«Il faut avoir du talent pour faire de la musique»Don Bigg, de son vrai nom Toufik Hazeb, est considéré comme l’un des pionniers du rap marocain. Critiqué par les uns, encensé pas les autres, cet artiste à la carrure imposante ne cesse de surprendre. Bigg rappe comme il respire, mais il le fait à sa manière. Pour lui, devenir une star nécessite outre le talent, d’incarner les valeurs que le public souhaite retrouver. Avec sa propre empreinte, il a pu se faire une place dans les premiers rangs de la scène rap marocaine tout en restant authentique. Il a notamment su se faire un nom et créer sa propre maison de production sous le nom «Don bigg factory». Il a déjà produit 6 albums de jeunes artistes, le dernier étant celui de Jihane Bougrine. L’artiste nous livre dans cet entretien quelques détails, astuces et ingrédients sur la production d’un album, au bonheur bien évidemment des jeunes talents enclins à se produire un jour. Les propos.
Al Bayane : «Don Bigg Factory» est votre maison de production. Comment se fait la création d’un album, notamment la production et la réalisation ? Comment les jeunes talents peuvent-ils choisir le bon studio ou la bonne maison de production afin de se lancer dans le milieu artistique ?
Don Bigg : Avant tout, il faut avoir du talent pour faire de la musique, notamment pour écrire des paroles. Il faut une conception accompagnée d’une vision artistique pour exister dans ce domaine. On ne fait pas de l’art pour faire de l’art, mais plutôt pour transmettre un message avec un bon contenu à un grand public. Après, vient le rôle de la production et de la réalisation qui se fait en trois étapes.
En matière d’enregistrement, il existe des studios, au Maroc comme ailleurs, adaptés à divers styles de musiques et à divers budgets. Les tarifs pratiqués étant variables, il est important de bien se renseigner sur les différentes offres (par exemple : avec ou sans ingénieur du son) et sur le type de matériels mis à disposition, tout en sachant qu’un prix élevé justifie un meilleur enregistrement (grâce à l’expérience de l’ingénieur du son ou à la qualité du matériel). Certains studios d’enregistrement proposent par ailleurs des prix préférentiels pour l’enregistrement d’un premier CD démo (4 titres). Concernant le mixage, la plupart des studios faisant de la prise de son font également du mixage. Certains studios ne font que du mixage. Le mixage peut facilement durer aussi longtemps que l’enregistrement et les prix sont plus ou moins les mêmes que pour l’enregistrement. Le mastering est une opération ne demandant pas beaucoup de temps mais importante. Il permet la création d’un CD format idéal pour le pressage. Il permet également de donner un son plus professionnel, favorisant une plus large diffusion de l’album (radios ou autres diffusions publiques). Pour un premier album, il n’est pas nécessaire de se rendre dans les meilleurs studios possibles (sans doute beaucoup plus chers). Il est par contre très important d’arriver en studio bien préparé (nombreuses répétitions, voire pré-productions).
Qu’en est-il de la fabrication ?
La fabrication se divise en deux parties, notamment le pressage et les visuels et emballage. Concernant le pressage, il est nécessaire de le planifier afin d’obtenir les albums avant un concert ou une tournée pour pouvoir s’en servir comme outils de promotion pour les diffuser au mieux. Il faut compter 3 mois avant la sortie de l’album pour le mastering et 6 mois avant le concert. En matière de visuels et emballage, il faut dire qu’un visuel réussi participe au «succès commercial» d’un album. Il est donc important de soigner le graphisme d’un projet, de demander un devis à différents graphistes et de définir le type d’emballage, selon le budget à disposition. La majorité des usines de pressage s’occupent également de l’impression des visuels. D’autres travaillent directement avec des boîtes de distribution qui représentent un gage de qualité (couverture médiatique et vente).
Comment se font la diffusion et la distribution ?
Pour diffuser son œuvre, un artiste peut faire appel à une boîte de distribution, à une maison de disques (label) ou à un éditeur. Il est important de ne pas arriver avec un produit fini, mais avec des maquettes (CD ou autres). Plusieurs types de contrats sont alors susceptibles d’être signés entre autres le contrat d’artiste (Interprète) ou de production. Il s’agit d’un contrat qui définit la relation légale entre l’interprète et le label au cas où ce dernier est producteur de la bande master. Par ailleurs, il existe le contrat d’enregistrement ou de production. Celui-ci définit la relation légale entre l’interprète en tant qu’accompagnateur et producteur. Le contrat de licence quant à lui définit la relation légale entre le producteur et le label. Pour ce qui est du contrat de distribution, il définit la relation légale entre l’artiste ou le label et le distributeur. Enfin, le contrat d’édition définit la relation légale entre un éditeur et un auteur et/ou compositeur.
Le code-barre permet quant à lui à l’album d’être recensé dans les systèmes informatiques des revendeurs. Dans certains cas, le fait de ne pas avoir de code-barre nuira à la distribution de l’album. Distributeurs et disquaires indépendants seront plus réticents et de grandes enseignes (Fnac, Virgin,…) ne distribueront tout simplement pas le disque.
Et les volets promotion et commercialisation ?
Au cas où l’artiste travaille avec un label ou une boîte de distribution, ces structures peuvent assurer, en partie, la promotion et la commercialisation de l’œuvre. La première tâche de l’artiste est de faire un dossier de présentation (biographie, discographie, photos, dates de concerts, articles de presse, etc.) qui constitue une véritable carte de visite.
Ensuite, grâce à Internet, il est désormais facile de réaliser sa propre promotion via MySpace, MX3, YouTube, Facebook, Twitter et l’envoi promotionnel de mailing/newletters assortis de fichiers audio numériques à différents médias et institutions (radios, clubs, festivals, etc.).
Dans les deux cas, la promotion doit représenter une part non négligeable du budget de production de l’album. La tournée suivant la sortie d’un album est aussi un bon moyen de promouvoir et commercialiser l’album. Il est donc important de coordonner la tournée en fonction de la sortie de l’album.
Que conseillez-vous aux jeunes talents qui veulent se lancer dans cette voie ?
De croire en ce rêve, mais surtout de finir leurs études. Pour la simple raison que les incultes ne peuvent réussir dans aucun domaine.
Omayma Khtib