Au SIEL 2025, Driss Meliani présente « Les poétesses écrivent mieux »
Mohamed Nait Youssef
« Les poétesses écrivent mieux », voilà un titre résolument accrocheur. Driss Meliani, poète, traducteur, romancier et nouvelliste, a dévoilé son anthologie poétique, dimanche 20 avril au stand des éditions Bab Al Hikma, lors de la 30ᵉ édition du Salon International de l’Édition et du Livre (SIEL).
Ce titre, explique-t-il, est un hommage à son ami, le romancier Mohamed Sof, qui avait traduit un recueil de poèmes issus de textes narratifs d’Amérique latine.
«Je me suis inspiré de cette idée pour choisir ce titre. Non pas pour minimiser la valeur des poètes masculins, ni pour exalter excessivement celle des poétesses, mais simplement pour rendre justice à la poésie marocaine féminine, souvent marginalisée à tort, privée de célébration, de critique et de reconnaissance », a-t-il confié à Al Bayane en marge de sa séance de dédicace.
« Il n’y a pas d’écriture féminine ou masculine »
Dans l’introduction, l’auteur explore les débats entourant la poésie féminine, notamment la tradition des comparaisons entre poètes, une pratique ancienne dans la littérature arabe. « Ces jugements de valeur existent depuis toujours », rappelle-t-il.
Surtout, Meliani y défend une thèse essentielle : il n’existe ni écriture féminine ni masculine, aucun champ sémantique réservé à un genre. «Il n’y a que la poésie. Bien sûr, nous évoluons dans une société patriarcale où les hommes ont longtemps dominé ce domaine. Mais un poète peut écrire sur les femmes mieux qu’elles ne le fassent elles-mêmes, et vice versa. La question n’est pas de comparer, mais de reconnaître la valeur esthétique et artistique.»
Ce recueil, subjectif et personnel, rassemble ce qu’il considère comme les plus beaux poèmes de cent poétesses marocaines.
Pour une « citoyenneté poétique »
Meliani y plaide en faveur d’une «citoyenneté poétique» (terme emprunté au poète français Francis Ponge). «Il ne doit y avoir ni hiérarchie entre poésie et prose, ni « sectarisme poétique ». La poésie doit être démocratique, ouverte à toutes les formes : classique, libre, en prose, rythmique… Chaque poète doit être libre de choisir son style. »
Dans cette anthologie, les poétesses marocaines s’expriment aussi bien en vers réguliers qu’en vers libres ou en prose poétique.
Un deuxième volume en préparation
Meliani souligne que de nombreuses autres poétesses talentueuses méritaient d’y figurer, mais l’éditeur a imposé une limite de cent noms. Un deuxième volume est déjà en préparation, promettant des surprises avec des plumes moins connues mais tout aussi brillantes, au Maroc comme à l’étranger.
Une anthologie historique…
Pour Meliani, cette œuvre dépasse la simple critique : «C’est un document historique pour le Maroc, où la poésie a connu une accumulation quantitative et qualitative remarquable. Il est temps d’archiver cette richesse, de classer ses thèmes (la ville, la tristesse, la mère…), et de créer des outils pédagogiques pour les générations futures.»
«Ce livre est une archive, une contribution à la préservation et à la célébration de notre patrimoine poétique », conclut-il.