu’ils apprennent les bases du métier et approfondissent les recherches dans ce cadre, car les rythmes et techniques de la Aïta sont un peu compliqués». Selon lui, il faut aimer ce type musical pour l’exercer, et ce, en retournant à ses sources et  origines.  «Le métier exige un travail permanent, une recherche pertinente dans les rythmes, les arrangements, les sonorités et la poésie», poursuit-il.  «Nous avons appris les techniques et rouages de ce métier avec toutes ses couleurs, ses diversités (Al marsawia, Al Hawzia, Al Jablia, Al hamdouchia, Al Zaaria). Nous avons consacré notre carrière artistique à la quête de l’authentique dans cet art. Il faut que les jeunes retournent aux bases de l’Aita afin d’avoir une idée sur le patrimoine musical marocain», souligne t-il.

M.N.Y

Top