Libérer le potentiel de l’horticulture africaine

Entretien avec le Professeur Redouane Chokrollah

Propos recueillis par Mohamed TAFRAOUTI

L’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) de Ben Grir a récemment accueilli les activités de la Cinquième Conférence internationale sur le secteur horticole en Afrique, sous l’égide de l’ISHS (International society for horticultural science). La conférence s’est étalée sur quatre jours (du 26 février au 1er mars) et comprenait un programme riche et diversifié couvrant tous les domaines de l’horticulture. Elle a été le théâtre de deux séances plénières animées avec plusieurs intervenants qui ont discuté de la situation du secteur horticole et de sa contribution à la sécurité alimentaire, ainsi que des opportunités et des défis auxquels il est confronté.

La conférence comprenait trois ateliers qui ont examiné l’horticulture numérique et les innovations, l’horticulture urbaine et périurbaine, et la souveraineté alimentaire grâce à des semences et du matériel agricole de haute qualité. Le programme de la conférence comprenait également une séance orale scientifique et technique qui abordait la plupart des domaines de l’horticulture. La conférence a également vu de nombreuses contributions de chercheurs qui ont présenté des affiches scientifiques qui ont été discutées avec les participants. En marge du congrès, nous avons eu un dialogue avec le Professeur Redouane Chokrollah, professeur à la Faculté des Sciences de l’Agriculture et de l’Environnement de l’Université Polytechnique Mohammed VI, co-président de la conférence.

Redouane Chokrollah, professeur au Collège de l’agriculture durable et des sciences de l’environnement à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), nous livre ici ses impressions, en marge de cette Cinquième Conférence, dont il est co-président.

Quelle est la situation agricole/horticole du Maroc et ses perspectives dans le contexte du continent africain ?

L’horticulture présente des perspectives très prometteuses surtout dans le secteur maraîcher, arboricole fruitier et les plantes médicinales, et contribue à la sécurité alimentaire, nutritionnelle et sanitaire de la population marocaine et africaine.

L’essor de ces activités a commencé avec le Plan Maroc Vert (PMV) qui a encouragé l’arboriculture ou la reconversion de la céréaliculture vers d’autres activités, en particulier l’olivier, le caroubier, le cactus et le figuier.

Cependant, plusieurs contraintes limitent la productivité du secteur horticole, en particulier les semences de qualité et les bonnes pratiques de production et de conservation. Ainsi, nous avons voulu que le thème de ce cinquième congrès de AAHC soit de libérer le potentiel d’une horticulture résiliente en Afrique, avec pour objectifs de discuter et de promouvoir l’énorme potentiel de l’horticulture africaine.

Nous espérons que cet événement permettra aux professionnels de l’horticulture, aux chercheurs, aux jeunes scientifiques et entrepreneurs, de partager les résultats de la recherche, les applications et les dernières innovations, ainsi que de construire un réseau de coopération technique entre les professionnels de l’horticulture à travers l’Afrique et le reste du monde. De plus, les jeunes et les horticulteurs en début de carrière auront ample occasion d’interagir avec les horticulteurs expérimentés.

L’Afrique est en train de devenir une région importante pour l’horticulture dans le monde. Aujourd’hui, plus de 60 % de la population africaine vit de l’agriculture. Alors que la population des jeunes en Afrique croît plus rapidement que dans toutes les autres régions du monde, environ 74 millions d’emplois devront être créés en Afrique au cours de la prochaine décennie. L’horticulture a le potentiel de générer des emplois locaux, grâce à l’alimentation locale réduisant l’empreinte carbone, créant des ceintures vertes urbaines, recyclant les déchets urbains organiques et fournissant une alimentation saine et nutritive à la population. Cependant, plusieurs défis et chocs exogènes – notamment les événements météorologiques extrêmes et le changement climatique, les épidémies récurrentes de ravageurs et de maladies et l’adoption inappropriée de technologies visant à améliorer la productivité – ont mis en évidence les fragilités du système horticole africain, sapant la capacité du continent à répondre à la demande alimentaire. d’une population en plein essor.

Au Maroc, la filière fruits et légumes occupe une superficie de près de 1 300 000 ha, dont environ 1 000 000 ha de plantations fruitières et 300 000 ha de cultures maraîchères. La production globale moyenne est d’environ 9 millions de tonnes, dont près de 3 millions de tonnes de fruits et plus de 6 millions de tonnes de légumes. Voir plus de détails page suivante : Les exportations annuelles de fruits s’élèvent à : 3.552.000 Tonnes, celles de produits maraîchers à 2.5134.000 Tonnes. Le Maroc donc, s’impose en tant qu’acteur clé et un modèle de premier plan dans la région pour ses progrès et ses réalisations que confortent ses productions orientées vers l’export. De même, Notant que le choix du Maroc pour abriter pareille manifestation consolide sa position d’acteur d’accéder aux dernières connaissances, technologies et meilleures pratiques en horticulture en Afrique et dans le monde.

“En dépit des défis confrontés dans le contexte du changement climatique, notamment la pénurie d’eau, les températures extrêmes, les précipitations irrégulières, les ravageurs et les maladies, la dégradation des sols, ce secteur présente d’importantes opportunités

 Le congrès a abordé plusieurs sujets d’intérêt dans le domaine de la recherche et de l’innovation. Quelle est la vision le plus important abordé lors de la conférence ?

Nous comptons près de 300 participants originaires du monde entier, plus précisément de 45 pays allant de l’Australie, de l’Asie, de l’Europe jusqu’à l’Amérique du Nord et du Sud et environ 17 pays africains.

Cet événement a permis aux scientifiques, et en particulier aux jeunes participants et aux entreprises, d’échanger des connaissances dans le but ultime d’améliorer la productivité et l’utilisation efficace des ressources naturelles afin que l’agriculture devienne plus résiliente au changement climatique et garantisse une alimentation suffisante à la population mondiale.

Nous avons eu 14 sessions et 4 Ateliers, en plus 3 plénières durant lesquelles on a traité les aspects économiques que le secteur horticole peut jouer dans le développement agricole, et la sécurité alimentaire de l’Afrique ; Ainsi que le rôle de l’horticulture dans l’amélioration de la nutrition des populations africaine et l’amélioration de leurs revenus.

  Les aspects traités sont :

  • Innovation numérique pour l’agriculture à petite échelle en horticulture
  • Technologies d’innovation et stratégies de production pour un environnement contrôlé durable
  • L’horticulture pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique
  • Best Agricultural Practices for smart horticulture
  • Nouvelles technologies pour la production de légumes urbains
  • Utilisation efficace de l’eau et des nutriments en horticulture
  • Horticulture adaptée aux milieux marginaux
  • La souveraineté alimentaire grâce aux semences et au matériel végétal
  • Lutte intégrée de la production horticole
  • Technologies de récolte et post-récolte en horticulture

Quelles sont les conclusions les plus importantes qui ont émergé des résultats de la conférence et qui pourraient constituer un changement significatif dans le secteur agricole/ Horticulture au Maroc en particulier et dans l’Afrique en général ?

Nous identifions, testons et introduisons des cultures et des technologies économes en ressources et intelligentes face au climat, les mieux adaptées aux différentes régions touchées par la salinité, la rareté de l’eau et la sécheresse. Grâce à notre travail, nous contribuons à améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition et à créer des emplois et des moyens de subsistance pour certaines des communautés rurales les plus pauvres du monde.

Il va sans dire que nous sommes très reconnaissants envers les sponsors (FAO, OCP SA, OCP Africa, Crédit Agricole, Azura, Koopert et Hoogendoorn) pour leur soutien inestimable, qui nous permet de procéder de manière très fluide et sûre au cours de la préparation. C’est génial cet événement.

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