Attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI
La classe politique portugaise est dans la tourmente, depuis que, mardi dernier, la police avait annoncé avoir procédé à l’arrestation de Vitor Escaria, le chef du cabinet d’Antonio Costa qui avait démissionné de son poste de Premier ministre, le 7 novembre, après avoir été visé par cette vaste enquête pour corruption qui, d’après le Bureau du Procureur général, avait fait suite à « l’invocation par les suspects du nom et de l’autorité du Premier ministre et de son intervention pour débloquer les procédures ».
La police portugaise a, également, fait savoir qu’elle a procédé à des perquisitions aussi bien au sein de plusieurs ministères que dans la résidence même du Premier ministre.
Aussi, deux jours à peine après la démission du Premier ministre pour « malversation, corruption active et passive de titulaires de fonctions politiques et trafic d’influence » dans le cadre de l’attribution de licences d’exploration de lithium et de production d’hydrogène, après avoir longuement consulté le Conseil constitutionnel, le président Marcelo Rebelo de Sousa, a annoncé, au cours d’une allocution télévisée, avoir proclamé la dissolution du Parlement et convoqué des élections législatives anticipées pour le 10 mars 2024.
En signalant que le limogeage d’Antonio Costa ne sera officialisé qu’en Décembre après l’approbation du budget de l’Etat pour l’année 2024, le président portugais a tenu, néanmoins, à remercier son Premier ministre démissionnaire pour ses huit années de gouvernance et pour tous les défis politiques et sociaux qu’il a dû affronter durant son parcours notamment dans le domaine des énergies renouvelables et des activités liées à la transition énergétique quand bien même c’est dans ce secteur précisément que se situent les irrégularités détectées par l’enquête en cours.
Ainsi, dans le cadre du redécollage économique du Portugal, Antonio Costa avait permis au pays de remonter la pente en mettant en place de grands projets et en promouvant l’essor du tourisme.
Cette dynamique avait permis au Premier ministre démissionnaire d’insuffler l’optimisme et de restaurer la confiance des consommateurs et des investisseurs à telle enseigne que le Portugal va clore l’année 2023 avec une croissance de 2,2% et un excédent budgétaire de 0,8% ; ce qui constitue un cas unique en Europe.
Le président portugais qui n’a pas retenu la proposition des socialistes qui avaient proposé une solution de continuité, c’est-à-dire la désignation d’un nouveau Premier ministre qui gouvernerait en étant soutenu par la majorité dont ils disposent au Parlement au motif qu’elle « ne serait pas légitimée par un vote populaire », a tenu à rappeler que c’est bien « la première fois, dans une démocratie, (qu’)un Premier ministre découvre qu’il va faire l’objet d’une procédure autonome de la Cour Suprême ».
C’est donc en étant soucieux de veiller à cette « stabilité économique et sociale (qui est) indispensable au pays » que le président Marcelo Rebelo de Sousa qui, au début, avait envisagé de nommer directement un successeur à Antonio Costa sans devoir passer par les urnes, a finalement opté pour la dissolution de l’Assemblée et la tenue d’élections législatives anticipées après une passation de pouvoir lente qui n’interviendra qu’après l’approbation de la loi de finance 2024 et qui permettra, ainsi, à Antonio Costa de rester à la tête du gouvernement jusqu’à l’entrée en fonction de son successeur.
La passation de pouvoir va-t-elle se faire en douceur ? Attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI