«Une modernité particulière par apport à la modernité occidentale…»

Rim Laâbi est plasticienne, théoricienne de l’art, Docteur ès Arts Plastiques et Sciences de l’Art (Paris I – Sorbonne) et Professeure universitaire en Histoire des Arts et des Idées/Arts Plastiques et Sciences de l’Art à l’Université Mohammed V- Agdal de Rabat et commissaire de l’exposition «Exposition Femmes, Artistes Marocaines de la Modernité, 1960-2016 ». Dans cette brève interview, elle nous livre son avis par rapport au concept vaste de la modernité et la place de la femme dans l’Histoire de l’art marocain.

Al Bayane : «Exposition Femmes, Artistes Marocaines de la Modernité, 1960-2016 » est le thème de l’exposition. Qu’est-ce que vous entendez par «modernité» ?

Le concept de la modernité va au-delà du repère historique qui est celui de l’après-guerre mondial où les artistes ont contesté : ils ne croyaient plus à cet héritage du beau et du bien de l’humanisme occidental.

Ça va au-delà de cela ! Je fais référence à cette modernité dont parle Baudelaire. Cette modernité est une façon de penser, une façon d’agir, une posture, une façon de regarder le monde dans lequel elles évoluent, une façon de dialoguer avec leur marocanité à travers un certain ancrage que vous allez voir dans toute cette exposition, mais aussi une façon d’être ouvertes dans la modernité en marche dans le monde.

Et là, je crois que ces plasticiennes-là sont modernes parce qu’elles ont une modernité particulière par apport à la modernité occidentale qui est cette rupture avec la tradition. Leur attitude ne va pas seulement dans le sens de renouer avec un univers traditionnel, mais le détourner, interroger ses paradigmes fondamentaux et proposer une perception beaucoup plus large du monde.

En tant qu’historienne de l’Art, quelle place occupe la femme dans l’Histoire de l’art marocain?

Toute l’exposition a cet objectif : poser la question de la visibilité, de l’intégration de la femme dans le monde de l’art au Maroc.  Mais c’est un problème commun à tous les pays, nonobstant les avancées enregistrées ailleurs et même au Maroc. La question que je me pose aussi à travers cette exposition, et tout au long de sa préparation en tant qu’artiste plasticienne-même, tient plus sur l’apport des artistes femmes dans l’Histoire de l’art. Donc, le but n’est pas de donner des réponses… mais plutôt de constater qu’elles sont insoumises et résistantes, qu’elles ont un choix volontaire qui est celui d’être artiste. Évidemment, c’est une nécessité en même temps. Et puis, je trouve qu’avec cette attitude, elles écrivent elle-même l’Histoire de leurs propres mains. Tout cela dans le but de ré-appréhender le savoir-vivre avec soi-même pour, en effet, pour une meilleure symbiose entre hommes et femmes.

Mohamed Nait Youssef

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